Une tribune pour les luttes

Comité de lutte des travailleurs de Continental Clairoix

Soutien au "Conti" Xavier Mathieu !

Compte-rendu du procès du 4 Janvier 2012 à Amiens à la cour d’appel par Bellaciao
Scandaleux : 1 200 euros d’amende pour avoir refusé le prélèvement d’ADN !
+ Déclaration de Xavier Mathieu (vidéo).

Article mis en ligne le dimanche 5 février 2012

La cour d’appel d’Amiens a condamné vendredi 3 février le syndicaliste CGT de l’ancienne usine Continental, Xavier Mathieu, à 1 200 euros d’amende pour avoir refusé le prélèvement de son ADN par la police.
Le syndicaliste avait été relaxé en première instance en juin 2011 par le tribunal correctionnel de Compiègne. Le parquet, qui avait requis une peine d’un mois de prison avec sursis, avait fait appel de sa relaxe. "Je suis condamné (...), ce qui veut dire qu’ils peuvent se repointer la semaine prochaine et me redemander mon ADN et me rejuger si je refuse", a réagi Xavier Mathieu.

"Ce n’est pas l’amende le pire, c’est d’être condamné, d’être traité comme un délinquant. Les délinquants, ce sont les dirigeants de Continental. Ce ne sont même pas des voyous, ce sont des criminels. J’aurais voulu qu’(ils) soient jugés pour les conséquences de la fermeture de cette boîte, le désastre économique sur la vie des gens".

"Que Xavier [Mathieu] soit dans le même fichier que des violeurs et des assassins, c’est honteux", a déclaré Pierre Sommé, l’un des quelques cent "Conti" venus soutenir le syndicaliste à sa sortie du tribunal.


Vidéo de Mourad Laffitte de la manifestation de soutien et de la déclaration de Xavier Mathieu au procès.
http://www.dailymotion.com/video/xn...


http://bellaciao.org/fr/spip.php?article124986

Déclaration de Xavier Mathieu. Le 4 janvier 2011

"Ce qui me conduit aujourd’hui devant ce tribunal est le simple fait d’avoir refusé au nom de mes droits et de mes libertés individuels de me soumettre à un test ADN dont le seul but est d’aller agrandir un fichier prévu au départ pour les violeurs, pédophiles et criminels en tout genre, et élargi en 2003 par Sarkozy à tous les délits pénaux et rendant coupable et condamnable tout militant syndical mais aussi associatif et politique dans le seul but, vous l’aurez compris, de pouvoir continuer sa politique sécuritaire, totalitaire et liberticide au service des capitalistes, patrons de multinationales, des banquiers et autres escrocs de la spéculation". Je vous ai dit tous les délits pénaux. Pardonnez mon erreur, sauf un, les délits financiers. Et bien oui, vous comprendrez bien que ces gens, ainsi que les puissants dont ils sont à la botte, n’allaient pas prendre le risque de se mettre dans la merde avec leur propre loi.

Je suis syndicaliste et fier de l’être. Et cette criminalisation est un amalgame dangereux et insupportable pour le militant syndical que je suis depuis plus de vingt-cinq ans. Agir dans la désobéissance civile est pour moi une nécessité et un acte de résistance vital. C’est exactement ce qu’a reconnu le tribunal de Compiègne en me relaxant, en considérant que les manifestations des travailleurs pour défendre leurs droits, y compris celle de la sous-préfecture, ne pouvaient être assimilées à un délit, et refusant dans le même temps de me juger comme un délinquant.

C’est pour cela justement que je m’oppose à cette loi inique car je refuse d’être montré comme un délinquant, dont le seul délit est d’avoir défendu nos emplois, nos droits et une seule chose que nous possédons tous, nous, notre dignité.

Mais l’Etat a décidé de poursuivre cet acharnement judiciaire à mon égard en faisant appel de cette courageuse décision sans tromper personne. Nous savons tous qu’en s’attaquant à un des porte-parole des ouvriers de Continental, ils tentent de leur faire payer à tous d’avoir osé relever la tête, d’avoir été au combat et d’avoir réussi à les faire plier ainsi que les dirigeants voyous de cette multinationale qui n’ont eux jamais été inquiétés par la justice.

Le combat aujourd’hui n’est pas seulement celui de Xavier Mathieu, ni même uniquement celui des Conti, mais celui de la survie du droit de lutte syndical, associatif, politique, du droit à la contestation, celui de la résistance, du refus de la résignation. Nous devons nous battre contre cette loi qui n’a pour seul but suprême que d’anéantir la véritable identité française dont je revendique notre tradition révolutionnaire, ce formidable pouvoir de résistance exercé par nos aïeux lors de la Commune de 1871 dont nous avons fêté les 140 ans en 2011, les résistants de la Seconde guerre mondiale qui ont battu, combattu le fascisme et le nazisme, dont l’odeur nauséabonde nous remonte dans les narines ces temps-ci, ceux du Conseil national de la résistance, ceux de 36, de 68, ceux du Larzac, de Plogoff, de la sidérurgie, des Chaussons, des mineurs, des agents de sécurité de Roissy, etc, etc ...

