Une tribune pour les luttes

Avenir d’ATTAC

Résistance ou désobéissance ?

par Dominique Mourlane

Article mis en ligne le jeudi 13 septembre 2007

Le droit de résistance est inscrit dans la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen : « le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression. » L’emploi du mot résistance tire sa légitimité de notre histoire et son sens me semble dénué de toute ambiguïté.

Depuis quelques années cependant s’est instauré au sein de la gauche en France un débat sur la question d’avoir recours aux termes de désobéissance civile ou civique de tradition anglo-saxonne au détriment de celui de résistance. Ce glissement sémantique pourrait montrer une volonté de faire disparaître la notion de résistance de la terminologie contestataire.

Ce constat me pose questionnement et mon postulat va être de démontrer que la sauvegarde du mot résistance s’inscrit dans un combat qu’il convient de mener contre des courants révisionnistes qui tendraient à remettre en question, par ce biais terminologique, l’un des fondamentaux de notre identité

Je rappellerai en préambule l’analyse d’Hannah Arendt sur la question : « la désobéissance civile, tout en étant aujourd’hui un phénomène mondial, demeure, par sa nature et ses origines, spécifiquement américaine… Les arguments invoqués pour défendre la conscience individuelle ou des actes individuels, c’est-à-dire des impératifs moraux et des appels à un « droit supérieur », qu’il soit transcendant ou profane, sont inadéquats lorsqu’on entend les appliquer à des cas de désobéissance civile sur le terrain de la conscience individuelle. » (Du mensonge à la violence).

Entre résistance et désobéissance, une ligne de démarcation ténue

La résistance naît de l’instauration d’un pouvoir auquel s’oppose naturellement un contre pouvoir générateur d’actes de résistances. Il s’agit de résister à une agression, une contrainte, une oppression. Il n’y a pas de théorisation de la résistance. Elle est.

La désobéissance civile ou civique, qui se traduit par le refus de respecter la loi au nom de sa conscience, remonte à l’Antiquité, mais est théorisée au 19ème siècle par Henri D. Thoreau dont les textes inspireront Gandhi et M. Luther King.

Cette question ne peut être déconnectée du concept de démocratie. Il ne me paraît pas concevable que la résistance ou la désobéissance mettent en cause les fondements de la démocratie. Dans la mesure où la démocratie existe.

La différence de signification entre résistance et désobéissance me semble ténue et ne peut que me laisser perplexe sur la volonté qu’ont certains groupes de vouloir imposer un terme au détriment d’un autre.

L’argument le plus couramment retenu est de formuler que la résistance peut être génératrice d’actions violentes alors que la désobéissance s’inscrit de facto dans une démarche non-violente. Les faits sont plus nuancés et le choix du postulat initial, résistance ou désobéissance, ne présume en rien du passage ou non à l’acte violent.

Les actes de résistance et de désobéissance se déclinent sous de multiples formes, les exemples qui suivent en illustrent les différentes gradations :

1.- Actes manifestes de désobéissance :

- 1971 le manifeste des 343 salopes (lutte pour le droit à l’IVG - interruption volontaire de grossesse)

(http://www.sexualite-feminine.com/index.php?le-manifeste-des-343)

est par principe assimilé à de la désobéissance civique, bien qu’aucun de leurs textes ne s’y réfèrent. Malgré cela, le fait de se présenter de manière ouverte en transgressant la loi, avec un objectif affiché de vouloir faire évoluer la loi est assimilable sans contestation à de la désobéissance.

- à partir de 1990 le DAL (Droit au logement) et l’occupation de logements vides

(http://www.globenet.org/dal/index.php3?page=SOMMCQFS)

Bien que leurs textes ne se référent pas explicitement à la désobéissance, leurs portes paroles, immuables, ne se cachent pas de cette mouvance.

- à partir de 2003 : les faucheurs volontaires.

(http://www.monde-solidaire.org/spip/rubrique.php3?id_rubrique=131)

Leur naissance au Larzac, dans le sillage d’une mouvance de la Confédération Paysanne et dans une grande confusion, suivi d’un fort élan de solidarité a nécessité une modification très rapide du statut du faucheur volontaire (FV). D’une forme collective de responsabilité prônée sur le Larzac, les animateurs des FV ont dû rapidement revenir à la responsabilité individuelle pour une action collective. La différence n’est pas mince et le fait qu’il y ait eu ce flottement au démarrage doit être relié à ce que les initiateurs historiques des FV considèrent Thoreau (cf. fiches annexe) comme étant le père fondateur du terme de désobéissance civile.

2.- Actes ne faisant pas explicitement référence à la désobéissance mais pouvant s’en reconnaître :

- 1993 : AC ! Agir ensemble contre le chômage

(http://www.ac.eu.org/spip.php?rubrique6)

Les tensions vécues au sein de cette association de lutte contre le chômage, même si elles ne se sont pas fait sentir autour de la notion de désobéissance, recouvraient les acteurs qui par ailleurs mettaient en avant ces principes.

- 2000 Casseurs de pub

(http://www.casseursdepub.org/index.php?menu=pourquoi)

L’association qui a pour objectif de promouvoir la création graphique et artistique basée sur la critique de la société de consommation. Se réfère sur leur site à la résistance.

- 1987 la Confédération Paysanne

(http://www.confederationpaysanne.fr/)

Syndicat patronal de paysan, en recherche de stratégie syndicale, fluctuant sur la question de la désobéissance en fonction des assemblées générales, des portes paroles mis en place et des options choisies.

- 1988 : Sud (Solidaire Unitaire Démocratique)

(http://www.place-publique.fr/article471.html)

Syndicat issu d’une scission de la CFDT au sein des télécommunications.

- 1999 Attac (Association pour la Taxation des Transactions pour l’Aide aux Citoyens)

Bien que ce
débat ait été largement entamé et tranché en 2004 dans Attac à travers un 6 page sur les OGM

(http://www.france.attac.org/IMG/pdf/OGM_2_.pdf)

et où la question de la désobéissance civile est abordée sous le principe d’une fonction d’alerte, il était déjà préconisé de recourir à d’autres méthodes afin d’engager le dialogue.

La fonction d’alerte du fauchage

En France, la dissémination d’OGM dans la nature se faisait dans l’opacité, en l’absence de toute consultation des citoyens, en l’absence également de tout débat scientifique digne de ce nom. Les multinationales et les Etats ont pour objectif d’imposer cette technologie totalitaire en catimini, grâce au non-dit, à l’omission volontaire et par la stratégie du fait accompli. Le citoyen est privé de son droit le plus élémentaire : participer aux décisions qui engagent son avenir, ainsi que celui des générations futures.

Que fallait-il faire devant cette agression caractérisée et les gigantesques moyens déployés ? La désobéissance civile s’est imposée. Avec succès : la dissémination a été ralentie, un moratoire établi. Plus de 700 chercheurs, dont 142 directeurs de recherche, signataires au 6 décembre 2003 de la pétition « Ouvrons la recherche », estiment que les fauchages ont eu une salutaire fonction d’alerte pour rompre le silence. Ils ont permis d’ouvrir des débats au sein de la communauté scientifique, de la filière agro-alimentaire et sur le devant de la scène médiatique.

Mais l’acte de fauchage n’a pas permis d’entrer en dialogue avec toute la population.

Si 71% d’entre nous n’en veulent pas dans leur assiette, il reste à expliquer qu’accepter toute dissémination d’OGM dans la nature, c’est accepter de ne plus avoir d’autre choix que d’en manger. C’est accepter de les voir s’installer définitivement partout dans notre environnement. C’est accepter l’appropriation du vivant par quelques multinationales. La phase actuelle consiste donc à :

- faire valoir la force de nos arguments et profiter des arrachages déjà réalisés pour accentuer le dialogue ;

- obtenir un vaste débat public contradictoire et équitable ; aujourd’hui les semenciers refusent la confrontation publique avec le citoyen ;

- attribuer des crédits publics pour que des recherches indépendantes et complètes puissent être menées par des équipes pluridisciplinaires ;
- user de tous les recours administratifs et juridiques ;

- ne pas laisser les élus adopter des décisions, législations et traités internationaux prescrits par les multinationales.

Un séminaire intitulé « Résistances civiques/désobéissances » a également eu lieu le 18 juin 2005 pour fournir des éléments de réflexion nécessaires à l’organisation d’un débat large au sein de l’association.

C’est peut être dans cette association que la forme développée de démocratie à été la plus grande pour démarrer un débat sur le sujet de la résistance/désobéissance. Cette amorce de débat a été interrompue en cours de route, le sujet étant trop conflictuel pour un nombre restreint de personnes.

3.- Actes menés par des organisations n’assumant pas clairement le concept :

- La Ligue des droits de l’homme (LDH)

- La Fédération syndicale unitaire (FSU)

- La Confédération générale du travail (CGT)

- Le Réseau école sans frontière (RESF)

- Etc.

