Une tribune pour les luttes

La COP 26 démontre une fois de plus l’incapacité du capitalisme à empêcher les conséquences désastreuses de son développement

Article mis en ligne le mardi 16 novembre 2021

La « COP 26 » qui vient de s’achever à Glasgow a rassemblé des représentants de pas moins de 195 États et près de 40 000 participants dont beaucoup de délégués d’entreprises venus faire du lobbying en faveur de leurs intérêts propres.

Ces conférences internationales sont organisées tous les ans par l’ONU dans le cadre d’une « convention » sur le changement climatique adoptée en 1992 et signée à ce jour par 197 pays. La convention reposait sur 3 principes : le principe de précaution, celui de la responsabilité collective (« mais différenciée »), et celui du « droit au développement ». Élaborée par des experts bourgeois et signé par des États tout aussi bourgeois, cette convention ne pouvait évidemment pas mettre en cause le rôle du mode de production capitaliste. Elle voulait au contraire protéger celui-ci des conséquences néfastes et des perturbations causées par le réchauffement climatique – bien autre chose que le slogan bourgeois « sauver la planète » qui ne vise qu’à camoufler cet objectif réel derrière une revendication commune à tous , au dessus des classes sociales et de leurs conflits.

Au fil des COP successives les participants ont essayé de sortir des déclarations d’intention générales pour se donner des objectifs concrets. A Paris en 2015, lors de la COP 21, un accord fut signé prévoyant diverses mesures pour limiter le réchauffement climatique à moins de 2 degrés, les experts du GIEC ayant conclu que c’était cette augmentation de la température qui était au minimum prévisible si rien n’était fait (1). En dépit du caractère vague et non contraignant de cet accord (2), le gouvernement Trump s’en retira en 2020 avant que Joe Biden n’y réintègre les États Unis dès le début de sa présidence. Il ne faut pas s’étonner si ses objectifs n’ont pas été atteints, surtout après l’échec de la COP 25 en 2019. Cette COP dont le slogan était « il est temps d’agir » ( !) aurait dû avoir lieu au Chili, mais en raison des troubles sociaux dans ce pays elle fut transférée en Espagne : les révoltes sociales ne sont évidemment pas favorables aux discussions entre Etats bourgeois qui les craignent bien plus que le réchauffement climatique !

La COP 26 qui a eu lieu deux ans plus tard à cause de la pandémie, n’a pas connu un échec comme celle de Madrid ; et le premier ministre britannique a déclaré qu’un « grand pas en avant » avait été réalisé par l’accord signé le 13 novembre à l’issue des 2 semaines de négociations de la Conférence, tout en reconnaissant qu’il y avait « énormément à faire dans les années qui viennent ».

Mais pour les militants écologistes à la Greta Thunberg cet accord n’est que de « bla-bla », avis partagé par Antonio Gutterez, le secrétaire général de l’ONU qui a dénoncé « les promesses creuses » de cette conférence. Un exemple suffirait pour le démontrer : l’Inde a fait retirer in extremis de l’accord final une phrase appelant à la « sortie progressive » de l’utilisation du charbon pour la remplacer par sa « réduction progressive ». Les pays capitalistes européens qui ont fait leur révolution industrielle grâce au charbon, ont à peu près tous fermé leurs mines devenues non rentables (3) ; ils n’ont donc aucune difficulté à militer pour la fin du recours au charbon dans les autre pays – alors que l’Inde, la Chine et d’autres y ont encore massivement recours. « Nous sommes devenus la voix des pays en développement », s’est félicité le ministre indien… du climat et de l’environnement, en commentant la démarche de son pays. L’Inde est le pays le plus pollué du monde ( 40% de la population, surtout urbaine, soumise à des niveaux de pollution atmosphérique « extrêmes », notamment à cause de l’utilisation du charbon), mais le ministre de l’environnement est surtout préoccupé de la santé du capitalisme : les enfants de Dehli (ville la plus polluée de la planète) (4) peuvent bien mourir en respirant l’air empoisonné si les capitalistes indiens s’enrichissent en produisant cette pollution !