La défense de cette jurispridence du tribunal de Compiègne doit être protégée et confirmée ici par le tribunal d’Amiens. C’est pour cela que nous avions fait appel aussi à toutes les directions syndicales de ce pays. Les absents ne l’ont sûrement pas compris.

En tant qu’humaniste, je suis dans l’obligation de me poser cette question qui m’horrifie et me hante : il existait déjà ce genre de fichier durant la seconde guerre mondiale où y étaient inscrits les tziganes, les rroms, les juifs, les communistes, les homosexuels. Et quand on sait le sort réservé à ces populations, qu’aurait fait Hitler avec ce genre de fichiers entre les mains ? Serions-nous tous blonds aux yeux bleus ? Lorsque l’on sait aujourd’hui grâce à des travaux et des témoignages comme celui qui va être fait à la barre à mon procès aujourd’hui par Catherine Bourgrain, généticienne à l’INSERM, qu’il est possible par ces prélèvements de définir les origines géographiques et dans le même temps la couleur de peau des personnes prélevées et aussi leurs futures maladies potentielles, qui nous garantit que ces fichiers ne tomberont pas dans les mains un jour de partis fascistes ou dans les mains de compagnies d’assurance qui se garantiront de n’assurer que des personnes sans risques ?

La seule véritable façon d’arrêter cette procédure ainsi que toutes celles de mes camarades en bagarre en France et en outre-mer, victimes des mêmes attaques est de supprimer ou changer cette loi. Il faudra pour cela être des millions de personnes dans la rue, pour l’exiger ou bien que ceux qui les votent et les mettent en place, s’engagent à le faire, je parle bien entendu des politiques élus, c’est pour cela que nous avons fait appel à tous les présidentiables de 2012 de sensibilité de gauche. Presque tous ont répondu présents.

Le combat des Conti a été qualifié en France d’exemplaire par les travailleurs et les observateurs. Il a été aussi pour plusieurs raisons connu et inconnu de tous. Mais la raison suprême était que nous avons su au coude à coude créer un front commun avec nos ressemblances et surtout nos différences, même parfois de taille.

Amiens, 4 janvier 2011. Xavier Mathieu.
Déclaration avant son entrée au tribunal lors du procès en appel pour son refus de donner son ADN

Transcrite par linter.over-blog.com
linter estime que cette déclaration est exemplaire. Nous en avons fait la transcription à partir de la vidéo de Mourad Laffitte, dont nous redonnons le lien ici. Elle est de grande qualité à la fois politique et sensible.
http://www.dailymotion.com/video/xn...


Voir aussi Mille Bâbords 19614
Vidéo de l’interview de M° Marie-Laure Dufresne-Castets (video)
qui a défendu notamment les "Conti" et parle ici de la lutte nécessaire contre les fichiers.


Communiqué Quartiers Nord/Quartiers Forts Marseille

Soutien aux Conti et à Xavier Mathieu

A nos camarades Conti nous adressons un salut fraternel, et nous souhaitons exprimer notre soutien total à Xavier Mathieu et à tous les militants syndicalistes, politiques et associatifs qui subissent le harcèlement judiciaire du gouvernement.

Dans nos quartiers populaires, qui sont devenus de véritables friches sociales, nous savons à quoi mènent les destructions d’emplois, les plans sociaux à répétition et la justice arbitraire. Cette justice qui comme le disent si bien les Conti, ne s’applique pas de la même manière aux uns et aux autres. Cette inégalité de traitement nous en partageons les conséquences, dans d’autres domaines de luttes sociales, mais il s’agit toujours de la même logique de déshumanisation sociétale et de maximisation des profits. Tenez bon, dans les quartiers aussi la lutte des Conti résonne.

Quartiers Nord/Quartiers Forts

Marseille, le 4 Janvier 2012


Mercredi 4 janvier 2012 - 22h49

Refus de prélèvement ADN - Compte rendu du procès de Xavier Mathieu (videos + photos)
de : Collectif Bellaciao

http://bellaciao.org/fr/spip.php?article123985

(...)

C’est Xavier Mathieu qui prenait la parole en dernier.

Visiblement amaigri, ému et plutôt affecté par tout ceci, (qu ’il nous a dit vivre comme un acharnement à son encontre), engagé et touchant, Xavier évoquait les thèmes suivants : Honneur. Dignité de l’homme. Parole donnée. Mémoire.