4.- Actes en sous-mains menant la contestation :

Je terminerai avec LE lieu de convergence des luttes qui souhaite intégrer et animer la désobéissance civile et qui de fait ne regroupe que quelques acteurs précédemment cités, spécialistes de l’activisme social :

- Le Forum des Luttes Sociales (FLS). Le FLS, écrit une militante [AC !] d’Alençon, « est un état-major à la mexicaine (beaucoup de généraux, fort peu de troupes) censé représenter quelques organisations (SUD, Droits devant, DAL, Confédération paysanne, etc.) et lancer des mobilisations communes. Il n’a jamais rien lancé, mais il permet à quelques personnes de jouer aux chefs et de se donner l’illusion d’écrire l’Histoire. C’est aussi un des lieux du mouvement social d’où doit surgir une gauche de la gauche recomposée pour les élections de 2007. »

(http://www.ac.eu.org/spip.php?article1331)

En fait aujourd’hui le petit nombre d’organisations actives sur la question de la désobéissance civile souhaite se faire entendre et entraîner l’ensemble des organisations associatives, syndicales et humanitaires sur ce terrain instable. Je constate que ce sont les mêmes organisations qui se retrouvent au sein du FLS et auxquelles il faut ajouter les discrets CRID (Centre de recherche et d’information pour le développement)

(http://www.crid.asso.fr/spip.php?page=sommaire),

le CEDETIM (Centre d’études et d’initiatives de solidarités internationales)

(http://www.reseau-ipam.org/rubrique.php3?id_rubrique=47/)

et AITEC (Association internationale de techniciens, experte et chercheurs)

(http://aitec.reseau-ipam.org/).

Ces organisations sont très actives sur des éléments non négligeables mais néanmoins forts perturbateurs tels que « l’histoire coloniale », « la laïcité ouverte », « le libéralisme » en particulier. Elles se retrouvent entre autre à travers des mouvements tels « les indigènes de la république » et « une école pour toutes et tous ».

De ces quatre vecteurs : résistance, laïcité, histoire, libéralisme, nous devons tirer les enseignements qui nous permettront d’envisager l’avenir et de travailler sur le contenu d’une gauche de transformation sociale qui redonne aux populations leurs véritables identités. Il va de soi qu’il est absolument nécessaire d’être clairs sur ces quatre sujets.

Le fait que la gauche, toute la gauche, ait abandonné ses véritables objectifs, qu’elle se soit contrainte au libéralisme par la voie de la social-démocratie, nous donne l’ambition de rechercher les espoirs et les pistes qui permettront au peuple de gauche de repartir à la conquête du pouvoir sur des bases émancipatrices, antilibérales, altermondialistes, laïques, sociales, humanistes et écologiques.

Les grands acteurs de la désobéissance civile

Il est de bon ton dans le milieu de la désobéissance française de se référer à deux personnalités faisant autorité en la matière, Thoreau et Gandhi. D’autres acteurs importants du mouvement ne font malheureusement pas l’objet de la même reconnaissance, il s’agit de Toussaint Louverture, Robespierre, Martin Luther King, Nelson Mandela, et cette liste n’est sans doute pas exhaustive (voir annexe 1).

Les risques liés la désobéissance ou à la résistance en France

1.- La désobéissance

Tout d’abord en ce qui concerne la désobéissance, il convient de s’arrêter sur le rôle des lois. Les lois sont le fait du législateur qui remplit une fonction au service de la justice. Tant que cette fonction est acceptée, le respect et l’obéissance aux lois semblent justes. « Il y a deux sortes de lois : les lois justes et les injustes. Je suis le premier à préconiser l’obéissance aux lois justes. C’est une responsabilité morale aussi bien que légale. Or, cette même responsabilité morale nous commande inversement de désobéir aux lois injustes. (...) Quiconque enfreint une loi injuste doit le faire ouvertement, avec ferveur, et la volonté d’en accepter les conséquences. Je soutiens qu’un homme qui refuse d’obéir à une loi lui paraissant injuste en son âme et conscience et qui se soumet de plein gré à la peine de prison afin d’en démontrer l’injustice à ses concitoyens, exprime en agissant ainsi son très grand respect pour la loi », écrivait Martin Luther King dans « Révolution non violente ».

Là se pose effectivement la question de l’acceptation des lois et leurs limites dans ce que chacun reçoit d’une loi. Nous nous trouvons de fait dans une vision individualiste de la loi, ce qu’Hannah Arendt avait largement traduit en affirmant que …la désobéissance civile… demeure… spécifiquement américaine... Nous sommes de fait en France en particulier pour ce qui nous concerne aux limites de la démocratie. Désobéir aux lois c’est déjà accepter ces lois, c’est reconnaître leur rôle et leur domination.

Alors que le travail doit s’accomplir dans l’abolition du régime qui met en place et en œuvre les lois, les désobéissants ne s’en prennent qu’aux lois sans remettre foncièrement en cause le système pourvoyeur.

Il faut à cet endroit, même si ce n’est pas l’objet de mon propos, différencier la désobéissance civile de la désobéissance civique, la première étant individualiste dans un refus personnel des lois, la seconde répondant davantage à un ensemble de critères plus ou moins précis (Annexe 2). Certains acteurs ne différenciant la désobéissance civile de la désobéissance civique que par la notion de non violence au profit de la désobéissance civique.

Les faits prouvent que les actes de désobéissance civile ou civique débouchent malgré tout sur certaines formes de violence. L’incantation n’étant pas une arme de dissuasion suffisante.

2. - La résistance

La résistance, au même titre que la désobéissance, connaît différentes formes de graduations.

La vie est l’ensemble des fonctions qui résistent à la mort. C’est une forme de résistance innée. Dans ce cas la résistance est une préoccupation vitale, ni morale, ni immorale, elle consiste juste à être vivant, à survivre. En partant de ce point il faut introduire la conscience. L’atavisme qui nous prédispose à la résistance, nous donne déjà une propension à résister à d’autres formes d’agressions extérieures (Annexe 3).

Cela conduit certainement à un fonctionnement dichotomique où d’un côté les règles mises en place par le législateur ou l’occupant sont apparemment acceptées et d’un autre côté une forme d’organisation du refus des règles et de leur démontage sont mises en œuvre.

En poursuivant l’analogie avec le corps, la forme est acceptée car elle fait partie d’un tout intangible, tandis que le contenu est sujet à de profonds bouleversements et transformations afin de poursuivre sa vie. La forme sociale a un rôle non négligeable dans la volonté de poursuivre une vie sociétale acceptable. La part commune des décisions permet la poursuite d’un corps social organisé.

Il parait plus sain et plus naturel de mettre en place des résistances que de se plier à l’individualisme de la désobéissance.

Il y a par ailleurs un élément à considérer, c’est la manière prégnante dont le mot résistance est utilisé en France et en Europe, comme il renvoie à la période de la Résistance. Cet aspect physique dit beaucoup de la difficulté à utiliser ce vocable, alors que l’action parait fortement intégrée dans les esprits.

3.- Les risques liés à la désobéissance en France

Au regard de l’étendue et de l’acceptation de la notion de désobéissance en France et en Europe, et si nous y intégrons aussi ce qui a un certain moment était nommé l’objection de conscience, nous nous apercevons que cela ne concerne qu’un faible nombre de personnes et un faible nombre d’actions qui n’ont (qu’à de rares exceptions dont une notable en ce qui concerne le droit à l’avortement) en réalité jamais obtenu un statut relié a ce type de combat.

Il se trouve que presque chaque fois qu’une lutte s’est engagée en France avec comme support la désobéissance, il y a eu échec de cette lutte, car une révolte dans nos sociétés modernes a peu de chance d’emporter la foule inerte.

Les risques de la désobéissance civile sont, la plupart du temps, d’emmener à marginaliser une lutte, d’empêcher qu’elle s’élargisse et qu’elle se réalise. Les risques encourus dans ce type de lutte sont assez grands à titre individuel, mais peuvent être contraints si la lutte est bien organisée et les bonnes informations fournies. Comme la plupart du temps il s’agit de comportements individuels, même si au départ l’intention peut être autre, il se trouve toujours un nombre de personnes pour tenter la bonne fortune ou/et pour « se faire un nom en haut de l’affiche ». Ce genre de mouvement attire par ailleurs un ensemble de personnes qui sautent d’une révolte à une autre. Pour illustrer ce passage il peut paraître intéressant de s’arrêter un instant sur la question des OGM et des faucheurs volontaires.

La question des OGM et le combat des faucheurs volontaires

Le refus des OGM a émergé dans les années 1990 en France grâce à Greenpeace. Une multitude de groupes se sont ensuite emparés de cette problématique sous des angles totalement différents. Ces approches très diverses ont permis de trouver de la matière afin d’avoir une vision globale du domaine des PGM (car il n’est question que des plantes génétiquement modifiées). Le paroxysme de ce fonctionnement au sein de CCC-OGM (collectif français pour une conférence des citoyens sur les OGM) se situe d’une part lors du Forum social européen (FSE) de Saint-Denis en 2003, suivi de peu par un ouvrage collectif intitulé « Société civile contre OGM : arguments pour ouvrir un débat public ».

Il faut admettre que durant cette période une multitude de conférences, des actions aussi variées que ludiques, des fauchages ont eu lieu. Toutes ces actions ont trouvé leur place pour mener le même combat.

Le groupe du CCC-OGM tenait de lieu de discussion des différentes luttes pour se tenir informé les uns des autres et ceci afin d’être complémentaires. Puis lors du Larzac 2003, les faucheurs volontaires se sont créés, un peu dans la confusion en ce qui concerne les termes de la responsabilité. Cette création a eu pour effet dans les deux ans qui ont suivi de tuer la relation de confiance qui existait au sein de la CCC-OGM. Un sentiment d’hégémonie d’un mode de combat sur les autres s’est mis en place. Les FV cherchaient durant cette période à tout régenter. Le malheur de cette opération a été qu’elle contenait un but politique non affiché qui devait amener José Bové à la candidature aux présidentielles de 2007. Le bruit courait dans les différents réseaux et le Larzac 2003 laissait transpirer cette même impression.

L’ensemble des formations citées un peu plus haut, en fait celles qui se réclament de la désobéissance civile, ou de la laïcité ouverte, ou de la convergence des luttes à travers le forum des luttes sociales, se préparaient déjà à soutenir Bové à la présidentielle. Avec le résultat que nous connaissons (1,32 %). Les autres antilibéraux ne faisant guère mieux (Buffet 1,93 % et Besancenot 4,08 %). Ils ont de concert porté la gauche de la gauche à son plus bas score historique.

