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Paris le 25 juin 2011
C’est notre camarade et ami Georges GUMPEL de Lyon qui portera la voix de l’UJFP sur le « Louise Michel », un des deux bateaux français avec le « Dignité-Al Karama » qui partiront en début de semaine prochaine avec les dix autres de la Flotille internationale vers Gaza. Leur but : dire non au blocus de Gaza installé par Israël depuis 4 ans à présent - un blocus illégal aux termes du droit international, et qui emprisonne un million et demi de personnes dans des conditions indignes dénoncées par l’UNWRA et de nombreuses ONG internationales.
Georges Gumpel a accepté la responsabilité d’agir au nom de tous les membres de l’UJFP et plus largement de tous les français juifs indignés par le blocus par l’occupation et la colonisation des territoires palestiniens occupés, et de dire NON ! Nous ne nous identifions pas à cette politique, nous refusons ses crimes, et surtout nous refusons d’être désignés d’office comme les soutiens inconditionnels d’Israël. Notre judéité comme notre humanité et notre citoyenneté, sont les moteurs de notre action contre l’injustice, contre les violations des droits humains et du droit international commises par Israël. Rien ne peut justifier ou légitimer le siège de Gaza, comme rien ne justifie les attaques incessantes dont cette étroite bande de terre est la cible depuis des années maintenant. La défaillance de la communauté internationale la rend complice de cette situation tragique . Georges Gumpel représente aussi le réseau européen des Juifs pour une paix juste auquel est affiliée l’UJFP. D’autres membres de ce réseau seront sur des bateaux européens avec le même message de solidarité avec la population de Gaza et de refus du blocus.
Né en 1937 à Paris d’une famille juive française laïque et totalement étrangère à la question du sionisme, il a exercé la profession de fleuriste décorateur jusqu’à sa retraite. Il est veuf et grand père de deux petites filles.
Victime du nazisme et des lois racistes et fascistes du gouvernement français de Vichy, il a été un enfant caché dès 1943 dans une institution religieuse lyonnaise, puis dans une famille de paysans pauvres de Haute-Loire jusqu’à la libération. Il est fils d’un déporté « mort pour la France » à Melk en Autriche en avril 1945.
Son père a été arrêté à Lyon fin juillet 1944 en distribuant des tracts, et déporté dans le convoi du 11 aout 1944 à Auschwitz.
Georges était partie civile au procès de Klaus Barbie à Lyon en 1987. Barbie était inculpé du seul chef d’accusation de crimes contre l’humanité, dont ceux relatifs au convoi du 11 aout 44 pour la déportation d’un nombre indéterminé d’hommes, de femmes et d’enfants (entre 600 et 800) .
Georges est devenu selon ses propres termes un « juif-politique » en 2000 lorsqu’il s’engage dans l’UJFP qu’il a contribué à construire et développer notamment dans sa région lyonnaise mais aussi nationalement. Il est membre du bureau national de l’UJFP.
Son engagement marque son refus des crimes commis par Israël envers les Palestiniens, crimes commis en utilisant et manipulant son histoire, et aussi son refus que des organisations juives comme le CRIF soutienne bruyamment la politique israélienne en son nom. Il s’engage aussi pour la défense des droits légitimes du peuple palestinien, pour la défense et le respect du droit international.
A travers ce combat il est devenu, dit-il, « un anti sioniste conséquent », exigeant l’application du droit international et que les auteurs des crimes commis dans les Territoires Palestiniens Occupés , à Gaza, soient jugés devant les instances internationales compétentes.
Engagé avec l’UJFP, en France contre le racisme et la xénophobie devenues politiques d’Etat, il trouve naturel et cohérent de cacher à son tour chez lui pendant quelques mois un jeune marocain sans papier menacé d’expulsion. Lors de l’arrestation de ce jeune homme il entendra stupéfait le commandant de la police des frontières Rhône Alpes lui dire : « nous avons toujours su qu’il était chez vous, mais vous comprenez bien que nous n’aurions jamais pu entrer chez vous. » Cette phrase pour lui comme pour nous illustre ce que l’on peut ou doit faire « en tant que juif » dans notre pays.
Il est convaincu comme nous tous que la campagne « un bateau français pour Gaza » correspond à un tournant majeur dans l’opinion publique française. Elle est l’expression du rejet profond par la société civile de la politique israélienne comme de la politique du gouvernement français et de l’Union Européenne.
