Remonter la rue Portifiro Diaz, c’est remonter une rue haute en couleur. Certains mur décrépis racontent la magnificence des siècles passés. D’autres se disputent les éclats de vert, les nuances d’orange ou la beauté d’un sombre violet. La ville semble enchantée. Loin de nos murs gris occidentaux. Au numéro 510, un violoniste nous observe, imperturbable. Á ses cotés, une gamine serre contre elle un cœur marqué du chiffre 43. Justicia o Revolución violenta, des mots comme des balafres sur le mur. Ayotzinapa, toujours au cœur de douleurs inextinguibles. Nous sommes bien arrivés au TAC.
L’histoire de Mario rejoint celle de l’histoire des arts graphiques au Mexique. Avant même de nous parler de lui, de son travail, il fait un pas de côté pour revenir aux origines vers l’incontournable Maestro José Guadalupe Posada (1852-1913). Ses « calaveras », squelettes qui dansent, qui se battent ou qui s’étreignent vont faire le tour du monde. Elles représentent les pauvres, la misère, l’injustice, le peuple mexicain tout entier. Pour Diego Rivera, grand muraliste Mexicain, ces gravures étaient aussi puissantes que celle de Goya.
Cette tradition de la gravure politique va se retrouver à travers el Taller de Gráfica Popular, créé par les peintres Leopoldo Méndez, Luis Arenal et Pablo O’Higgins. Un collectif qui a construit le discours graphique de la révolution mexicaine et qui a travers ces dessins a combattu toutes les formes de fascisme. Pour Mario, cette période représente « l’âge d’or » de la gravure mexicaine. Cette histoire se prolonge sur tout le continent « En Amérique latine, après la guerre froide, l’art graphique est devenu très prolifique. C’était l’époque des guérillas. Ce type d’art voulait dénoncer les nouveaux impérialismes ».
En 1994, le soulèvement zapatiste interpelle Mario et lui inspire ses premières gravures politiques. Par la suite, son histoire personnelle va s’immiscer dans les turbulences de l’histoire collective. Nous sommes en 2006 à Oaxaca. La révolte sociale gronde. Mario va alors rejoindre le collectif ASARO ( ASamblea de Artistas Revolucionarios de Oaxaca). Ce collectif a réussi à regrouper, sur plusieurs années, plus d’une cinquantaine artistes. Pour Mario, « il s’agissait d’appuyer la lutte sociale de Oaxaca avec la volonté de produire des gravures politiques ». Les œuvres d’ASARO sont à la fois non-conformes, poétiques et politiques. Leurs dessins reflètent, leurs colères, leurs extases, leurs renoncements, leurs cris, leurs grondements. L’époque est bouillonnante. Les barricades s’élèvent. Les murs se tapissent de cris, de rage et de révoltes. ASARO reprend le flambeau de ses illustres prédécesseurs et dénoncent les inégalités, les violences que subissent les peuples originaires.
Leur revendication est simple : « L’Assemblée des artistes révolutionnaires est née de la nécessité de rejeter et de transcender les formes autoritaires d’exercice du pouvoir et de la culture institutionnelle qui ont été qualifiées de discriminantes et déshumanisantes, cherchant à imposer une version unique de la réalité. Nous revenons à la forme de l’assemblée, parce que nous croyons en la possibilité de récupération de la force communautaire dans l’art et parce que l’assemblée est la manière dont les gens dialoguent et prennent des décisions en fonction d’intérêts collectif ».
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