Aujourd’hui José Bové n’a de cesse d’appeler aux fauchages, comme un salut, comme une bouée, comme un dernier soupir.

Cette uniformisation de la lutte a tué la lutte… et pourtant « on » aurait bien pu se rappeler de la lutte contre le nucléaire, où à tout vouloir réunir et uniformiser, soit disant pour être plus fort, cela a donné plus de force à EDF, à la COGEMA et au lobby nucléaire. Des formes de luttes très différentes contre les OGM ont été proposées et refusées… car il fallait faire des fauchages et s’engager dans la désobéissance civile ou civique (suivant les périodes).

Les groupes qui exécutaient les fauchages en « clandestinité » se faisaient largement insulter, ils étaient considérés comme des pleutres. Toutes les actions devaient passer par les FV… et pendant ce temps les OGM sont passé de 500 ha en 2002 à 20 000 en 2007… Il n’est pas dit ici que c’est grâce aux FV, mais les FV et leur lutte basée sur la désobéissance n’ont pas permis d’endiguer cette expansion. Les fauchages se poursuivant, la répression va aller en s’amplifiant et le nombre d’hectares en augmentant. Contre la force publique dans une période où la résistance ne s’est pas organisée, le combat est perdu d’avance.

Les groupes en lutte contre les PGM en Allemagne n’ont pas eu recours aux fauchages, mais à l’alerte de l’opinion publique. Aujourd’hui un moratoire sur le MON 810 est en vigueur en Allemagne, comme dans d’autres pays d’Europe. Il y a encore une chance de remobiliser la population sur la question des OGM, en menant d’autres types de luttes. Car il faut admettre que les FV perdent de la sympathie auprès du public même si les OGM demeurent une inquiétude pour ce même public.

Les personnes qui passent en justice restent souvent en difficulté soit morale, soit financière, et cela fait tâche d’huile, cela se sait de plus en plus. Alors certains pourront toujours stigmatiser ceux qui baissent les bras, mais ce n’est pas ainsi que l’on motive des troupes. Il y a des choix de résistance à mettre en œuvre qui peuvent transformer le débat nécessaire à la mise à distance des PGM en France, d’autant plus que notre résistance sera utile à l’ensemble de la planète.

L’avenir de la résistance : entre mondialisation et libéralisme

En partant d’un aspect général il est facile de constater que tout mouvement global de rationalisation du quotidien entraîne automatiquement des formes de luttes diverses, suivant les lieux, les époques et les situations. Il n’y a pas antinomie entre les mouvements de résistance et les mouvements de désobéissance. Ce sont les conceptions historiques et locales qui fournissent le vocable.

Le parti pris affirmé en introduction est donc de parler de résistance, car à travers l’histoire et concernant les projets de société c’est le terme qui recouvre le mieux l’idée qu’en France, mais aussi en Europe, nous pouvons avoir de ce type de luttes, sachant que résister c’est parfois aussi désobéir. Il n’y a donc aucune volonté d’opposition des termes, juste une volonté de compréhension plus forte.

Toutefois, il est utile de réfléchir aux pratiques mises en place et à leur efficacité sur le terrain à plus ou moins long terme. Dans le court terme, c’est l’effet médiatique qui est recherché, même si souvent celui-ci a aussi son importance pour faire connaître un combat, il doit être relayé par une action en profondeur, une action de longue haleine et tenable. C’est à ce point que la résistance a sa place à tenir.

Rapidement en survolant l’histoire, des mouvements de résistances se sont créés en opposition à tous les schémas de construction de sociétés, soit par la force, soit sans violence. Ils ont été souvent apparentés à des mouvements de libération :

- La période Egyptienne avec les Juifs

- La période Romaine avec en particulier la Gaule, mais aussi d’autres peuples

- L’époque Napoléonienne avec des résistances en Europe

- La guerre froide et des résistances diverses et asymétriques : d’un côté le bloc soviétique et la constitution à l’intérieur de ce bloc de résistances à l’idéologie dominante, de l’autre le bloc occidental avec la montée très forte des partis communistes sur le rejet d’un modèle économique.

Nous avions l’opposition, la résistance à un bloc avec parti pris pour l’autre bloc. Abolition de l’esclavage, du racisme des ségrégations :

- La Révolution française par exemple avec Toussaint Louverture et Robespierre

- Martin Luther King aux Etats-Unis

- Nelson Mandela en Afrique du Sud

Entre autres…

Ces différentes résistances s’inscrivent dans une évolution sociétale, humaniste, irréversible à l’échelle de la planète, avec le rejet d’une société assurant la domination de l’homme par l’homme depuis des siècles. Cette étape de libération, issue de résistances diverses, a conduit le capitalisme, mais surtout l’homme, à imaginer d’autres formes d’esclavagismes. La domination économique s’est structurée, renforcée, organisée. La mise en œuvre de cette domination a ainsi vu se créer des forces de résistances à l’échelle mondiale.

A la suite de mouvements de résistances plus sectoriels, antérieurs, telle la lutte pour les droits humains, tel l’environnement, la paix, pour les droits syndicaux, l’altermondialisme a vu sa naissance dans l’opposition à un système global. Nous touchons là au cœur de la résistance actuelle, où face à une vision économique mondiale, dominante, écrasante, doit répondre une vision économique, multiple et respectueuse des différences. Bien sûr les formes de luttes de cette résistance sont diverses et complémentaires : les grèves, le boycott, la désobéissance, le lobbying, le vote….

Le vote aussi car la démocratie doit être en perpétuelle évolution, mais au final, qu’elle soit représentative ou/et participative, la démocratie est la prise en compte de l’aspiration de la majorité tout en tenant compte des minorités. Dans ce genre de processus, la résistance a une vertu salvatrice pour l’évolution de la démocratie.

Cette vision globale de notre société est nécessaire, dans la nécessaire résistance au schéma économique dominant : le capitalisme. Car au-delà du traité européen se profile la guerre des trois blocs, qui passera par différentes formes. Ces trois blocs étant l’Europe, l’Amérique, l’Asie. Il nous faudra des réponses globales à une compétition internationale qui fera fi des individus. Notre résistance passera par la conquête de nouveaux droits pour la libération des individus vers des projets communs de société, par l’émancipation.

Pour cela quatre grands axes complémentaires et indissociables doivent être envisagés :

- La globalisation des luttes : même si la sectorisation de certaines luttes paraît incontournable, elles doivent s’inscrire dans une vision globale de la société. C’est bien ce point précis que nous devons définir, lentement mais sûrement.

- Des relais internationaux : dans le champ mondial du « développement économique », il est nécessaire que les différentes formes de résistances puissent se relayer entre elles. Les forums sociaux jouent ce rôle en partie.

- Des liens forts sur le terrain : cette vision mondiale ne doit pas négliger le maillage local. Une vision globale de résistance ne servira à rien si les liens avec le local sont coupés.

- Le respect des différentes identités et formes de résistances : nous vivons dans un monde pluriel, il parait nécessaire que nos mouvements acceptent la pluralité des formes de résistances quelque soit le nom qu’elles portent. Ce sont les valeurs humaines de respect et d’égalité qui doivent rapprocher les identités multiples qui composent notre monde, car au-delà des lois locales iniques, la résistance se réfère toujours à des valeurs morales supérieures universelles.

On le voit des formes de luttes diverses et variées ont existé et existent toujours : en France et à travers le monde on parle souvent de résistance, aux Etats-Unis et en Inde de désobéissance, et d’autres formes de résistances, de désobéissances existent un peu partout. Vouloir les opposer, vouloir faire dominer l’un sur l’autre c’est vouloir « éradiquer » l’autre. Ce combat fratricide semble ouvert pour d’autres objectifs. Le contenu sémantique est toujours avant coureur d’un autre combat mortel : car derrière la mort ou la récupération d’un mot se profile la chute d’un combat. Sachons tenir compte que la résistance est aussi un moyen d’accéder au pouvoir, dans la mesure où elle s’y oppose.

La différence entre résistance et désobéissance ne tient pas dans le contenu ou dans l’action, mais dans la volonté qu’il y a de remettre en cause le système d’une manière « durable ». C’est toute la différence entre le révolté et le révolutionnaire. La volonté révolutionnaire a un contenu émancipateur. La résistance se retrouve dans cet objectif émancipateur. Elle est un défi à relever.

Dominique Mourlane

ANNEXES

Annexe 1 : les acteurs historiques

- Toussaint Louverture

François-Dominique Toussaint Louverture, né en 1743, affranchi en 1776, mort en captivité en 1803 au Fort de Joux, à La Cluse-et-Mijoux (Doubs). Il est le plus grand dirigeant de la Révolution haïtienne, devenu par la suite gouverneur de Saint-Domingue (le nom d’Haïti à l’époque), il fut tour à tour général de l’Espagne puis de la France, résistant aux Français, aux Espagnols, aux Anglais puis encore aux Français. Partout où il passait il confirmait l’émancipation des esclaves.

- Robespierre

Maximilien Marie Isidore de Robespierre, né en 1758 à Arras mort guillotiné le 28 juillet 1794 à Paris place de la Concorde. C’était un avocat et un homme politique. Principale figure des Montagnards sous la Convention, il incarna la tendance démocratique de la Révolution française. Il demeure également l’un des personnages les plus controversés de cette période, surnommé l’Incorruptible par ses partisans, la chandelle d’Arras par Rivarol, l’un de ses adversaires, et qualifié de tyran ou de dictateur sanguinaire par ses ennemis pendant la Terreur et après Thermidor.