Il rappelait les luttes des Conti. La lutte pour la sauvegarde de leurs emplois, pour leur dignité, pour leurs familles. Leurs difficultés. Leur solidarité. Il évoquait comment ce licenciement massif avait brisé de nombreuses vies dans des familles entières. L’alcool, la drogue, les antidépresseurs, les divorces, le suicide même, pour de nombreux ouvriers de "Conti" désormais... Rappelait que sur 1100 travailleurs seulement 200 avaient à ce jour retrouvé un CDI. Il évoquait par exemple, comment, au moment de la conclusion du protocole de fin de conflit, toutes les poursuites de part et d’autres avaient été abandonnées sauf , de mauvaise foi, celle à leur encontre pour leur dérapage de colère à la sous-préfecture. Ou comment le gouvernement et la direction de Conti avaient manœuvré pour prononcer son autorisation de licenciement, la seule prononcée sur tous les représentants du personnel et syndicaux de l’usine.

"J’aurais aimé voir les dirigeants de Continental devant cette Cour. Le gouvernement l’avait pourtant promis, de poursuivre et punir ces patrons voyous...."

Il rappelait ensuite 39-45. Les fichages de Vichy. Fichages des juifs, des homosexuels, des tziganes, des communistes..."On sait comment ça s’est terminé ,tout ça. Comment peut-on oublier ça quand on parle de fichage génétique aujourd’hui ?".

Il insistait sur le fait que l’utilité sociale et pénale de tels fichages était elle-même très critiquable puisque lui-même n’avait pas été condamné pour l’affaire de la sous-préfecture sur la base d’analyses d’ADN mais sur la seule foi d’un reportage TV, et qu’un fichage ADN, s’il aurait permis de démontrer qu’il était bien sur les lieux alors, (ce qu’il n’a jamais caché ni nié), ne pouvait en aucun cas prouver la détérioration des biens donc, l’infraction !

Il rappelait enfin que son ADN, il le tenait de ses parents, qui s’étaient aimés. Parlant de sa petite-fille, née récemment, de ses grands-parents, de tous ces gens qui sont ses ancêtres, qui, à moment ou à un autre, avaient fabriqué et transmis cet ADN sur des générations, concluant "Monsieur le Président, jamais je ne donnerai mon ADN autrement que par amour".

Le délibéré de cette affaire a été fixé au 3 février prochain.

(Amiens)


Pour exiger :

- La fin du harcèlement judiciaire contre les salariés de Continental et tous ceux qui défendent leurs droits et refusent les diktats patronaux.

- La reconnaissance du jugement de relaxe prononcé par le tribunal de Compiègne en faveur de Xavier Mathieu, la fin des poursuites pour refus du prélèvement ADN et l’assimilation de l’action revendicative à un délit.

Le mercredi 4 janvier 2012 à 13h30 se tiendra à la Cour d’appel d’Amiens le procès pour juger Xavier Mathieu, qui avait été pourtant relaxé par le tribunal de Compiègne, pour avoir refusé le prélèvement ADN suite à la simple amende à laquelle il avait été condamné, comme cinq autres travailleurs de Continental, pour leur participation à la manifestation contre la fermeture de l’usine de Clairoix, à la sous-préfecture de Compiègne en avril 2009.

Oui, il s’agit bien d’un acharnement de la part du gouvernement et de ses représentants pour continuer, plus deux ans après la fin du conflit Continental, les poursuites judicaires contre ceux qui ont eu l’audace de lutter contre les 1113 licenciements annoncés par un groupe multi-milliardaire.

Le gouvernement n’a toujours pas digéré que les travailleurs aient fait front à la coalition d’un grand industriel, Continental, et l’Etat, en les obligeant à lâcher certaines garanties.

Pendant des mois le gouvernement a poursuivi 7 salariés en demandant des peines de prison à leur encontre pour leur participation à une manifestation, en demandant des dommages intérêts astronomiques. Le pouvoir a été désavoué par la justice. L’un d’entre eux a été relaxé et pour les six autres cela s’est réduit à une amende minime de principe, tout comme les remboursements ramenés à quasiment rien. Cela grâce à la mobilisation et au soutien de milliers de travailleurs.

Mais le gouvernement n’a pas lâché. Il a entrepris de nouvelles poursuites contre Xavier Mathieu, un des porte-parole des travailleurs de Continental, dont le crime était d’avoir refusé de se faire prélever son ADN, parce que ni lui, ni ses camardes n’acceptaient d’être considérés comme des délinquants pour avoir défendu leur peau.

C’est exactement ce qu’a reconnu le tribunal de Compiègne. _ Il a relaxé Xavier Mathieu, en considérant que les manifestations des travailleurs pour défendre leurs droits, y compris celle à la sous-préfecture, ne pouvaient pas être assimilées à un délit. Et c’est ce que le gouvernement au service du patronat ne supporte pas. C’est pourquoi il a donné l’ordre de remettre en cause ce jugement et cette relaxe en demandant au parquet de faire appel.

Il faut que cela cesse !

C’est pourquoi nous, salariés de Continental, appelons les travailleurs, les syndicats, partis, associations, attachés au respect des libertés individuelles et collectives à se joindre à la manifestation du 4 janvier à Amiens pour exiger la relaxe définitive de Xavier Mathieu et la fin du harcèlement judiciaire contre ceux qui défendent leurs droits.

Comité de lutte des travailleurs de Continental Clairoix

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