Nous sommes fiers aujourd’hui avec lui que notre travail politique au sein du mouvement de solidarité ait su imposer notre voix et notre présence dans ce combat essentiel.
Georges est aujourd’hui un heureux passager du Louise Michel, il représente notre confiance et celle de la société civile toute entière dans la justice.
Je serai heureux si j’apprends qu’un seul de mes nouveaux lecteurs a compris combien il est risqué de suivre le chemin dont le point de départ est le fanatisme nationaliste et la capitulation de la raison.
Primo Lévi : Si c’est un homme
http://rebellyon.info/Quelques-mots-avant-de-monter-a.html
« Quelques mots avant de monter à bord du Bateau pour Gaza », lettre de Georges Gumpel
Georges Gumpel, militant lyonnais de l’Union Juive Française pour la Paix, enfant caché et fils de déporté, partait il y a quelques jours dans le Bateau français pour Gaza au sein de la nouvelle flotille pour la liberté.
Il explique son parcours et son choix de participer à ce bateau pour Gaza à travers une lettre, reproduite ci-dessous.
Je suis né à Paris, en mars 1937 dans une famille juive française que l’on disait israélite alors pour marquer la différence entre ces familles françaises et celles qui venaient de l’Europe entière, fuyant le nazisme et le fascisme.
C’est à Paris que j’ai vécu la plus grande partie de ma vie.
Mon histoire personnelle avec Lyon remonte aux années noires de l’occupation, de la collaboration, à l’été 1942 plus exactement, quand ma famille fuyant Paris est venue se réfugier ici du côté de Montchat.
Le couvent voisin nous ouvrait parfois ses portes à nous les enfants : mes deux jeunes soeurs et moi, quand mes parents étaient informés de dangers de rafles....
En automne 1943, c’est aussi une institution religieuse lyonnaise qui m’a accueilli quelques mois avant que je sois définitivement caché en Haute Loire jusqu’à la Libération.
Lyon c’est aussi mon père, arrêté fin juillet en distribuant des tracts près de la gare Perrache.
Lyon c’est Montluc où il fût interné puis, le convoi du 11 août 1944....
Lyon ensuite s’est à nouveau imposé à moi en 1987 au moment du procès de Klaus Barbie où nous étions - ma mère, mes soeurs et moi - Parties Civiles pour ce Convoi du 11 août, la déportation de mon père, sa mort ensuite mi avril 1945, dans le camp d’extermination de Melk en Autriche.
Ce crime contre l’ Humanité parmi les multiples autres crimes contre l’ Humanité dont Barbie avait à répondre.
Lyon est aujourd’hui la ville où j’ai décidé de vivre ma retraite.
Souvent, il m’est arrivé de lutter contre l’injustice, pour le droit des peuples à leur indépendance et à leur liberté dont celles, essentielles, du peuple Algérien.
Jamais, dans ces combats qui ont marqué ma jeunesse, ma vie tout court, il m’est venu à l’esprit de faire valoir mon identité juive.
Comme beaucoup, j’étais anticolonialiste, internationaliste comme on le disait alors.
La question Palestinienne, la guerre sans fin faite par l’Etat hébreu aux Palestiniens, l’utilisation par Israël de notre histoire, des tragédies dont nous avions été les victimes, pour légitimer ses crimes en Palestine, faire taire toutes critiques, fussent-elles minimes, m’ont obligé ( c’est le cas pour beaucoup d’autres juifs ) à sortir de ma réserve, à prendre à bras le corps cette identité juive qui jusqu’alors faisant partie de mon intimité, pour affirmer mon refus de cette politique criminelle faite « en notre nom ».
Je suis de ceux qui pensent qu’aujourd’hui, en ce début du XXI siècle, il grand temps d’envisager que le temps du nazisme, le temps de la collaboration, le temps des crimes dont nous avons été les victimes, fait définitivement partie de l’ Histoire, que ce temps là appartient maintenant aux historiens, que nous devrions, nous les survivants, cesser de parler.
Mais Israël, paradoxalement, nous interdit le silence.
Mais les gens, ici en France, qui monopolisent « en notre nom » la parole juive, eux aussi nous interdisent le silence.