Il est encore de nos jours présenté dans les manuels scolaires d’une manière négative bien qu’il ait été une figure emblématique de la Révolution française. La bourgeoisie dans son ensemble a besoin de faire valoir Danton au détriment de Robespierre, alors que ces deux personnages et d’autres, se sont nourris les uns des autres durant les 5 années qui vont de 1789 à 1794 et où Robespierre à fait valoir son âme profondément démocratique, roturière et anti-aristocratique. Robespierre ne reconnut aucun pouvoir ne détenant pas son mandat de la nation.

Cf. son discours sur la liberté de la presse dans lequel il conseille de désobéir aux lois lorsque la presse est muselée. (http://www.archipelrouge.fr/spip.php?article75)

- Thoreau

Henri David Thoreau né le 12 juillet 1817 à Concord (USA), mort le 6 mai 1862 à Concord. Essayiste, philosophe transcendantaliste, mémorialiste et poète. Considéré par certains comme le premier environnementaliste. Son essai majeur Désobéissance civile a été publié en 1849.

A travers cet essai Thoreau (http://www.forget-me.net/Thoreau/) défend les comportements individualistes et pose les fondements du libéralisme : « de grand cœur, j’accepte la devise : « Le gouvernement le meilleur est celui qui gouverne le moins » et j’aimerais la voir suivie de manière plus rapide et plus systématique. Poussée à fond, elle se ramène à ceci auquel je crois également : « que le gouvernement le meilleur est celui qui ne gouverne pas du tout » et lorsque les hommes y seront préparés, ce sera le genre de gouvernement qu’ils auront. » La non-intervention de l’Etat, la main invisible du marché est ici affirmée bien des années en amont.

- Gandhi

Mohandas Karamchand Gandhi, nommé aussi Mahatma Gandhi, est né le 2 octobre 1869 à Delhi (Inde), et mort le 30 janvier 1948 à New Delhi. Avocat il est un théoricien de la désobéissance civile basé sur la non violence.

- Gandhi n’utilisait l’agitation non violente que contre des gens avec qui il partageait certains principes moraux, c’est-à-dire les hindous et les Britanniques libéraux. Envers les musulmans, il ne procédait pas par action non violente mais par concessions et démissions, sans jamais négocier une contrepartie équitable. Il trompait ainsi les attentes de ses électeurs hindous et ne parvenait d’ailleurs qu’à rendre les musulmans plus arrogants. Incapable de tirer la leçon des effets en retour de la réalité politique, il persévéra dans ces concessions alors qu’elles ne causaient visiblement pas un rapprochement entre hindous et musulmans.

- Des facteurs, internes et externes, autres que l’action non-violente de Gandhi ont contribué à la libération de l’Inde. Parmi les facteurs externes, il faut mentionner les pressions anticoloniales exercées par les États-Unis et l’Union Soviétique sur la Grande-Bretagne.

- voir : Imago Mundi : http://www.cosmovisions.com/ChronoInde.htm)

Le concept de non violence (ahimsa) et résistance non violente a une longue histoire dans la pensée religieuse indienne et a eu de nombreuses occurrences dans des contextes hindouistes, bouddhistes, jaïnistes et judéo-chrétiens. Gandhi explique cette philosophie et ce mode de vie dans son autobiographie « Quelle différence cela fait-il aux morts, aux orphelins et aux sans-abris, que la destruction aveugle ait été amenée au nom du totalitarisme ou au nom sacré de la liberté et de la démocratie ? »

« Il y a beaucoup de causes pour lesquelles je suis prêt à mourir mais aucune cause pour laquelle je suis prêt à tuer. » Lettre de Gandhi à Hitler, dans laquelle il le conjure de ne pas déclencher la guerre et d’atteindre ses objectifs par la non-violence, 23 juillet 1939.

En appliquant ces principes, Gandhi n’hésita pas à les emmener aux extrêmes de sa logique. En 1940, quand l’invasion des îles britanniques par l’Allemagne nazie semblait imminente, Gandhi donna l’avis suivant au peuple anglais « J’aimerais que vous déposiez les armes que vous possédez comme étant inutiles pour vous sauver, vous ou l’humanité. Vous inviterez Herr Hitler et Signor Mussolini à prendre ce qu’ils veulent des pays que vous appelez vos possessions... Si ces gentlemen choisissent d’occuper vos foyers, vous les leur laisserez. S’ils ne vous laissent pas partir, vous vous laisserez massacrer, hommes, femmes et enfants, mais vous refuserez de leur prêter allégeance. »

Néanmoins, Gandhi se rendait compte que ce niveau de non violence requérait une foi et un courage incroyable que peu de monde possédait. Il conseillait donc qu’il n’était pas nécessaire que tous restent non-violents, surtout si la non violence était utilisée pour cacher la lâcheté : « Je crois que s’il y a seulement le choix entre la violence et la lâcheté, je conseille la violence. »

- Martin Luther King

Le révérend Martin Luther King Jr, né à Atlanta (USA) en 1929 est mort assassiné le 4 avril 1968 à Memphis. Il était pasteur baptiste et militant non violent afro-américain pour les droits civiques, un activiste politique. Il est considéré comme l’un des plus grands orateurs américains. Il est surtout connu pour son discours « I have a dream » (J’ai un rêve), prononcé le 28 août 1963 devant le Lincoln Memorial à Washington durant la marche pour l’emploi et la liberté. En 1964 il devient le plus jeune lauréat du prix Nobel de la paix pour sa lutte non-violente contre la ségrégation et pour la paix. Martin Luther King invoquait souvent à la responsabilité personnelle pour développer la paix mondiale.

Martin Luther King est une des personnalités les plus admirée de l’histoire américaine. Comme il avait été inspiré par Gandhi, de nombreuses personnalités sur la scène internationale dont Colin Powell, José Bové et Jesse Jackson l’ont pris comme exemple pour sa lutte en faveur des droits de l’homme et sa méthode désobéissance civile au travers de la non-violence pour y parvenir. Il a influencé les mouvements des droits de l’homme en Afrique du Sud et a été cité comme inspiration par un autre prix Nobel de la paix qui a combattu pour l’égalité dans ce pays, Albert Luthuli.

Citations :

« Vous ne pouvez pas parler d’une résolution du problème économique des nègres sans parler de milliards de dollars. Vous ne pouvez pas parler de la fin des bidonvilles sans dire d’abord que les profits ne doivent plus être faits sur les bidonvilles. Vous falsifiez vraiment parce que vous avez affaire à des gens maintenant. Vous avez affaire à des capitaines d’industrie (...) Maintenant ça signifie que vous vous déplacez dans une mer agitée, parce que ça signifie qu’il y a quelque chose qui ne va pas avec... Le capitalisme... Il doit y avoir une meilleure distribution des richesses et peut être que l’Amérique doit se diriger vers un socialisme démocratique »

« Faites nous ce que vous voudrez, nous continuerons à vous aimer. »

« Je fais le rêve que mes quatre jeunes enfants habiteront un jour une nation où ils ne seront pas jugés sur la couleur de leur peau, mais sur la teneur de leur personnalité. Je fais un rêve aujourd’hui ! »

« Nous devons être capables de nous dresser contre nos adversaires les plus acharnés et de leur dire : nous répondrons à votre capacité d’infliger des souffrances par notre capacité de supporter la souffrance. A votre force matérielle nous opposerons la force de notre âme... »

« La violence est aussi inefficace qu’immorale. Elle est inefficace parce qu’elle engendre un cycle infernal conduisant à l’anéantissement général. »

- Nelson Mandela

Nelson Rolihlahla Mandela, est né le 18 juillet 1918 à Mvezo (Afrique du Sud) dans l’ancien Bantoustan du Transkei. Il fut président de l’Afrique du Sud de 1994 à 1999, premier président noir en Afrique du Sud démocratique et fut l’un des dirigeants de la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud. Il est avocat.

En 1952 Nelson Mandela devient l’un des 4 vice-présidents de l’ANC, il est chargé en particulier de préparer un plan permettant de travailler secrètement. Les dirigeants de l’ANC se préparent déjà à leur interdiction et donc à un travail clandestin, mais pas encore à la lutte armée. Pendant ce temps la township de Sophiatown est rayé de la carte en 3 ans, pour se recréer ailleurs à Soweto (South West Townships)

Pour Nelson Mandela c’est la preuve que la résistance pacifique a montré ses limites, mais aussi il a prouvé son sens de l’anticipation, car dés 1953 il a affirmé : « le temps de la résistance passive est terminée, la non violence est une stratégie vaine, elle ne renversera jamais une minorité ». Après de multiples péripéties judiciaires ou autres il finira en prison en 1963 jusqu’en 1982 puis en « régime de faveur » de 1982 à 1990 qui serviront de négociations pour abolir l’apartheid et accéder au pouvoir.

