Une tribune pour les luttes

Violences des gardiens et morts en prison : l’Administration pénitentiaire en procès au tribunal administratif pour censure

Article mis en ligne le mardi 8 octobre 2024

Depuis 2001, L’Envolée porte la voix des prisonniers et prisonnières en lutte contre le sort qui leur est fait au moyen d’une émission de radio hebdomadaire et d’un journal. L’Administration pénitentiaire (AP) et ses agents n’ont jamais accepté que cette parole circule. Il s’agit de rompre tout lien entre l’intérieur et l’extérieur, et d’empêcher à tout prix la construction d’un point de vue critique avec les prisonniers. L’expression et les lectures de ces dernier·e·s sont systématiquement contrôlées, et les gardiens privent souvent nos abonné.es de leur journal sans aucune justification.

Plus officiellement, en janvier 2021, juin 2022 et janvier 2023, l’AP a successivement censuré le numéro 52 [1] pour un dossier « Peine de mort en prison » sur des violences des surveillants et des décès « suspects », le numéro 55 [2] pour le récit de la mise à mort de Sambaly Diabaté par six surveillants à la maison centrale de Saint-Martin-de-Ré en 2016[1] , et le numéro 56 [3] pour la dénonciation du caractère systémique[2] des violences des surveillants. En fait, ce n’est ni le ton, ni le contenu de notre journal qui « portent une atteinte grave à la crédibilité et à l’honneur » de l’AP, comme elle le prétend, mais bien les faits eux-mêmes !

La distribution du journal a été interdite dans toutes les prisons et l’AP a annoncé son intention de porter plainte pour diffamation envers une administration publique. Au passage, elle en a profité pour mettre la pression sur les abonné.es : fouilles de cellules et menaces de sanctions disciplinaires. Plusieurs associations ont rédigé un communiqué[4], puis une tribune dans Le Monde [5] pour protester contre cette procédure bâillon. Notre directrice de publication a déposé des « recours en urgence » auprès du tribunal administratif, mais le juge n’a pas vu l’urgence de rétablir le libre accès à la presse pour les personnes enfermées. Près de quatre ans après (!), ces recours vont enfin faire l’objet d’une audience au tribunal administratif de Paris le vendredi 11 octobre à 10 heures.

Inutile de dire que L’Envolée ne se fait guère d’illusions sur son issue. L’AP censure sans jamais s’inquiéter d’avoir des comptes
à rendre, et plus que jamais, l’air du temps semble lui donner raison. La diffamation dont elle a prétendu faire l’objet est si peu constituée qu’elle s’est finalement abstenue de porter plainte contre notre directrice de publication, mais sûre que ça va bien se passer, elle ne s’est même pas donné la peine de produire un mémoire de défense malgré les mises en demeure du juge administratif.

Contact presse : 07.53.10.31.95


[1] Ce compte-rendu se borne pourtant à faire connaître la « vérité judiciaire » établie lors des procès des surveillants devant le tribunal correctionnel de la Rochelle ,qui les a d’ailleurs condamnés - à des peines légères.

[2] Et non « systématique », comme le bredouille la note d’interdiction !

LES COUPS DE THÉÂTRE DE LA PÉNITENTIAIRE
Suite du communiqué du 7 octobre 2024

L’audience que nous vous annoncions il y a moins de quarante-huit heures vient d’être reportée. L’Administration pénitentiaire a eu plus de deux ans pour répondre à notre recours en excès de pouvoir. Elle a négligé de remettre son mémoire en défense : une mise en demeure des magistrats est restée sans réponse. Après avoir demandé un délai supplémentaire il y a quelques semaines pour soumettre ses conclusions juridiques, cette autre « grande muette » a fini par le faire... à quelques minutes de la fermeture du bureau des juges – et décroché dans la foulée un report de l’audience. La date de la prochaine n’est pas encore fixée, nous vous en tiendrons informé.es.
Quand on vous dit qu’ils ne sont pas pressés d’en parler...

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