Une tribune pour les luttes

Mut Vitz 13

Change-toi le monde. Deuxième rencontre des femmes qui luttent en terre zapatiste

De l’autre coté du charco - carnet de passage par Abya Yala (Traba , Patxi Beltzaiz)

Article mis en ligne le dimanche 2 février 2020

En route, pour Morelia pour la deuxième rencontre internationale des femmes qui luttent. Cette-fois, il n’y aura qu’un seul et unique thème, celui de la violence faite aux femmes. Une seule volonté, que cela cesse enfin. Il nous faudra trois jours pour dénoncer, pleurer, danser, crier. Encore aujourd’hui, je ne sais pas ce que j’ai pu ramener de cette rencontre. Encombrée par ce sentiment d’« inconformidad » que je n’arrive pas à traduire mais qui me colle au corps et à l’âme depuis que je suis sur ces terres rebelles.
Première surprise, ce sont des chauffeuses qui vont nous conduire au lieu de la rencontre. Dans leur communiqué, elles nous avait averti qu’elles allaient prendre en charge tous les domaines pour nous accueillir dans les meilleures conditions. Et comme elles ne savaient pas conduire, elles ont appris ! Les zapatistes ne cesseront jamais de nous surprendre. Vraiment !

Photographies : Isabel LOZANO. Gracias compañera !!!

L’ouverture fut magistrale. Spectaculaire. Des centaines de miliciennes prennent placent sur la cancha pour écouter le discours de la comandanta Amada. Dans son dos, une petite fille dort, indifférente aux milliers de regards qui se posent sur sa mère. La commandante nous annonce que nous sommes plus de trois mille femmes du monde, originaires de 49 pays. Un discours de bienvenue pour toutes ces femmes qui luttent dans leur monde selon leurs propres modes d’actions, « Nous pensons que la différence n’est pas une faiblesse. Nous pensons que la différence est une force puissante s’il y a respect et accord pour lutter ensemble sans pour autant s’assimiler ».

Un an après la première rencontre, le constat sur les violences faites aux femmes est toujours aussi accablant. Désespérant. Les meurtres, les disparitions, les viols n’ont pas diminué. Bien au contraire ! Et lorsqu’Amada demande à l’assemblée, comment nous nous sommes organisées dans nos régions du monde, il y a comme un flottement. On se regarde de biais. Bien conscientes que le peu que nous avons fait n’est pas digne d’être raconté là. S’ensuit une liste de supposés progrès sur les droits des femmes, ponctués à chaque fois par un implacable « Pero nos siguen asesinando ». Une phrase glaçante répétée une dizaine de fois. On est comme suspendues à ses lèvres, toutes unies dans la même douleur et la même rage face à ce constat d’impunité qui règne lorsqu’on parle de la situation des femmes. Que se soit ici au Chiapas, au Kurdistan ou à Marseille.

Sans triomphalisme, Amada nous signale que sur le territoire zapatiste, il n’y a ni féminicides ni disparitions de femmes. Preuve que l’organisation peut-être un rempart contre l’ignominie.
Pour les zapatistes, il n’y a aucun doute « Dans ce monde capitaliste et patriarcal, être une femme est la situation la plus dangereuse qui soit ». Il faut donc continuer à se battre pour un droit fondamental, celui d’avoir le droit de vivre ! Elle insiste « Le droit à la vie comme tous les droits, nous devons les conquérir, à chaque instant et dans tous les lieux. Pour les femmes qui combattent, il n’y pas de repos ». Sa conclusion est simple, il faut apprendre à se défendre, à s’organiser ensemble pour protéger celles qui sont les plus vulnérables. Sa voix se fait offensive « Nous devons nous protéger et nous défendre avec tout ce que nous avons. Et si nous n’avons rien, alors ce sera avec des bâtons et des pierres. Et s’il n’y a pas de bâton ou de pierre alors ça sera avec notre corps. Se défendre bec et ongles, arracher chaque espace de liberté avec les dents, il n’y a plus le choix ! ». Un discours tout en force, loin d’une idéologie pacifique. Nous sommes en guerre, déclare fermement Amada. Le temps du silence et de la peur est terminé. Il est temps de s’organiser ensemble. Tenemos que vivir a la defensiva ! Le message est clair. Pas besoin de traduction…

La suite et les photos ici

P.-S.

Nous vous invitons à suivre "De l’autre coté du charco" sur place :

https://delautrecoteducharco.wordpress.com

Nous publierons sur ce blog des articles et des photos des différents lieux et situations que nous rencontrerons durant notre passage en Amérique, ou plutôt en Abya Yala.
Abya Yala est le nom indigène pour désigner le continent Amérique.
Photographies : Patxi Beltzaiz / Textes : Vero Traba

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