Une tribune pour les luttes

Commémor’action 2025 : Ni oubli, ni pardon, liberté de circulation !

Article mis en ligne le vendredi 31 janvier 2025

Texte de Alarmphone - watch the med

Journée mondiale de lutte contre le régime de mort aux frontières et pour exiger la vérité, la justice et la réparation pour les victimes de la migration et leurs familles
Le 6 février 2024, une grande mobilisation transnationale a marqué les 10 ans de Commemor-Action. Le 6 février 2025, nous souhaitons amplifier davantage cette mobilisation en soutien aux familles des personnes décédées ou disparues en migration.
Le 6 février 2014, plus de 200 personnes, parties des côtes marocaines, ont tenté d’accéder à la nage à la plage du Tarajal, dans l’enclave coloniale espagnole de Ceuta. Pour les empêcher d’arriver en « terre espagnole », la Guardia civil a utilisé du matériel anti-émeute, tandis que les militaires marocains présents ont laissé les personnes se noyer devant eux. Quinze corps ont été retrouvés côté espagnol, des dizaines d’autres ont disparu, les survivants ont été refoulés, certains ont péri côté marocain.
- Depuis plus de trente ans, la violence directe ou indirecte du régime des frontières ne cesse de produire mort et disparitions le long des routes migratoires. Les naufrages se succèdent, avec la non-assistance et parfois la responsabilité active de gardes cotes et de Frontex. Le nombre de personnes disparaissant sans laisser de traces, en mer ou dans le désert, ne cesse d’augmenter. Et les activités de recherche et d’identification des corps de la part des autorités sont trop souvent expéditives et n’impliquent pas les familles touchées par ces deuils.
Depuis plus de trente ans, les familles et les proches, les associations, et toutes celles et ceux qui luttent pour un droit égal à la mobilité, n’ont cessé de réclamer vérité et justice pour ces victimes, de souligner les responsabilités des politiques migratoires racistes, de travailler pour prouver ces responsabilités et pour soutenir les familles et les proches dans leur douloureux parcours de recherche des disparus et d’identification des victimes.
- À partir de l’année 2024, le réseau Commemor-Action s’est doté d’un site pour recenser les mobilisations qui ont lieu le 6 février de chaque année, mais qui veut aussi mettre en avant la dimension collective, coordonnée et commune de ces mobilisations. Une mobilisation qui témoigne d’un engagement constant des associations, des collectifs et surtout des familles en quête de vérité et de justice.
Nous demandons à toutes les organisations sociales et politiques, laïques et religieuses, aux groupes et collectifs des familles des victimes des nécro-politiques migratoires, aux citoyens et citoyennes de tous les pays du monde d’organiser des actions de protestation et de sensibilisation le 6 février 2025.
Nous vous invitons à utiliser le logo ci-dessus, ainsi que vos propres logos, comme élément pour souligner le lien entre toutes les différentes initiatives. Nous vous invitons à nous transmettre les informations relatives à vos initiatives (si possible avant le 6 février) pour nous permettre de visibiliser la mobilisation collective à travers le site commemorAction.

Pour adhérer à l’appel, vous pouvez écrire à : globalcommemoraction chez gmail.com
Groupe Facebook : https://www.facebook.com/groups/330380128977418/
Page Facebook : https://www.facebook.com/profile.php?id=100076223537693
Page des CommémorActions passées : https://missingattheborders.org/news

Migrer pour vivre, pas pour mourir ! Ce sont des personnes, pas des chiffres !
Liberté de mouvement pour tous et toutes !

Texte de Tous Migrants :

QUI SOMMES-NOUS ?

Nous sommes parents, amis et amies de personnes décédées, portées disparues et/ou victimes de disparitions forcées le long des frontières terrestres ou maritimes, en Europe, en Afrique, en Amérique.

Nous sommes des personnes qui ont survécu à la tentative de traverser les frontières à la recherche d’un avenir meilleur.

