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Le tramway nouveau arrive, la réalité derrière les apparences

Article mis en ligne le lundi 2 juillet 2007

Le tramway revient à Marseille après plusieurs dizaines d’années d’absence et Jean-Claude Gaudin, Maire de la ville, en compagnie de son premier adjoint Renaud Muselier, offre aux Marseillais trois jours d’animation et de tram gratuit pour fêter ça.

De plus, pour marquer l’événement, le Président de la République se déplace en personne mardi 3 juillet pour l’inauguration officielle. Il est vrai que le nouveau Président s’occupe personnellement de tout ce qui se passe dans le pays !

Certes, dans notre ville polluée et saturée par la circulation automobile, un nouveau moyen de transport en commun propre peut être une bonne chose, mais la mise en service de cette ligne de tramway mérite-elle autant de faste ?

Attac Marseille vous invite à y regarder de plus près :

Un tramway qui arrive avec retard, réduit par rapport au projet initial et qui va coûter cher aux Marseillais.

Lorsque le projet de tramway fut lancé il y a quelques années par Renaud Muselier, avec une grande campagne de publicité, trois lignes étaient prévues dont deux devaient être mises en service en 2006, la troisième en 2008/2009. Il s’agissait déjà d’un programme limité au Centre-Ville, mais ce qui est réalisé l’est encore plus !

Nous sommes en juin 2007, le tramway reliera seulement la Joliette aux Caillols, c’est à dire que sur une bonne partie du trajet, il doublera le métro, il n’apportera vraiment une amélioration que pour les riverains immédiats du parcours.

C’est seulement à partir de fin 2007/2008 que la seconde ligne sera opérationnelle par la mise en service du tronçon Noailles-La Blancarde, (qui était desservi par le tram 68 prématurément arrêté) en passant par la phase intermédiaire d’un bus navette entre Eugène Pierre et Noailles car le tunnel de Noailles ne sera pas prêt à temps.

Quant à la troisième ligne, celle qui doit partir de la place du 4 septembre et qui apportera une amélioration réelle pour les quartiers concernés, elle est au mieux reportée au-delà de 2010 et ne sera peut-être jamais réalisée.

Dans ces conditions et à ce rythme, les habitants des quartiers Nord, de Saint-Antoine ou de L’Estaque ne doivent pas espérer une arrivée du tramway dans leurs quartiers avant 2015/2020 et ceux du Sud, à Mazargues ainsi que les étudiants de Luminy devront se contenter de leurs bus.
En fait, comme on peut le constater en regardant un plan de Marseille, le métro et le tramway concernent essentiellement le centre ville, c’est à dire une petite partie du territoire de Marseille.

Ce tramway, qui apporte peu d’amélioration et qui tient plus d’un effet de mode que de l’aboutissement d’une réflexion approfondie des besoins et des solutions pour les déplacements dans Marseille, va coûter cher aux Marseillais.

Estimé à plus de 460 millions d’euros au début des travaux, on peut, sans risque de se tromper, penser que la facture sera beaucoup plus lourde du fait des retards importants qu’a connu et connaît encore le chantier. Il faut dire que celui-ci a donné l’impression d’être mal organisé, mal entretenu, mal préparé, mal réalisé, défauts qui ont un surcoût supérieur à 30% lequel sera supporté par les contribuables. Sans compter l’épisode du tunnel de Noailles où la Mairie, faisant preuve de légèreté ou d’incompétence, s’est rendue compte tardivement qu’il fallait le reprendre et s’est trouvée ainsi à la merci des entreprises de travaux publics.

La charge financière pour les Marseillais sera d’autant plus lourde que les amis de Messieurs Gaudin et Muselier qui sont au Gouvernement, ont très faiblement subventionné l’opération. Ils auront néanmoins l’honneur de participer à l’inauguration.

Une exploitation du tramway qui contribue à la remise en cause de l’intérêt général.

Comme on le sait, car cela fut à l’origine de la grande grève des personnels de la RTM en 2005, l’exploitation du tramway à fait l’objet d’une Délégation de Service Public (DSP), confiée au groupement « RTM-Veolia ».

Veolia fait ainsi une très bonne affaire : Elle place seulement quelques cadres dans l’affaire et sans investir un seul euro, elle se garantit une part substantielle des bénéfices du tramway, la RTM conservant le reste et les déficits de l’exploitation des bus et du métro !
Veolia, multinationale exerçant dans les domaines de transports, de l’eau et des déchets accentue ainsi sa présence dans les missions de service public de Marseille et de la Communauté Urbaine. Rappelons qu’elle est un des actionnaires principaux et dirigeant de fait de la Société des Eaux de Marseille et de ses filiales comme la Seram pour l’assainissement Bronzo pour les déchets et bien d’autres sociétés.

Elle est avec le fonds d’investissement Butler, le principal actionnaire de la SNCM privatisée dont elle assure la direction de fait et a obtenu récemment l’exploitation des navettes du Frioul.

Veolia est encore présente à Marseille dans la SAFIM qui gère le Parc Chanot et assure l’organisation des manifestations comme la Foire de Marseille.

Progressivement la Municipalité de Jean Claude Gaudin se détourne de l’intérêt général en transférant aux grandes sociétés privées les missions de service public au risque de se rendre dépendant de certaines d’entre elles.

Un tramway pour la requalification du Centre-Ville.

On le sait, Jean Claude Gaudin veut “requalifier” le centre-ville de Marseille, c’est à dire qu’il veut en faire partir la population modeste et pauvre. Un de ses adjoints l’avait déclaré ouvertement il y a quelques années.
Regardés sous cet aspect, les choix effectués pour le nouveau tramway se comprennent mieux, car si les trajets retenus apportent peu ou pas d’amélioration pour les habitants des arrondissements périphériques, ils sont bénéfiques pour les quartiers où les sociétés commerciales et financières investissent.

Le tramway part d’Euroméditerranée, au pied des bureaux de la société CMA-CGM, troisième transporteur maritime mondial, qui va encore se développer avec la construction d’une tour.

La présence du tramway va incontestablement valoriser son investissement. Il est vrai que Monsieur Saadé, patron de CMA-CGM est bien introduit auprès des gouvernements de droite puisqu’il avait pu acquérir à des conditions très avantageuses la CGM grâce à Jacques Chirac et que le nouveau Président reprend ses idées sur la privatisation du port Autonome de Marseille.

Un peu plus loin, le tramway passe Rue de la République où un fonds d’investissement privé rénove les appartements ; cela va conduire à une modification de la composition sociale du quartier et à l’augmentation de la valeur des appartements.

Sur la suite du trajet, c’est Belsunce et La Canebière où la volonté de transformation a été annoncée ; mais au profit de qui ? des Marseillais ou des sociétés immobilières ?

En conclusion, on peut dire que le nouveau tramway de Marseille correspond plus à une opération politique et économique de la Municipalité, qu’à une amélioration réelle des conditions de transport des Marseillais au terme de 12 ans de mandature.

Il répond peu aux besoins de transports collectifs d’une agglomération comme la nôtre au bord de l’asphyxie, et à la nécessaire diminution de la pollution causée par la circulation automobile. Son efficacité sera d’autant plus limitée que les parkings qui devaient accompagner le projet ne sont pas encore construits !

N’en déplaise à Renaud Muselier, il est de ce fait critiquable sous bien des aspects.

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