Cette attitude n’est pas due fondamentalement au caractère réactionnaire du gouvernement Modi ; la démarche indienne à la COP n’est pas exceptionnelle (mis à part le moment où elle est intervenue, au vu et au su de tous, au lieu de l’ambiance discrète des tables de négociation) : pour tous les États ce qui prime c’est l’intérêt du capitalisme national. Une promesse de l’accord de Paris était que les pays riches allaient financer à hauteur de 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 la reconversion énergétique des pays les plus pauvres ; inutile de dire que cette promesse n’a pas été tenue, alors que des milliers de milliards de dollars ont été débloqués pour relancer l’économie capitaliste dans le monde…

Les intérêts généraux et à long terme du capitalisme peuvent entrer en contradiction avec les intérêts immédiats de capitalistes particuliers ; alors l’Etat bourgeois, défenseur de l’intérêt général… du capitalisme peut être amené à l’imposer à certains capitalistes réticents. Rien de semblable au niveau international, où règnent les rapports de force et où chaque État défend son économie : bien que les forces productives du capitalisme se soient développées au point d’avoir des conséquences planétaires et d’appeler objectivement à une action internationale, ne serait-ce que pour les tempérer, l’organisation capitaliste en États distincts et rivaux l’empêche. Et c’est encore plus vrai lorsqu’il s’agit non des intérêts généraux du capitalisme, mais de ceux de la population en général et du prolétariat en particulier.

Les écologistes qui croient que la pression de la « société civile » sur les gouvernements pourrait les contraindre à « agir », ou qui s’imaginent que la « prise de conscience » des citoyens quelle que soit leur appartenance sociale puisque le changement climatique affecte tous les individus, est la solution, se trompent lourdement. Ils se refusent à voir que c’est le fonctionnement du capitalisme – la recherche du profit indispensable à sa vie– qui est responsable de tous les problèmes, de toutes les catastrophes environnementales ou autres, comme il est responsable de l’exploitation, de l’oppression, de la misère et des guerres qui frappent une bonne partie de l’humanité.

Ce mode de production ne peut être réformé ; si l’on veut mettre fin à ses conséquences désastreuses sur tous les plans, il faudra le détruire et le remplacer par une économie communiste, sans argent ni marché, sans classes sociales ni Etats, sans guerres ni oppressions, où l’humanité vivra en harmonie avec elle-même et avec la nature. La condition pour y arriver, ce n’est pas l’union de tous, capitalistes et prolétaires ; c’est la lutte sans merci des prolétaires et des masses opprimées de tous les pays contre la classe capitaliste pour abattre la domination, son organisation politique et étatique, afin d’ériger sur ses ruines le pouvoir totalitaire des exploités – la dictature du prolétariat– indispensable pour extirper le capitalisme en révolutionnant toute l’organisation sociale.

L’urgence à laquelle font face les prolétaires, ce n’est donc pas l’urgence climatique, mais l’urgence politique et sociale de reprendre la lutte pour la révolution communiste internationale !

Parti communiste international, 15/11/2021
www.pcint.org

(1) Nous n’entrons pas dans les discussions sur les prévisions du GIEC (Groupe International d’Experts, sur le Climat, comité onusien), contestées par les « climato-sceptiques ».

(2) La délégation américaine menaça au dernier moment de ne pas signer parce qu’il était écrit que les Etats « devaient » réduire leurs émissions de co2 au lieu de « devraient ». Il fallut rétablir le conditionnel pour qu’elle signe ; pourtant on était à l’époque de la présidence Obama et non de Trump !

(3) Aux Etats Unis, la production de charbon, en recul continu depuis des décennies, devrait cependant être en forte hausse cette année. Et la délégation américaine s’est opposée, elle aussi mais dans les coulisses, à toute déclaration ferme contre l’utilisation du charbon, bien que Joe Biden ait affirmé au cours de sa campagne électorale son opposition à l’utilisation des énergies fossiles…

(4) Le 13/11 les écoles de cette métropole de vingt millions d’habitants ont été fermées pour une semaine, l’air étant irrespirable.

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