Et que dire du gouvernement français qui nous enferme dans un communautarisme criminel,et laisse supposer, en même temps qu’il fait grand bruit autour de la prétendue « identité nationale », que nous, juifs français, aurions éventuellement une double nationalité - française et israélienne - entretenant ainsi le discours israélien et celui des sionistes français, discours favorisant la résurgence du racisme et de l’antisémitisme ?
Ce gouvernement, lui aussi, nous interdit le silence .
Il faut donc parler ..
Aujourd’hui même, ce 21 juin 2011, aux informations de 7 heures, le chroniqueur nous parlait de Justice Internationale, de crimes de guerre, de crimes contre l’ Humanité, de populations civiles menacées, en Syrie, en Libye, en Afrique et ailleurs, sans un mot pour ce qui est de la Palestine devenue pour tous une zone noire, invisible, innommable même...
Sans un mot pour ces populations civiles palestiniennes elles aussi en permanence menacées.
Il faut donc parler .
A Lyon justement, où depuis le procès de Barbie en 1987, le Centre d’ Histoire de la Résistance et de la Déportation ( CHRD ) est devenu un lieu incontournable où des milliers et des milliers de jeunes et de moins jeunes viennent chaque année visiter ce lieu, voient le film consacré au procès, voient tous ces témoins qui ont défilé, des jours durant, dire devant le monde entier ce que Crimes contre l’Humanité signifiaient.
Je me souviens de la déposition de Madame Zatlin le 27 mai, à propos de l’arrestation et la déportation des enfants d’Izieu , cette déposition que l’on peut écouter dans le film au CHDR, cette déposition / question au cours de laquelle elle demande à l’avocat de Barbie :
« Barbie a toujours dit qu’il s’occupait uniquement des Résistants et des Maquisards ; ça veut dire des ennemis de l’armée allemande.
Je demande : les enfants, les 44 enfants, c’étaient quoi ?
C’étaient des Résistants, c’étaient des Maquisards ?
Qu’est-ce qu’ils étaient ?
C’étaient des innocents !
Monsieur le Procureur, Messieurs les Jurés, les enfants sont des enfants, qu’ils soient blancs, qu’ils soient noirs, qu’ils soient juifs ».
Cette interrogation / question est toujours actuelle, d’une grande actualité même, les enfants palestiniens, les enfants de Gaza qui meurent par centaines, qui sont les principales victimes plus exactement, qu’est ce qu’ils sont ?
Des résistants, des ennemis d’ Israël ?
Simplement : ce sont des innocents.
Et la communauté internationale se tait. Les oublie complètement, nie leurs droits les plus élémentaires.
Je vais le samedi et le dimanche avec ma petite fille au Parc de la Tête d’Or.
Des milliers d’enfants comme elle jouent librement, sans crainte, dans cet espace merveilleux.
Je voudrais que les grands pères palestiniens, ceux de Gaza, aient - comme moi - la joie de pouvoir promener leurs petits enfants dans des jardins aussi tranquilles pour leurs petits enfants que le parc de la Tête d’ Or, que leurs petits enfants, eux aussi, jouent aux jeux de leur âge sans crainte, librement.
Des jardins et des jeux qui nous étaient interdits, à nous aussi enfants juifs, par Vichy. Souvenez - vous !
Voilà, je parle donc,
Dans quelques jours, je serai avec la délégation française sur le Bateau qui voguera vers Gaza pour dire - avec la Société Civile française qui, par sa grande générosité, a financé ce bateau - notre indignation face à cette indifférence générale, notre exigence à ce que cesse le blocus illégal et criminel de Gaza, notre exigence qu’ Israël respecte enfin le Droit International, le Droit Humanitaire International.
Ces Droits Internationaux construits dans le sang de nos parents.
Toutes et tous, nous refusons la capitulation de la raison.
Georges Gumpel
enfant caché,
fils de déporté « Mort pour la France » à Melk en Autriche,
Partie civile au procès Barbie,
membre de l’ Union Juive Française pour la Paix - UJFP.
Lyon le 21 juin 2011
Vos commentaires
# Le 28 juin 2011 à 13:55, par SpeedyLover En réponse à : Avec GEORGES GUMPEL, l’UJFP embarque pour GAZA
J’apprécie grandement cet article qui ne prend pas partie et conserve son caractère informatif dans une histoire si compliquée que celle d’Israel.