Nous sommes des citoyen.ne.s solidaires qui aident les immigré.e.s durant leur voyage en fournissant une aide médicale, de la nourriture, des vêtements et un soutien lorsqu’ils se trouvent dans des situations dangereuses pour que leur voyage ait une bonne fin.

Nous sommes des activistes qui ont recueilli les voix de ces immigré.es avant leur disparition, qui s’efforcent d’identifier les corps anonymes dans les zones frontalières et qui leur donnent une sépulture digne.

- Nous sommes une grande famille qui n’a ni frontières ni nationalité, une grande famille qui lutte contre les régimes de mort imposés à toutes les frontières du monde et qui se bat pour affirmer le droit de migrer, la liberté de circulation et la justice globale pour tous et toutes.

QUE SONT LES COMMÉMORACTIONS ?

Depuis le massacre de Tarajal, les CommémorActions visent à relayer les revendications, à mettre fin au déni de justice, à rendre hommage à l’ensemble des victimes d’un régime des frontières dangereux et immoral, pour se rappeler leur nom, au-delà des chiffres déshumanisants et largement en-deçà de la réalité, sans oublier les nombreuses personnes qui disparaissent aussi dans l’anonymat.

Les CommémorActions sont des actions qui commémorent les personnes migrantes décédées, disparues ou victimes de disparition forcée au cours de leur voyage à travers les frontières du monde.

Le processus est né de la collaboration entre les amis et les familles des personnes disparues, notamment en Méditerranée, et les militants qui recueillent leurs témoignages et reproduisent leurs revendications. Cette collaboration s’est consolidée et renforcée autour de la création de la page web Missing at the Borders (https://missingattheborders.org) née pour donner une voix aux familles de migrants et une occasion de faire entendre leur histoire.

Les CommémorActions sont à la fois des commémorations et des protestations qui visent à construire collectivement des processus qui peuvent soutenir les familles dans leurs revendications pour avoir vérité et justice concernant le sort des êtres chers.

Le processus de la CommémorAction consiste en deux événements :

les COMMÉMORACTIONS DÉCENTRALISÉES et les GRANDES COMMÉMORACTIONS

Nous avons choisi la date du 6 février, jour du massacre de Tarajal, comme date symbolique pour organiser chaque année des CommémorActions décentralisés dans tous les pays du monde pour unifier toutes les luttes que de nombreuses organisations mènent chaque jour pour dénoncer la violence mortelle des régimes frontaliers du monde et pour exiger vérité, justice et réparation pour les victimes de la migration et leurs familles.

En février 2020, familles et militants se sont réunis à Oujda en Maroc pour organiser la première Grande CommémorAction et le 6 septembre 2022 à Zarzis en Tunisie pour la deuxième afin de continuer le processus de construction du réseau international des proches des migrants décédés, disparus et victimes de disparitions forcées et pour continuer la lutte pour le droit à la liberté de circulation pour tous et toutes. Les Grandes CommémorActions ont lieu tous les deux ans le 6 septembre, jour où se souvient du naufrage du 2012 survenu à quelques kilomètres de Lampedusa dans lequel plus de 50 personnes ont disparu.

Pour lutter contre les politiques migratoires criminelles et l’invisibilisation des décès des personnes exilées, cette année encore, associations, collectifs et solidaires de Briançon participent à la commémor’action : journée mondiale de lutte contre le régime de mort aux frontières pour exiger vérité, justice et réparation pour les victimes de la migration et leurs familles.

Lire le communiqué en PDF

Chaque année depuis 2014, à la date du 6 février, plus d’une cinquantaine de rassemblements ont lieu au sud et au nord de la Méditerranée (1) à l’occasion du funeste anniversaire du massacre de Tarajal à la frontière maroco-espagnole. Les trois jours de mobilisations organisés cette année à Briançon seront une nouvelle fois l’occasion de partager les revendications de l’appel transnational (à lire ici) et dénoncer les conséquences mortelles du régime de fermeture des frontières.

