Une tribune pour les luttes

Note statistique de (re)cadrage sur la délinquance des mineurs

Laurent Mucchielli

Article mis en ligne le dimanche 8 novembre 2009

Voir l’article complet en PDF sur :

http://champpenal.revues.org/7053#article-7053

Plan

Préambule : données disponibles et rappel méthodologique

Premier constat : il n’est pas vrai que la délinquance des mineurs ne cesse d’augmenter tandis que celle des majeurs baisse

Deuxième constat : il n’est pas vrai que les mineurs délinquants sont « de plus en plus jeunes »

Troisième constat : il n’est pas vrai qu’il existe un problème grave et particulier avec les mineurs de moins de 13 ans

Quatrième constat : il n’est pas vrai que « Il y a 204 000 mineurs qui sont mis en cause pour des actes graves » ni que « Des mineurs délinquants, Arlette Chabot, c’est des violeurs, des gens qui commettent des enlèvements, des trafics de produits stupéfiants, qui brûlent des bus dans lesquels il y a des personnes »

Cinquième constat : il n’est pas vrai que les mineurs délinquants ne font l’objet que de mesures éducatives ni que les juges sont naturellement « laxistes »

Pour conclure


Le 15 avril 2008, la ministre de la Justice, Madame Dati, avait installé officiellement une « Commission chargée de formuler des propositions pour réformer l’ordonnance du 2 février 1945 sur l’enfance délinquante », dite Commission Varinard, qui doit rendre son rapport fin novembre 2008. _ Lors du discours d’inauguration, la ministre a justifié la création de cette commission par plusieurs arguments. L’un d’entre eux fait aujourd’hui consensus chez tous les professionnels et les observateurs : la nécessité de reconstruire un texte de loi clair et cohérent là où les magistrats utilisent actuellement un texte très compliqué, réformé à une trentaine de reprises depuis 1945. Mais ce « toilettage » ou cette « simplification » est bien loin d’être le seul enjeu de cette nouvelle réforme en préparation.
L’on peut même se demander si ce n’est pas un prétexte tant il s’agit surtout de durcir une fois encore le droit pénal des mineurs pour pouvoir condamner plus de jeunes, plus vite, plus tôt dans leur jeunesse et à des peines plus dures. On le sait, tel est l’air du temps depuis la fin des années 1990, et de nombreuses réformes de la justice des mineurs ont déjà eu lieu ces dernières années, qui allaient toutes dans le même sens. Notamment les lois Perben I en 2002 et Perben II en 2004, les deux lois sur la récidive en 2005 et 2007 ou encore la loi sur la prévention de la délinquance de 2007, dont certaines dispositions ne sont même pas encore entrées en vigueur… Pourquoi donc en rajouter encore ? La réponse est elle aussi toujours la même depuis plus de dix ans : la délinquance des mineurs serait un problème toujours plus grave (ce qui amènerait du reste assez logiquement à relativiser l’efficacité des lois). Cette aggravation permanente et continue serait un constat évident, indiscutable, prouvé par les chiffres.

(...)

Lire la suite sur http://champpenal.revues.org/7053#article-7053


Voir également :


Délinquance des mineurs : les contre-vérités de Brice Hortefeux

http://www.lemonde.fr/societe/artic...

Le ministre de l’intérieur, Brice Hortefeux, a "lancé l’idée d’un couvre-feu ciblé sur des mineurs délinquants" de moins de 13 ans, mardi 3 novembre. Directeur de recherche au CNRS, le sociologue Laurent Mucchielli, qui vient de publier, avec Véronique Le Goaziou, La Violence des jeunes en question (Champ social, octobre 2009), commente les principaux arguments avancés par M. Hortefeux.

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Vos commentaires

  • Le 11 novembre 2009 à 10:47, par Christiane En réponse à : NON AU COUVRE-FEU POUR LES ENFANTS !

    Le ministre de l’Intérieur vient de remettre au goût du jour le couvre-feu pour les mineurs.
    Vieux serpent de mer qui ressurgit dans les périodes sensibles, notamment électorales. Cette fois ci, il pourrait être appliqué aux mineurs de moins de treize ans ayant commis un délit.

    Sur quels faits se base-t-il ?
    Sur une augmentation de la délinquance qui serait de plus en plus jeune et de plus en plus violente. Cette vague toucherait aujourd’hui les jeunes filles. Il se base aussi sur l’existence de bandes organisées où les mineurs prendraient de plus en plus de place.

    Rappelons que les chiffres mis en avant sont régulièrement contestés par les spécialistes de cette question. Rappelons aussi que la réalité des bandes surtout lorsque des adolescents sont impliqués, est mouvante et aléatoire en raison justement des caractéristiques de l’adolescence qui conduisent à des regroupements circonstanciels et d’identification.

    Ainsi, une fois de plus, ce gouvernement se livre à des amalgames d’autant plus scandaleux qu’ils concernent des enfants dont, par ailleurs, une proportion minime commet des délits.

    Si des enfants commettent des délits ou sont livrés à eux-mêmes, c’est parce que leurs familles sont confrontées à de graves difficultés. Le plus souvent, ces difficultés sont liées à la précarité, à l’exclusion économique et sociale, à l’enclavement de certains quartiers, de certaines villes. Elles produisent des dysfonctionnements et des désordres familiaux dans lesquels les parents se débattent, sans pouvoir toujours faire face à l’éducation de leurs enfants.
    Face à des problèmes aussi complexes qui nécessiteraient avant tout des dispositifs ambitieux de prévention et d’éducation, un couvre-feu est une mesure totalement inefficace.
    Par ailleurs, comment les policiers pourront-ils détecter que ces enfants, dehors, à la nuit tombée, ont commis un délit ? Et est-ce à dire qu’on ne s’intéresserait pas aux enfants qui n’ont pas commis de délit ? Par cette simple incongruité, on voit bien que c’est le souci de maintien de l’ordre qui prévaut sur celui de la protection.

    En fait de mesure simple, comme l’a souligné le ministre, c’est une mesure simpliste. Elle n’en est pas moins extrêmement dangereuse car elle perpétue l’idée que ces enfants ne sont plus des enfants mais des mineurs dangereux à l’égard desquels des mesures d’exception devraient s’appliquer.
    Au lieu de nourrir la peur de la société vis-à-vis de ses enfants, le gouvernement gagnerait en respectabilité s’il s’employait à tout mettre en œuvre pour éviter leurs dérives.

    Après le retour du fichier EDVIGE qui prévoit le fichage d’adolescents de 13 ans, voici le couvre-feu pour les enfants de moins de 13 ans !
    Alors que dans les prochains mois un projet de Code de Justice Pénale des Mineurs va être présenté à l’Assemblée Nationale, cette réactivation de la délinquance juvénile comme thème électoraliste ne peut que laisser présager un projet des plus répressifs.

    Le SNPES-PJJ/FSU le combattra, comme il dénonce aujourd’hui le projet hautement démagogique du couvre feu pour les mineurs de moins de treize ans.

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