Citations :

« Notre politique était fondée sur la non-violence, mais l’attitude du gouvernement s’est durcie, il a promulgué une législation draconienne et envoyé l’armée dans les townships. Il est devenu évident qu’avec un tel gouvernement refusant toutes les discussions, nous n’avions aucunes autres alternatives que de recourir à la lutte armée. Nous agissions avec le sabotage de structures importantes, de pilonnes électriques mais toujours avec la précaution de ne pas créer de victimes. Cette forme d’action était dictée par les actes de l’oppresseur lui-même. L’histoire nous a montrée que si l’oppresseur utilise la négociation, la discussion, la persuasion, alors l’opprimé n’a jamais recourt à la violence. Dans l’histoire, ce n’est que lorsque les gouvernements ont refusés de négocier et ont eu recourt à la force que les peuples opprimés de la plupart des pays du monde ont pris les armes. C’est ainsi que nous avons agit. »

« Pour faire la paix avec un ennemi, on doit travailler avec cet ennemi, et cet ennemi devient votre associé. »

« Je ne suis pas vraiment libre si je prive quelqu’un d’autre de sa liberté. L’opprimé et l’oppresseur sont tous deux dépossédés de leur humanité. » « Aucun de nous, en agissant seul, ne peut atteindre le succès. »

« Nous ne sommes pas encore libres, nous avons seulement atteint la liberté d’être libres. »

« Un homme qui prive un autre homme de sa liberté est prisonnier de la haine, des préjugés et de l’étroitesse d’esprit. »

« Etre libre, ce n’est pas seulement se débarrasser de ses chaînes ; c’est vivre d’une façon qui respecte et renforce la liberté des autres. »

« En faisant scintiller notre lumière, nous offrons aux autres la possibilité d’en faire autant. »

Annexe 2 : Les critères de la désobéissance civile

Suivant différentes sources et acteurs on peut finalement fournir les critères suivants :

1 C’est un acte personnel et responsable

2 C’est un acte désintéressé

3 C’est une action juridique

4 C’est une action de résistance collective

5 C’est une action organisée

6 C’est une action ciblée

7 C’est une action publique

8 C’est une action non-violente

9 C’est une action risquée

10 C’est une action ultime

Interview "acte du colloque de ICAD sur la désobéissance"

La désobéissance est-elle innée ?

Jean-Charles Nayebi : Non dans le sens biologique du terme.

L’enfant naît avec le potentiel de développer son psychisme mais en attendant de pouvoir interpréter le monde par lui-même il se sert de l’espace psychique maternel. Ce premier temps d’attente se transforme en l’établissement de l’ordre de la pensée maternelle. Dans un second temps, l’enfant, avancé dans sa maturation psycho-affective désobéit à l’ordre maternel pour aller s’aventurer lui-même le monde et là, on assiste à une désobéissance créatrice d’une intelligence individualisée..

En quoi est-elle nécessaire ?

Jean-Charles Nayebi : Elle est d’abord nécessaire pour pouvoir penser et pour s’individualiser. Sur le plan social elle est nécessaire comme un contre-pouvoir à l’image des révolutions ou des principales religions monothéistes : Moïse, Jésus et Mahomet étaient des contestataires ; ils désobéirent à l’ordre établi pour créer une organisation nouvelle de la société qui perdure jusqu’à notre époque. Mais les sociétés primitives, n’en déplaise aux pseudo-éthnologues culturalistes blasés de la société moderne, la désobéissance est sévèrement punie ; l’ordre établi est identique à celui des ancêtres ; ainsi vous voyez que la désobéissance est absolument nécessaire pour progresser dans la mesure où les sociétés les plus évoluées connaissent plus de mouvements de désobéissance intellectuelle et sociale.

Quelles en sont les limites ?

Jean-Charles Nayebi : Il est très difficile de définir des limites bien précises de la désobéissance car il est difficile de définir les limites du progrès humain. C’est quelque chose qui est constamment en mouvement. Plus l’homme pousse ses limites plus il lui faut pousser les limites de sa pensée donc de sa capacité à désobéir ; mais nous pouvons donner des limites partielles à la désobéissance comme celles de l’éthique. Toute désobéissance mettant en péril la liberté franchit les limites de l’acceptable. Les limites de la désobéissance sont atteintes où le risque introduit par cette désobéissance n’est plus individuel.

Quels en sont les dangers ?

Jean-Charles Nayebi : La désobéissance est d’essence bi-potentiel. Elle n’est, en soi, ni positive ni négative. Elle le devient une fois agi ; à l’épreuve du réel si les conséquences sont positives nous l’interpréterons comme une initiative originale mais si elles sont négatives nous l’interpréterons comme un manquement au devoir et comme une non observance de la hiérarchie en place. Ainsi, une désobéissance est interprétée comme dangereuse si l’autorité et la cohérence du groupe où sévit le désobéissant a souffert dans son intégrité ou dans sa sécurité.

Sources : psychologie.fr®

Annexe 3-Le manifeste des désobéissants

Bonjour à tous,

Nous sommes un certain nombre à penser que la situation inquiétante de notre planète nous impose de retrouver le chemin de formes d’action et de lutte plus efficaces et plus radicales. Nous croyons que la réalité des rapports de force que nous subissons en matière de nucléaire civil et militaire, de protection de l’environnement contre les pratiques de certaines multinationales, de mondialisation de l’injustice sociale, etc. exigent de renouer avec une culture de la désobéissance civile/civique, de l’action directe non violente, du refus radical et ludique.

Conscients des limites liées aux modes traditionnels de mobilisation (pétitions, manifestations...), qui ne nous valent que de trop rares victoires, et n’attirent plus guère les nouvelles générations de militants, nous avons décidé de former un réseau informel de militants de l’action directe non violente. Parce que nous voulons nous battre pour la défense de la vie et de la justice sociale, nous avons décidé de nous organiser en un groupe de volontaires et d’activistes prêts à agir de manière directe et non violente aussi souvent que nécessaire/possible.

Nous sommes des faucheurs d’OGM, des démonteurs de panneaux publicitaires, des clowns activistes, des dégonfleurs de 4x4 de ville, des inspecteurs citoyens de sites nucléaires, des intermittents du spectacle, des activistes écologistes, des hébergeurs de sans papiers, etc. Nous pensons que nos luttes et nos méthodes relèvent d’une dynamique alter mondialiste plus indispensable que jamais, et que c’est ensemble, et dans l’action directe non violente, que nous rendrons possible la transformation radicale de notre société, et de ce fait notre survie à tous dans un monde redevenu vivable.

Dans un premier temps, nous avons décidé de nous former à l’action directe non violente, et aussi de faire émerger parmi nous des formateurs d’activistes, afin de démultiplier les formations et d’élargir ainsi nos rangs, tout en diffusant la culture de l’action directe non violente. Des stages se tiennent régulièrement, auxquels vous pouvez participer en vous inscrivant auprès de nous. Vous pouvez y participer quelle que soit votre expérience du militantisme ou de l’action directe non violente. Ces stages sont aussi l’occasion de discuter la préparation d’actions concrètes.

En espérant vous compter nombreux parmi nous,

Xavier Renou

http://www.desobeir.net/

Pour le collectif initiateur du Manifeste des Désobéissants

Annexe 4 - De la résistance populaire à la désobéissance civique

(le Monde Diplomatique d’avril 2006)

Jusqu’où obéir à la loi ?

La justice a ordonné, en février 2006, des saisies chez plusieurs « faucheurs » de plantes transgéniques condamnés à verser 250 000 euros de dommages et intérêts aux sociétés Pioneer et Biogemma. La désobéissance civile, qui n’est donc pas sans risque, est aussi revendiquée par des groupes réactionnaires, comme les opposants à l’avortement. Sur quels critères objectifs peut-on alors légitimer une violation de la loi ?

Par Nuri Albala et Evelyne Sire-Marin

Les faucheurs de plants de maïs transgéniques aux associations qui, comme Droit au logement (DAL), réquisitionnent de leur propre autorité des appartements vacants, la désobéissance à la loi devient une forme fréquente d’action politique et sociale. Pour la justifier, on invoque d’impérieuses raisons, comme le principe de précaution – les effets des plantes transgéniques sur la santé sont mal connus – ou l’indignité sociale qui frappe les personnes dépourvues d’habitations décentes. Ces justifications, évidemment nobles, pourraient assez aisément emporter l’adhésion. Cependant, que répondre à ceux qui leur opposent d’autres principes fondamentaux, comme la liberté de la recherche scientifique ou le droit de propriété (reconnu par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen) ?

Dans une démocratie, la loi doit, par principe, être respectée : elle assure la paix sociale et elle demeure l’expression de la volonté populaire, même si l’affaiblissement du rôle des Parlements en Europe amoindrit de facto sa légitimité. Au nom de quel principe général – donc opposable à tous et en toute circonstance – peut-on alors accepter sa remise en cause ? Au sein même du mouvement social, la légitimité d’une telle attitude fait débat, tout comme la question du recours à la violence(1). Parmi les partisans du changement, les légalistes s’opposent aux radicaux(2).

Deux expressions sont couramment invoquées pour justifier les violations de la loi : la désobéissance civique et la désobéissance civile. Souvent confondues, elles recouvrent des réalités très différentes. La première a pour objectif de contester un ordre juridique injuste et d’obtenir la reconnaissance de droits nouveaux : droit au logement, principe de précaution, droit à un environnement sain... Elle constitue donc une expression de la citoyenneté. C’est Gandhi entraînant l’Inde vers son indépendance, la résistance à l’occupation nazie, la lutte des Noirs pour l’égalité des droits aux Etats-Unis, les occupations de logements vacants pour héberger des sans-logis, les fauchages d’organismes génétiquement modifiés (OGM) cultivés en pleins champs. Le fondement de la désobéissance civile est tout autre : le philosophe américain Henry David Thoreau, qui l’a inventée, la définit comme le droit de s’élever, au nom de la seule conscience individuelle, contre les lois de la cité (3). Cette désobéissance de l’individu aux injonctions de l’Etat reste l’étendard des défenseurs d’un droit dit naturel par opposition à la loi démocratique, et érige le for intérieur en censeur de l’ordre social, avec toutes les ambiguïtés qu’une telle attitude peut receler. C’est Antigone affrontant Créon pour enterrer son frère selon les lois divines. Mais ce sont aussi les colons israéliens refusant la restitution des territoires occupés, les militants antiavortement s’enchaînant devant les hôpitaux. Thoreau appelait, lui, à refuser de payer l’impôt en raison de son désaccord avec la politique menée par les Etats-Unis en 1849. Il invoquait le fondement même du libéralisme : le gouvernement le meilleur est celui qui gouverne le moins. Subjective et variable, la conscience que chacun a du bien et du mal peut donc servir à justifier des actions très différentes, voire politiquement et moralement opposées.

