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De profundis pour les Patagons (sur la mort de Margerie)

Article mis en ligne le dimanche 26 octobre 2014

Lu sur planète sans visa le blog de Fabrice Nicollino

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De profundis pour les Patagons (sur la mort de Margerie)
Publié le 23 octobre 2014

Je n’ai hélas pas le temps, car je ne suis pas chez moi, car je suis en vadrouille. Bien entendu, je me m’associe pas une seconde au deuil national (officieusement) décrété pour la mort du patron de Total, Margerie. Peut-être était-il un bon père, un excellent époux, un grand buveur de bordeaux, et toute autre chose dont je me fous royalement.

Avant que de me prosterner devant lui - et dans ce registre, le chef des Verts, Placé, a pulvérisé tous les records en saluant « un grand capitaine d’industrie français très lucide sur la situation de la planète » -, je préfère penser aux innombrables victimes des exactions planétaires de toutes les entreprises pétrolières. D’immenses territoires ont été tués - oui, on peut parfaitement massacrer pour des siècles une contrée, comme en témoigne l’exemple du delta du Niger, où Total officie depuis des décennies - des peuples peuvent être réduits à mendier leur survie, des animaux et des plantes perpétuellement sacrifiés pour que sortent le pétrole et le gaz.

Je préfère penser aux vraies victimes. Margerie a joué, il s’est bien amusé, et jamais aucun tribunal des crimes industriels ne lui demandera le moindre compte. À une autre échelle, qui montre combien les prétendues élites de ce pays sont misérables, Total est l’un des grands acteurs du dérèglement climatique en cours, qui conduit droit à la dislocation des sociétés humaines. J’ai presque scrupule à rappeler pareille évidence : Total gagne ses milliards d’euros en envoyant dans l’atmosphère des quantités astronomiques de gaz à effet de serre. Et soutient presque aussi directement un mode de vie qui s’attaque à nos équilibres les plus élémentaires.

Que penser de nos si pitoyables dirigeants qui, de Hollande à Valls, pleurent leur petit chéri à eux ? Je ne cherche pas les mots, car je sais trop bien qu’ils n’existent pas encore. Si vous entendez encore parler de la mort de Margerie, pensez plutôt à ceux qui meurent écrasés sous la meule ou cramés dans les torchères aux quatre coins du monde. Je ne pleurerai jamais tous les morts.

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