L’intensification de politiques répressives, obéissant à des logiques sécuritaires et des objectifs dissuasifs, est à l’origine de la mort de milliers personnes exilées, aux frontières extérieures et intérieures de l’Union européenne. Entre 2014 et 2022, l’OIM (Organisation Internationale pour la Migration) estimait à plus de 50 000 le nombre de victimes le long d’itinéraires à destination et au sein de l’Europe, dont 25 104 victimes rien qu’en Méditerranée (2). Entre 2015 et 2024, au moins 144 personnes exilées sont décédées à des frontières alpines (3). En mai 2024, un corps (dont tout laisse à présager qu’il s’agissait d’une personne exilée, sans qu’elle n’ait pu être clairement identifiée) a été retrouvé non loin dans la Vallée Étroite. Ce nouveau drame amène à, au moins, 11 personnes exilées décédées et 5 autres portées disparues à la frontière franco-italienne des Hautes Alpes (4).

Face à l’argumentaire qui déresponsabilise ces disparitions en les incombant au milieu naturel hostile de la montagne, nous rappelons que c’est bel et bien la militarisation de la frontière et les pratiques illégales des forces de l’ordre qui sont à l’origine de l’intégralité des décès identifiés depuis 2018. Cette dernière contraint les personnes exilées à emprunter des itinéraires toujours plus périlleux : cols d’altitude, barre rocheuse, forêts escarpées, traversées de cours d’eau... La preuve en est : les périodes avec le plus d’accidents et de disparitions coïncident avec des renforcements d’effectifs à la frontière. En 2023, alors que la « border force » était exceptionnellement déployée, 3 personnes ont trouvé la mort en tentant de rejoindre Briançon depuis l’Italie en l’espace de 3 mois (entre le 7 août et le 29 octobre).

En plus de dénoncer les conséquences des politiques migratoires, la Commémor’action participe à la réhumanisation des défunt·es face à « l’invisibilisation et de l’anonymisation mises en œuvre par les pouvoirs publics » (5). Au-delà de simples patronymes, nationalités et chiffres, les personnes mortes ou disparues en migration avaient des identités propres, des projets, des histoires singulières, et des familles souvent restées sans nouvelles. C’est précisément pour empêcher cette déshumanisation et répondre à la mise sous silence que le mémorial aux mort·es des frontières a été érigé en février 2024 vers la porte de Durance à Briançon, avant d’être détruit quelques semaines après par la mairie de Briançon, le 26 mars 2024.

Programme

06/02/2025 à 17h30 : Rassemblement d’hommage pour les personnes mortes aux frontières (Pont de la rue centrale, Briançon) ;
07/02/2025 à 20h30 : Ciné-débat autour du film Un paese di resistenza, en présence de la co-réalisatrice et d’associations et collectifs solidaires de Briançon (Cinéma le Cosmo, Briançon) ;
08/02/2025 à 17h00 : Manifestation d’interpellation des forces de l’ordre (départ de l’espace partenaire/Prarial, Montgenèvre).

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(1) Toutes les initiatives locales de la commémor’action 2025, voir ici

(2) L’OIM déplore 50 000 décès de migrants recensés à travers le monde, voir ici

(3) Cristina Del Biaggio et Sarah Bachellerie, projet de recherche DisFrontAlp

(4) Tous Migrants, L’accueil des personnes exilées dans le Briançonnais et dans les Hautes-Alpes, page 16, voir ici

(5) Philippe Hanus et al. 2024, "Donner la place aux personnes décédées à la frontière franco-italienne", architecture mémorielle et lutte des traces (2015-2024)", mémoires en jeu, n°21

P.-S.

Alarmphone

Tous migrants
Contacts presse
Isabelle Lorre (coordinatrice du programme Migration Frontière Transalpine · Médecins du Monde) // 06 99 23 97 10
Léo Martinet (chargé de coordination et de communication · Tous Migrants) // 07 77 28 79 36

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