Une tribune pour les luttes

Étranges étrangers

par Pierre Stamboul, président de l’UJFP

Article mis en ligne le lundi 22 octobre 2007

Ce que j’aurais raconté au nom de l’Ujfp dans la manif d’Aix s’il y
avait eu des prises de parole d’associations.

La création d’un « ministère de l’identité nationale » promise aux
électeurs de Le Pen et confié à Hortefeux n’a qu’un seul précédent du
même type dans l’Histoire de France : le « commissariat général aux
questions juives » du sinistre Xavier Vallat.

Certes, nous dira-t-on,
la situation n’est pas la même. Les Sans PapierEs rafléEs ne partent
pas à Drancy ou à Auschwitz, ils sont « simplement » jetés dans des
avions ou des ferrys. Mais l’intention est la même : déshumaniser,
traquer, créer la peur permanente. Les Sans PapierEs ne vivent plus
l’Etat de Droit. Ils sont passés de l’autre côté du miroir.

Contre eux,
la France viole tous les textes internationaux qu’elle a signés : droit
d’asile, droit de vivre en famille, droit à la santé, droit à
l’éducation exactement comme la France de Vichy avait privé de tout
droit dès 1940 les Juifs, les Tziganes, les communistes, les
homosexuels … La France d’aujourd’hui recopie même le vocabulaire de
Vichy. Comme autrefois, les Sans Papiers sont officiellement « en
surnombre dans l’économie française ».

Au moment même où le gouvernement et le MEDEF veulent liquider tout ce
que le Conseil National de la Résistance a établi à la Libération
(sécurité sociale, retraite pour touTEs, création de grands services
publics de l’énergie et des transports, statut de la fonction publique
…), une diversion est apparue avec la lettre de Guy Môquet. Ne les
laissons pas refaire l’Histoire, ne les laissons pas récupérer celles
et ceux qui ont combattu la barbarie et le racisme : les étrangers et
les Sans PapierEs ont joué un rôle fondamental dans la Résistance. À
l’automne 1943, seule la M.O.I. (Main-d’œuvre immigrée) avait un groupe
actif à Paris. Ils s’appelaient Alfonso (espagnol), Fontanot (italien),
Manouchian (arménien), Boczov, Elek, Rayman, Wajsbrot, Olga Bancik
(juifs/ves venuEs de Pologne, Hongrie ou Roumanie). Ils/elles ont été
arrêtéEs et torturéEs par la police française (les « brigades
spéciales ») puis livréEs à la Gestapo et exécutéEs.

60 ans après, la France s’est excusée pour les rafles et les crimes
commis en son nom. Elle commémore le Veld’hiv. Elle célèbre les
résistants et toutes celles ou ceux qui ont aidé les gens traqués. Elle
affirme qu’il aurait fallu désobéir à des ordres injustes.

À quoi bon ces commémorations quand le même cycle infernal du racisme
d’Etat et de la discrimination recommencent ? Quand on reparle de
quotas. Quand on criminalise les Sans PapierEs et leurs soutiens.

Aux fonctionnaires de police, aux juges, aux employéEs des préfectures,
aux pilotes d’avion ou aux capitaines de ferrys, nous disons :
« désobéissez à des ordres injustes ! ». Aux agents de l’ANPE, aux
médecins des centres d’urgence, aux éducateurs et aux directeurs
d’école qui sont appelés à la délation, nous disons : « refusez, la
solidarité n’est pas un délit ».

Soutenir les Sans PapierEs et empêcher
l’horreur quotidienne des expulsions est plus que légitime : c’est
lutter pour la défense des droits de tous les humains. Le Réseau
Education Sans Frontières et Florimond Guimard mènent une lutte
indispensable.

Florimond, nous sommes avec toi, le pouvoir ne nous intimidera pas.

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