Quels critères peuvent alors fonder une désobéissance légitime ? Le droit international et les droits nationaux, de même que la jurisprudence, autorisent déjà, dans certaines circonstances, la résistance à l’autorité. Cette transgression est justifiée au nom même des droits fondamentaux reconnus par la Déclaration universelle des droits de l’homme, la Convention européenne des droits de l’homme, ou les préambules de nombreuses Constitutions ; ces textes ont une valeur juridique et morale supérieure aux lois ordinaires.

« Baïonnettes intelligentes »

Ainsi un soldat est-il tenu de désobéir à un ordre « manifestement illégal », c’est-à-dire un commandement de l’autorité légitime qui contrevient aux droits humains fondamentaux (achever un blessé, torturer...). Cette obligation, formulée notamment par le tribunal de Nuremberg en 1945, a permis de condamner des subordonnés qui, sur ordre, ont participé à des crimes contre l’humanité. Il s’agit de ce que les juristes appellent la théorie des « baïonnettes intelligentes ». Pour les crimes de guerre, cette règle est désormais insérée dans la plupart des conventions internationales (4). L’histoire de la résistance à Vichy, celle des insoumis lors de la guerre d’Algérie montrent que la question de la rébellion contre la légalité au nom de la légitimité n’est pas une casuistique juridique.

Cependant, les principes fondamentaux sont évolutifs, et de nombreux droits ne sont apparus que récemment : par exemple, le droit à l’avortement, légalisé presque partout en Occident dans les années 1970, ou le principe de précaution, inscrit depuis le 1er mars 2005 dans la Constitution française. En outre, deux droits existants peuvent se contredire : le droit de propriété et le droit au logement, notamment. Les militants de la désobéissance civique s’exposent donc soit à être condamnés pour avoir eu raison trop tôt, soit à l’être pour avoir eu tort si les droits qu’ils revendiquent ne sont jamais reconnus...

Le juge joue ici un rôle important : il a pour fonction de déterminer concrètement la hiérarchie des règles qui doivent être suivies. Le magistrat, comme tout citoyen (il ne faudrait jamais oublier qu’il en est un), doit faire preuve d’un grand discernement lorsqu’il décide qu’une loi particulière doit céder devant un principe supérieur (5) ; sa position n’est guère confortable et peut exiger du courage : quelques juges seulement ont refusé de servir le régime de Vichy.

Saisi d’un acte de désobéissance, le juge dispose d’une palette d’instruments de mesure élaborée au cours des siècles. Inscrits dans le code pénal, ils lui permettent de relaxer un contrevenant. Sans invoquer la « résistance à l’oppression », inscrite à l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la désobéissance à la loi est une hypothèse reconnue par le droit, qui en délimite strictement les contours au nom de l’intérêt général. Il s’agit de la légitime défense (utiliser contre son agresseur une violence proportionnée à l’attaque), de la « contrainte morale irrésistible (6) », et de l’« état de nécessité », qui légitime la violation de la loi lorsqu’un intérêt supérieur exige le sacrifice d’un droit moins fondamental en commettant une infraction...

Un certain nombre de décisions de justice sont ainsi devenues célèbres : en 1898, le juge Paul Magnaud (dit « le bon juge ») a exonéré de sa responsabilité une femme qui avait volé du pain pour nourrir son enfant. L’état de nécessité a aussi été reconnu par le tribunal de Bobigny, en 1972, en faveur d’une jeune femme poursuivie pour avortement. De même, le 28 novembre 2000, le tribunal de Paris a relaxé une famille qui, pour se loger, était entrée illégalement dans un appartement vacant. Certes, ces jugements ont parfois été remis en cause en appel. Ils n’en permettent pas moins de préciser le champ de la désobéissance légitime. C’est notamment le cas de la décision du tribunal d’Orléans du 9 décembre 2005, qui relaxe des « faucheurs » de plantes génétiquement modifiées. Ce jugement rappelle que celui qui invoque l’état de nécessité doit prouver que le danger est « actuel et imminent », et que les moyens employés sont proportionnés à la gravité de la menace. Se fondant sur la Charte de l’environnement, devenue principe constitutionnel, les juges constatent le respect de ces exigences et concluent que celui qui agit en état de nécessité commet un « acte socialement utile ». Le droit peut donc, décidément, se révéler un instrument de changement entre les mains des citoyens. Encore faut-il qu’il existe un recours devant un tribunal, ce qui n’est pas toujours le cas.

Ce n’est qu’en ultime ressort qu’on peut passer de la résistance de plus en plus massive (refus de l’application d’une loi injuste) à la désobéissance civique (commission d’infractions). La désobéissance volontaire et concertée ne peut être qu’un mode exceptionnel d’action quand tout a échoué à faire changer la loi, sous peine de réduire à néant le principe démocratique. Transformer l’ordre social, changer la loi, c’est d’abord agir dans le cadre des institutions : n’oublions pas que c’est la loi votée par les représentants du peuple qui a légalisé les congés payés, le vote des femmes, le droit à l’interruption volontaire de grossesse, qui a aboli la peine de mort... Pour ces conquêtes comme pour bien d’autres il a, certes, fallu des pressions, des luttes, qui peuvent aboutir lorsqu’elles réussissent à mobiliser ou au moins à convaincre une partie significative des citoyens, grâce notamment aux médias. Souvent dans le cadre de la légalité, avec parfois le soutien de la majorité des citoyens, mais pas toujours.

C’est le cas des professeurs du réseau Education sans frontières s’opposant à l’expulsion d’élèves étrangers ; d’un syndicaliste de la police de l’air et des frontières refusant d’expulser des familles sans papiers ; des inspecteurs du travail refusant de se faire les auxiliaires de la police en faisant la chasse aux salariés victimes du travail illégal ; des agents de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) qui ne veulent plus radier des chômeurs ; des communes qui se mettent hors Accord général sur le commerce des services (AGCS – pièce maîtresse de l’Organisation mondiale du commerce [OMC] pour démanteler les services publics) ; de deux archivistes de la Ville de Paris sanctionnés pour avoir violé le secret professionnel afin de défendre l’historien Jean-Luc Einaudi contre M. Maurice Papon (7) ; des agents d’Electricité de France (EDF) membres de la Confédération général du travail (CGT) qui se font « Robins des Bois » en rétablissant le courant chez les pauvres. La désobéissance à la loi doit-elle être nécessairement non violente ? C’est ce que certains affirment, et les références à Gandhi ou à Martin Luther King sembleraient leur donner raison. En réalité, tout dépend du type de situation dans laquelle on se trouve : si la résistance contre l’occupation nazie ou la conquête ouvrière du droit de grève imposaient de recourir à la violence, il n’en est pas toujours de même pour la défense d’autres droits. Récemment encore, une forte mobilisation autour de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) a contribué au vote de la loi du 22 avril 2005 sur la fin de vie, mais aussi à la décision, le 2 janvier 2006, du procureur de Boulogne-sur-Mer d’abandonner les poursuites contre la mère et le médecin qui avaient mis un terme aux souffrances du jeune Vincent Humbert à sa demande, en commettant un crime selon la législation en vigueur (8).

Dans chacun de ces cas, il faut être conscient que résister c’est, toujours, prendre un risque – encourir des peines d’amende ou d’emprisonnement notamment –, et, parfois seulement, réussir à imposer un changement. Dans de nombreux cas aujourd’hui, la désobéissance civique à une loi injuste rejoint la résistance de ceux qui sont chargés de sa mise en œuvre : la désobéissance civique devient l’affaire de tous, et pas seulement des militants les plus radicaux. Elle pose alors une double question : quelle est la réalité de la démocratie à l’heure où s’accroît la crise de la représentation politique, et quelle est la place des citoyens pour la protéger et l’approfondir ?

Nuri Albala et Evelyne Sire-Marin.

Nuri Albala : Avocat, responsable international de Droit-Solidarité, membre du conseil scientifique d’Attac.

Evelyne Sire-Marin : Magistrate, coprésidente de la Fondation Copernic.

Notes :

(1) Lire Susan George, « L’ordre libéral et ses basses œuvres », Le Monde diplomatique, août 2001.

(2) Lire Thierry Paquot, « Désobéir », Le Monde diplomatique, janvier 2005.

(3) Henry David Thoreau, La Désobéissance civile, Mille et une nuits, Paris, 1996 (réédition).

(4) Notamment l’article 8 du statut du tribunal pénal international de Nuremberg, la convention de Genève sur le traitement des prisonniers de guerre et son protocole additionnel de 1977, l’article 33 du statut de la Cour pénale internationale.

(5) Lire Danièle Lochak, « Le juge doit-il appliquer une loi inique ? », Le Genre humain, no 28, Paris, automne-hiver 1994.

(6) Des grands-parents français ont ainsi été relaxés du délit de non-présentation d’enfant à son père algérien au motif que l’enfant, gravement malade, ne pouvait être soigné en Algérie (cour d’appel de Dijon, 19 décembre 1984).

(7) L’historien a mis en évidence le rôle de M. Maurice Papon dans le massacre du 17 octobre 1961.

