Plus que certaines lois stupides et iniques que l’on a vu passer depuis quelques années, c’est l’esprit avec lequel elles sont appliquées et l’indifférence qui les accueille qui me font froid dans le dos. Quelques exemples récents :
un clandestin gréviste de la faim expulsé sur une civière ;
une mère expulsable cueillie à la sortie des urgences ;
des roms chassés du terrain dont ils sont propriétaires et leurs biens détruits pour leur passer l’envie de revenir ;
un enfant qui faillit être expulsé malgré une maladie grave, le condamnant à un défaut de soins à l’arrivée (dans son cas, c’est toute la chaîne judiciaire qui n’a pas voulu tenir compte de son état) ;
des enfants que l’on prive de l’un de leurs parents parce qu’il n’a pas de papiers ;
des familles régularisables qu’on ne régularise pas parce que le chiffre annoncé par un ministre est atteint ;
des centres de rétention dont le commissaire européen aux droits de l’homme n’a trouvé l’équivalent qu’en Moldavie ;
etc.
Que les lois soient faites pour être appliquées est une chose (savoir si ces lois sont bonnes ou pas est un autre sujet). Mais pourquoi tant d’inhumanité dans leur application ? Quelle loi, quel décret oblige fonctionnaires, juges et policiers à passer outre les normes minimales de l’humanité ?
Et surtout, pourquoi ces transgressions arrivent-elles à paraître banales, voire normales et même acceptables au plus grand nombre ? Quel est ce silence glacé qui s’installe au fond de nos cœurs ? D’où vient-il ? Pourquoi l’acceptons-nous ? Quel est ce charme de serpent qui agit sur nous et qui rend possible l’impensable ? Pourquoi abandonnons-nous librement notre humanité, sans même que personne ne nous l’ait demandé ?
Car ce qui est fait à ces enfants, c’est à nous que nous le faisons.
Pierre
Origine : FEN liste.