Une tribune pour les luttes

8 MARS

Résister au militarisme !

Déclaration internationale de la Marche Mondiale des Femmes

Article mis en ligne le mardi 8 mars 2016

Ces jours-ci, le monde se prépare à fêter le 8 mars. La Journée Internationale de la Femme est célébrée sur toute la planète par des syndicats, des organisations, des groupes de femmes… qui, ignorant souvent les origines socialistes de cette date, rendent hommage aux femmes qui seraient mortes, enfermées et piégées par un incendie dans l’usine où elles travaillaient aux États-Unis.

Nous, la Marche Mondiale des Femmes, nous célébrons la lutte des femmes et du mouvement féministe sur toute la planète. Nous célébrons la force de toutes celles qui consacrent leurs efforts à se libérer du patriarcat, du néocolonialisme, du capitalisme et du racisme qui sont les causes à la source du système oppresseur dans lequel nous vivons.

Nous observons, indignées, comment le concept de Sécurité et Paix est en train d’être totalement bafoué et manipulé, utilisé par les pouvoirs hégémoniques afin de justifier la militarisation et la « paix armée » tout en supprimant complètement la perspective de Droits de l’Homme et des Femmes.

Nous avons constaté, pendant notre IVème Action Internationale de 2015, comment les conflits armés et les guerres de type non conventionnel se répandent et se déploient rapidement dans toutes les régions semant la peur, la violence, les maladies, la haine et la pauvreté, et favorisant le fondamentalisme. Cette violence, qu’elle soit exercée par l’armée, les milices, les entreprises privées de « sécurité », les mafieux du crime organisé, le personnel des missions internationales de pacification ou par les propres États, alimentent en fin de compte un système capitaliste patriarcal dans lequel les femmes sont toujours celles qui souffrent le plus.

En Asie, la présence de bases militaires de puissances étrangères est de plus en plus évidente, et entraine de graves conséquences concernant la violation des Droits humains des femmes, l’augmentation de la prostitution, des cas de violence envers les femmes et les jeunes filles, du trafic d’êtres humains…

En Afrique, les« libérateurs » du continent sont devenus les oppresseurs de la citoyenneté. Moyennant un pouvoir autoritaire, ils continuent de limiter de façon radicale les libertés et droits démocratiques de la population. Ces circonstances sont propices à l’émergence rapide de groupes fondamentalistes de type religieux, ethnique ou culturel (s’autoproclamant les défenseurs du peuple), qui gagnent de l’ampleur jour après jour, et occupent le territoire dangereusement, en infligeant des conditions de vie inhumaines et en violant les droits humains des femmes.

Dans les pays Arabes, nous voyons comment l’instabilité et les conflits armés en Syrie, en Irak, en Libye et au Yémen sont fomentés par les puissances économiques qui voient s’accroître leurs bénéfices par le biais du commerce des armes, et qui trouvent dans le chaos un terreau parfait pour imposer leurs intérêts, sans se soucier de la souffrance que cela génère au sein des populations civiles désarmées. Des milliers de personnes fuient la région à la recherche de paix et de sécurité. Les femmes et les jeunes filles se trouvent en situation de plus grande vulnérabilité et sont victime de viols, d’agressions sexuelles et de violences. Elles se trouvent contraintes de proposer des services sexuels en échange de la possibilité de réaliser leur rêve d’obtenir refuge et des services de base dans des pays supposés être plus sûrs.

En Palestine, l’Etat d’Israël continue d’utiliser la violence pour imposer son système d’apartheid et de colonialisme sioniste : le blocus de Gaza, les exécutions et les arrestations arbitraires de population civile, la politique de colonisation et de démolition de maisons sont la réalité quotidienne dont souffre la population palestinienne.

Au Sahara occidental, le Gouvernement du Maroc, avec la force armée, consolide chaque jour sa politique d’occupation, de pillage et de répression, ignorant totalement ses engagements internationaux préalables.

Dans les Amériques, la nature subit une spoliation sauvage provoquée par des entreprises minières et des multinationales qui utilisent la police et l’armée, aussi bien que d’autres compagnies privées de sécurité, pour usurper les ressources et déplacer des communautés, au profit de leurs seuls intérêts. L’eau, la terre, les forêts et l’air sont privatisés et commercialisés tandis que les communautés se retrouvent sans les moyens garantissant leur survie et leur autonomie.

En Europe, les gouvernements tirent profit de ce contexte international pour justifier la criminalisation des mouvements sociaux. Nous constatons une réduction alarmante des libertés citoyennes souvent légitimée par des lois de plus en plus répressives. Nous observons la fragilité de nos systèmes démocratiques face à la montée de groupes politiques d’extrême droite qui favorisent des politiques et des attitudes xénophobes comportant la fermeture des frontières et le refus d’asile à des personnes réfugiées.

Face à ce contexte international décourageant, nous, les militantes de la Marche Mondiale des Femmes, poursuivons notre chemin de construction de nos alternatives féministes. Nous continuons de tisser des liens avec d’autres mouvements alliés avec lesquels nous partageons une vision commune. Nous continuons d’appuyer le combat local de nos compagnes qui luttent pour défendre la durabilité de la vie.

Nous savons qu’ensemble nous sommes plus fortes, qu’ensemble nous construisons un mouvement mondial irrépressible, capable de changer bien des choses, et c’est pourquoi, lors de notre prochaine Rencontre Internationale, nous échangerons nos expériences de lutte et de résistance, nous approfondirons notre réflexion commune, nous évaluerons notre IVe Action Internationale, nous planifierons notre avenir en tant que mouvement et nous nous ressourcerons pour continuer notre lutte et notre résistance.

Nous résisterons, depuis la base, aux attaques du patriarcat, du capitalisme, du racisme et du colonialisme.

Nous résisterons, comme notre compagne Berta Cáceres, du Honduras, leader indigène et défenseure inlassable des droits des communautés originaires défendant leur territoire, qui en ce mois de mars, a été brutalement assassinée dans son domicile.

Nous résisterons comme Pakize Nayir, Fatma Uyaret Sêve Demir, les camarades kurdes qui, en raison de leur activisme politique, ont été détenues et assassinées par les forces de sécurité du gouvernement turc.

Nous résisterons comme Máxima Acuñaet Dina Mendoza qui, au Pérou, continuent de faire face à la brutalité de l’entreprise minière qui menace l’eau et les terres de leurs communautés.

Nous résisterons comme bien d’autres femmes de toute la planète, anonymes, qui chaque jour, dans leurs maisons, dans leurs communautés, luttent pour leurs droits et en faveur d’autres femmes.

Nous poursuivrons la résistance, toujours. Les armes et le pouvoir patriarcal et oppresseur ne vont pas nous faire taire.

Le 8 mars 2016

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