(8). Lire Catherine Leguay, Respecter la vie, disposer de sa mort !, L’Harmattan, Paris, 2005

Annexe 5

Texte de l’appel des résistants aux jeunes générations, du 8 mars 2004

Appel à la commémoration du 60e anniversaire du Programme du Conseil national de la Résistance du 15 mars 1944

Au moment où nous voyons remis en cause le socle des conquêtes sociales de la Libération, nous, vétérans des mouvements de Résistance et des forces combattantes de la France Libre (1940- 1945), appelons les jeunes générations à faire vivre et retransmettre l’héritage de la Résistance et ses idéaux toujours actuels de démocratie économique, sociale et culturelle.

Soixante ans plus tard, le nazisme est vaincu, grâce au sacrifice de nos frères et sœurs de la Résistance et des nations unies contre la barbarie fasciste. Mais cette menace n’a pas totalement disparu et notre colère contre l’injustice est toujours intacte.

Nous appelons, en conscience, à célébrer l’actualité de la Résistance, non pas au profit de causes partisanes ou instrumentalisées par un quelconque enjeu de pouvoir, mais pour proposer aux générations qui nous succéderont d’accomplir trois gestes humanistes et profondément politiques au sens vrai du terme, pour que la flamme de la Résistance ne s’éteigne jamais :

Nous appelons d’abord les éducateurs, les mouvements sociaux, les collectivités publiques, les créateurs, les citoyens, les exploités, les humiliés, à célébrer ensemble l’anniversaire du programme du Conseil national de la Résistance (C.N.R.) adopté dans la clandestinité le 15 mars 1944 :

Sécurité sociale et retraites généralisées, contrôle des « féodalités économiques » , droit à la culture et à l’éducation pour tous, presse délivrée de l’argent et de la corruption, lois sociales ouvrières et agricoles, etc. Comment peut-il manquer aujourd’hui de l’argent pour maintenir et prolonger ces conquêtes sociales, alors que la production de richesses a considérablement augmenté depuis la Libération, période où l’Europe était ruinée ? Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l’ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l’actuelle dictature internationale des marchés financiers qui menace la paix et la démocratie.

Nous appelons ensuite les mouvements, partis, associations, institutions et syndicats héritiers de la Résistance à dépasser les enjeux sectoriels, et à se consacrer en priorité aux causes politiques des injustices et des conflits sociaux, et non plus seulement à leurs conséquences, à définir ensemble un nouveau « Programme de Résistance » pour notre siècle, sachant que le fascisme se nourrit toujours du racisme, de l’intolérance et de la guerre, qui eux-mêmes se nourrissent des injustices sociales. Nous appelons enfin les enfants, les jeunes, les parents, les anciens et les grands-parents, les éducateurs, les autorités publiques, à une véritable insurrection pacifique contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation marchande, le mépris des plus faibles et de la culture, l’amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous. Nous n’acceptons pas que les principaux médias soient désormais contrôlés par des intérêts privés, contrairement au programme du Conseil national de la Résistance et aux ordonnances sur la presse de 1944.

Plus que jamais, à ceux et celles qui feront le siècle qui commence, nous voulons dire avec notre affection : « Créer, c’est résister. Résister, c’est créer ».

Signataires : Lucie Aubrac, Raymond Aubrac, Henri Bartoli, Daniel Cordier, Philippe Dechartre, Georges Guingouin, Stéphane Hessel, Maurice Kriegel-Valrimont, Lise London, Georges Séguy, Germaine Tillion, Jean-Pierre Vernant, Maurice Voutey.

Sources diverses :

- Hannah Arendt (Du mensonge à la violence)

- Gérard Cahen (Résister)

- Etienne de la Boétie (La servitude volontaire)

- Robespierre (Pour le bonheur et pour la liberté) ;

- José Bové,discours

- Gilles Luneau (Pour la désobéissance)

- Henry David Thoreau (La désobéissance civile)

- Rony Brauman, Eyal Sivan (Eloge de la désobéissance, le procès Eichmann : essai sur la responsabilité)

- Gandhi (Mahatma)

- Anouilh (Antigone)

- Joseph Kessel (l’armée des ombres)

- Jean-Marie Muller (De la désobéissance civile)

- Mathieu Vernerey (Désobéissance civile et non violence)

- John Rawls

- Christian Mellon.


FORUM DE L’ARTICLE

Résistance ou désobéissance ?
7 septembre 2007, par Phil OGM

Site à visiter : De la désobéissance civile (JM Muller)

On peut aussi citer comme acte de désobéïssance en France (par exemple) :

- le renvoi des livrets militaires (et de tout le matériel) pendant la guerre d’Algérie.

- actuellement : les actions des "déboulonneurs" qui luttent contre l’envahissement publicitaire, et fondent leurs actions sur la désobéissance civile. On peut même dire que leurs actions sont des actions de "désobéissance civile pure" si l’on s’en réfère à leur charte.

Pour moi -et je ne suis pas le seul-, la différence fondamentale entre les termes "désobéissance civile" et "résistance" est lié au caractère non-violent de la désobéissance civile (la désobéissance civile est par définition non-violente, même si le terme (très récent en français et très contesté) de désobéissance "civique" a été employé (notamment et essentiellement par J. Bové et G. Luneau dans leur ouvrage "Pour la désobéissance civique). La désobéissance civile est une forme de résistance, mais la résistance peut employer des moyens violents (par exemple lutte armée).

Vous pouvez lire à ce sujet les nombreux articles de Jean-Marie Muller (un exemple en lien.

Le terme de "désobéissance civile" n’est donc pas un "glissement sémentique. la désobéissance civile est un acte de résistance qui a ses caractéristiques propres. C’est plutôt une clarification pour définir certains actes de résistances.

Au plaisir de vous lire.

Phil OGM (Faucheur volontaire, militant du Mouvement pour une Alternative Non-violente)


Résistance ou désobéissance ?

7 septembre 2007, par Antinuke

Rarement argumentation aura été aussi peu convaincante. Prenons le nucléaire : l’auteur tente de faire croire (à qui ? Et pourquoi ?) que les mobilisations antinucléaires ont renforcé le lobby de l’atome. A "raisonner" ainsi, il ne faut jamais résister (au nucléaire, au libéralisme, à l’oppression, etc) sous peine de renforcer l’adversaire. Pour "étayer" sa thèse fumeuse, l’auteur "explique" que le mouvement antinucléaire aurait été victime d’une volonté (de qui ?) de "vouloir tout réunir, tout uniformiser". Alors que le mouvement antinucléaire a justement toujours été - et est toujours - d’une grande diversité (il faut dire que toutes les régions françaises sont concernées !). Qui plus est, ce mouvement a toujours été dans son immense majorité un mouvement citoyen "paisible". Il est vrai qu’il est plus difficile d’arracher une centrale nucléaire qu’un plant de maïs OGM, mais le fait est que, à part des actions contre les convois nucléaires, la thèse de l’auteur ne correspond en RIEN à la réalité.

Il faudrait se renseigner un peu avant d’écrire !


RESISTANCE OU DESOBEISSANCE ? Le 8 septembre 2007

Par Jean-Marie Muller

porte-parole national du Mouvement pour une Alternative non-violente (MAN). Dernier ouvrage paru : Dictionnaire de la non-violence (Le Relié Poche).

* Permettez-moi de venir participer au débat suscité par Dominique Mourlane dans par son texte Résistance ou désobéissance ? Je le ferai sans aucun esprit polémique, même si je devrai exprimer un désaccord majeur avec la problématique exposée par l’auteur.

Il est tout à fait vrai que le concept englobant qui exprime la lutte contre l’oppression ou l’agression est celui de résistance. Cela ne peut faire aucun doute pour ceux-là mêmes qui font l’éloge de la désobéissance civile. Celle-ci n’est qu’une forme, qu’une modalité de la résistance. La résistance est une stratégie, la désobéissance est une tactique. D’aucune manière, le recours au terme de désobéissance civile ne saurait se faire au détriment de celui de résistance. Il ne peut donc pas exister de « glissement sémantique » qui montrerait une volonté de faire disparaître la notion de résistance de la terminologie contestataire. Parler de « courant révisionniste » à ce sujet me semble un véritable contresens.

Ceci étant dit, pour la clarté du débat, il me semble indispensable d’introduire quelques distinctions fondamentales. Je distinguerai tout d’abord l’objection de conscience et la désobéissance civile. Cette distinction a été faite dans tous les écrits majeurs sur cette question.
L’objection de conscience est le refus individuel de respecter la loi pour des raisons dictées par sa conscience. La désobéissance civile est une action collective visant à un changement politique dans la société. Pour cela, elle a pour but de créer un nouveau rapport de force en mobilisant et en organisant le nombre. En d’autres termes, les objecteurs se situent dans le cadre d’une « morale de conviction », tandis que les désobéisseurs se situent dans le cadre d’une « morale de responsabilité ». Les objecteurs veulent avoir raison conte l’injustice, les désobéisseurs veulent avoir raison de l’injustice. Dans tous les manuels sur l’action non-violente, il n’y a jamais eu la moindre ambiguïté sur cette question.

C’est pourquoi il est tout à fait regrettable que José Bové ait eu la malencontreuse idée de venir brouiller les cartes en dénommant « désobéissance civile » ce qui a toujours été appelé « objection de conscience », et en appelant « désobéissance civique » ce qui a toujours été dénommé « désobéissance civile ». Au demeurant, pendant toutes les années où nous avons lutté ensemble aux côtés des paysans du Larzac, nous avons toujours parlé de désobéissance civile, que ce soit pour le refus de l’impôt ou le renvoi des livrets militaires.

Il est tout aussi regrettable que Dominique Mourlane, à la suite de Nuri Albala et d’Evelyne Sire-Marin, reprennent à leur compte ce dérapage sémantique qui ne peut qu’embrouiller le débat. (Je me suis exprimé sur cette question dans une tribune publiée dans Politis, le 21 septembre 2006).

Pourquoi est-il essentiel de maintenir l’expression de désobéissance civile ? Parce que civil dit plus que civique. La désobéissance est civile en ce sens qu’elle respecte les principes, les règles et les exigences de la civilité. La désobéissance civile est la manière civilisée de désobéir. Elle est civile en ce sens qu’elle n’est pas violente. En définitive, elle est civile en ce sens qu’elle est non-violente. Au demeurant, qui, aujourd’hui, pense sérieusement à organiser une résistance violente ? Là encore, soyons clairs au sujet de la résistance, de la désobéissance et de la violence.

On ne peut certainement pas dire que la résistance peut être violente, tandis que la désobéissance s’inscrirait de facto dans une démarche non-violente. Non seulement la désobéissance peut être une action violente, mais toute action violente est une désobéissance, dès lors que l’État s‘est arrogé le monopole de la violence légale, précisément pour l’interdire aux citoyens. Il n’existe donc aucun lien organique entre la désobéissance et la non-violence. En revanche, il est vrai que les partisans de la désobéissance civile font un lien entre elle et la non-violence.

Autre clarification : il n’est pas vrai que « les désobéissants s’en prennent qu’aux lois sans remettre foncièrement en cause le système pourvoyeur ». Á l’évidence, lorsque Gandhi, dans le cadre de la résistance à la colonisation britannique, organisait une campagne de désobéissance civile, sa visée politique était bien de détruire le système du colonialisme. Il n’a cessé de le répéter tout au long de la « marche du sel ».

Autre précision : une campagne de résistance non-violente ne saurait se réduire à une ou des actions de désobéissance. Il est essentiel d’organiser d’autres actions directes qui soient légales. Ces actions doivent permettre aux personnes qui ne sont pas prêtes à prendre le risque de la désobéissance de participer directement à la résistance. Celle-ci doit mobiliser le plus grand nombre dans la durée. Sur ce point, je rejoins Dominique Mourlane : il faut être capable de mener « une action de longue haleine et tenable ».

Il a également raison de souligner que le risque existe que, sous le coup de la répression, une action qui se réduirait à la désobéissance aux lois finisse par « marginaliser une lutte. Tout au long des huit années de la résistance des paysans du Larzac, la lutte ne s’est pas réduite aux actions de désobéissance civile que j’évoquais tout à l’heure. Les paysans ont su organiser des rassemblements et des marches auxquels des dizaines de milliers de personnes ont participé. Ils ont aussi mené des grèves de la faim et la loi n’interdit pas de cesser de s’alimenter. C’est un anarchiste qui affirmait naguère : « Nous ferons la révolution par tous les moyens, même par les moyens légaux ! » Il me semble donc essentiel que ce débat sur la désobéissance, dont l’enjeu est important pour l’avenir des résistances citoyennes, se poursuive dans la plus grande sérénité sans que des clivages artificiels nous empêchent de conjuguer nos efforts pour rendre un autre monde possible.

(Sur l’ensemble de ces questions, Cf. le dossier publié par la revue Alternatives Non-Violentes, Éloge de la désobéissance civile, N° 142, www.anv.irnc.org)


Résistance ou désobéissance ?

11 septembre 2007, par adhérent 20435

Site à visiter : "terminologie contestataire"

Glissement sémantique ? révisionnisme ?

…"Ce glissement sémantique pourrait montrer une volonté de faire disparaître la notion de résistance de la terminologie contestataire."…écris-tu. Sauver le signifiant est louable pour sûr.

Sachons surtout, ensemble, faire vivre le signifié.

Je commence par une une question à l’auteur : Ne pas réadhérer à Attac, est-ce un acte : 1) de désobéissance ? 2) de résistance ? 3) de dépit ? 4) autre ...

Dans la vie, il y a la langue. Avec des verbes. Des verbes, il y en a d’intransitifs : résister est l’un d’eux. C’est un verbe d’action. Il y a aussi des verbes transitifs (ici, dans la déclaration des Droits de l’Homme il est transitif indirect) : résister à...l’oppression. Il est salutaire de résister aussi : à la fascination, à l’imitation, à l’intimidation, à l’intimation, à l’isolement, à la désolation, à la marchandisation, à l’instrumentalisation, à la communautarisation, à la financiarisation …(Jean passe). Il est indispensable de résister : au formatage, au t.c.e., au néolibéralisme, au marché (à qui le veut de continuer la liste…). Dans la vie, donc, il y a les actes. Celui de créer est synonyme, on le sait maintenant de celui de résister.

Lis, Dominique du poète l’éclat qui luit. "L’homme crie où son fer le ronge et sa plaie engendre un soleil plus beau que les anciens mensonges". Heureux, celui qui aussi écoute l’autre dans son acte singulier de résistance. Il n’y a de vraie résistance, ça se constate chaque jour, que s’il y a, à la source, résistance du sujet. Sujet dans le sens où, tu les vois bien, au cœur du mot, ces deux lettres qui se serrent les coudes, oui, tu les vois, ces deux lettres [j-e] qui se suivent "su-JE-t". Ces sujets singuliers qui partagent leurs précieux et uniques savoirs de résistant(e)s. Nous : êtres solidaires.

Tu as été membre du CA d’Attac. Un bon membre du Ca d’attac, oui, bon. Et je votai pour toi. Je, tu, il, elles, nous oui, chacun de nous a ses limites (modifiables : tout savoir est troué). Une tienne transparaît dans cette formule qu’il m’arrange de sortir du contexte pour la mettre en évidence : "…mais ce n’est pas ainsi que l’on motive des troupes..." Tu as été membre du CA d’Attac. C’était donc un implicite, une évidence de croire que tu appréciais dans l’"autre" - quel qu’il soit - un sujet, un citoyen, une personne, un humain, un égal, un chercheur en résistance, pas un élément de la "troupe" qui lexicalement parlant n’est à mes yeux qu’un trope de "troupeau". Attac n’est pas un rassemblement de godillots, de nigauds, de gogos. Et ce n’est pas pour rien que nous nous reconnaissons dans le fait de ne pas nous considérer comme des moutons.

Donc, se poser la question de la prise en compte réflexive et constructive des actes singuliers dans le chantier des luttes, plus qu’alimenter les stigmatisations négatives récurrentes de l’"autre" comme mauvais objet est un devoir pour chacun.

Sachons quitter le champ de la phraséologie stérile pour prêter attention à d’autres significations. Ainsi replacer ce mot qui semble faire problème dans le contexte clinique de la psychanalyse : la "résistance" est une force qui s’oppose au retour dans le conscient, de pensées inconscientes, qui pourraient participer à la guérison du patient. J’essaie quant à moi (souvent avec peu de succès) de désobéir à cette résistance si vile.

"Résister à l’oppression", oui, Dominique, je suis d’accord avec toi, c’est vital. Et, vu que la chose te questionne, t’ invite à lire de Patrick Chamoiseau "Ecrire en pays dominé". Et lisant et relisant penserons à Louverture et donc au Nègre marron, figure singulière, ancestrale et tutélaire parmi tous les résistants, désobéissants, indociles, rebelles pollinisateurs d’aujourd’hui qui, les uns croyant au ciel et d’autres n’y croyant pas savent converger dans les luttes essentielles pour créer –ensemble- les pratiques nouvelles.

Il est vital aussi parfois de ne pas résister au besoin de ramener sa fraise. En essayant, de faire courT.


*
Résistance ou désobéissance ?

12 septembre 2007, par Desmodue

Désobéïssance civile, civique, violence ou pas, les voies de la "résistance à l’oppression" sont innombrables... tout est une question de contexte, de temps et de lieu.

Gandhi, qui fait fantasmer beaucoup de monde, bénéficiait d’une supériorité numérique sur le terrain tellement écrasante que son exemple doit être remis dans ce contexte, et ne pas être servi réchauffé à toutes les occasions . Ce qui n’enlève rien à ses mérites par ailleurs : dans le même contexte et pour le même but (l’indépendance de l’Inde), d’autres que lui auraient pu choisir (avec probablement le même résultat) l’option d’une révolution nettement plus sanglante. Il ne l’a pas fait, c’est tout à son honneur. Mais sans cette multitude derrière lui sa révolte pacifique aurait très probablement été le Nième "soulèvement indigène" écrasé dans le sang et dans l’anonymat par les colons britanniques.

Finalement (vu l’heure tardive...) le problème que tu soulèves serait à mon sens celui de la ritualisation et de la perpétuation de modes de lutte qui ne sont plus ou n’ont jamais été efficaces. Ce qui arrive quand on oublie la fin pour les moyens, et que le moyen devient une fin en soi : peu importe pourquoi faire, du moment que l’action est non violente (ou violente, c’est pareil). Et peu importe l’action pourvu qu’on ait l’ivresse ! Celle du pouvoir, celle "d’écrire l’histoire", celle d’être "plus pur" que les autres....

D’un côté des "faucheurs volontaires" castagnés et embastillés par la maréchaussée dans une indifférence maintenant presque générale. De l’autre les "black blocs" sans lesquels il ne serait point de "bonne" manif anti G8 ou anti OMC...surtout pour ceux qui arrivent derrière et prennent les coups à leur place !

Retour en haut de la page

Soutenir Mille Bâbords

Pour garder son indépendance, Mille Bâbords ne demande pas de subventions. Pour équilibrer le budget, la solution pérenne serait d’augmenter le nombre d’adhésions ou de dons réguliers.
Contactez-nous !

Thèmes liés à l'article

Analyse/réflexions c'est aussi ...

0 | 5 | 10 | 15 | 20 | 25 | 30 | 35 | 40 | ... | 2110