Une tribune pour les luttes

Lettre ouverte

RESF répond (négativement !) à l’invitation d’Hortefeux...

+ Communiqué du 20 décembre 2010 : Un antidote à Hortefeux pour les "orphelins de Noêl "

Article mis en ligne le vendredi 24 décembre 2010

FÊTES DE NOËL : « MONSIEUR HORTEFEUX, DESSINE-MOI UN PAPA ! »

http://www.educationsansfrontieres.org/article33214.html

UN ANTIDOTE A HORTEFEUX

Un événement important s’est produit le 20 décembre 2010 en début de soirée dans un local obscur au fond d’une impasse parisienne. Deux députées (Martine Billard et Sandrine Mazetier), deux sénatrices (Dominique Voynet et Alima Boumediene-Thiery), une députée européenne (Karima Delli), le porte-parole d’un parti (Olivier Besancenot et son fils), un dirigeant de parti (Mehdi Ouraoui), le maire d’un arrondissement parisien (Jacques Boutault), trois élus municipaux de Paris (Danielle Simonnet, Claire Grover et Ian Brossat), un magistrat (Serge Portelli) se sont rassemblés autour de quelques familles pour que les enfants aient un vrai Noel.

Même si tous les enfants ne le savaient pas, tous étaient des « orphelins de Noel » potentiels. Leur mère ou bien plus fréquemment leur père avait été arrêté et placé en rétention au cours des toutes dernières semaines. Beaucoup ont été libérés par le juge des libertés et de la détention. Mais trois pères restent encore emprisonnés.

Miraculé de la dernière heure, Darios Kutche, libéré par le JLD de Meaux aujourd’hui même dans l’après-midi est arrivé en droite ligne du CRA où il avait été emprisonné 16 jours.

C’est dire qu’il ne s’agissait pas d’un goûter ordinaire. Mais d’un vrai geste de solidarité désintéressé et engagé de personnes qui ont un peu de pouvoir et/ou d’influence à l’égard des familles sans papiers que le gouvernement pourchasse.

Cérémonie ordonnée par un monumental Père Noël plus vrai que nature et digne de convaincre de sa réalité les plus sceptiques, cadeaux donnés par ceux dont on voit la photo dans le journal mettant leur notoriété au service de mômes et de familles anonymes et maltraitées. De vrais moments de partage et d’émotion sincère.

L’objectif initial de l’opération était de médiatiser la situation des « Orphelins de Noël » créés par l’entêtement de M. Hortefeux à atteindre ses chiffres d’expulsion. L’expérience a montré que l’alchimie née de ces situations allait bien au-delà.

Une soirée où la joie, le regard et l’émotion des enfants ont éclairé un moment la vie des pères et des mères et montré à tous que le père Noel n’est pas nécessairement une ordure sarkozyste pas plus que la population de ce pays, et que des gens « importants » peuvent prendre de leur temps, sans frime (et, hélas, sans caméras), pour faire avancer des causes justes.

Pour autant, naturellement, tout n’est pas résolu. Il reste trois pères en rétention, sept enfants menacés de devenir quasi-orphelins. Il faut que le récidiviste en charge de la Chasse à l’enfant, de la Rafle et du drapeau lâche l’affaire et les libère avant Noël. On continue.

Communique_RESF_Arbre-Noel-Orphelins


Le 17 décembre 2010

Monsieur le Ministre,

Monsieur le Ministre, vous avez souhaité rencontrer le Réseau Education Sans Frontières, RESF.

Le Réseau dans sa diversité aussi bien géographique que philosophique, politique, spirituelle, refuse de désigner en son sein quelques
représentants que ce soit pour venir au ministère.

Le gouvernement que vous servez et vous-même avez pris le parti d’une politique du rejet de l’étranger, non pas celle d’un accueil des
familles et des jeunes présents en France par la délivrance d’un titre de séjour pérenne, mais celle de l’expulsion à tout prix avec des objectifs
précis fixés préfecture par préfecture, prime de résultat à l’appui. Le nombre d’expulsions a été de plus en plus important d’une année sur
l’autre. Vous avez choisi de devenir ce que nous appellerons « ministre de la Rafle et du Drapeau », vous l’avez fait, avez-vous dit, «  sans
état d’âme
 ». Vous avez rempli vos objectifs.

Bien sûr, pour rassurer les bonnes consciences, vous avez dans le même temps affirmé que votre politique était « ferme mais humaine », vous
déclarant « fiers de nos valeurs », », de notre pays qui est à l’origine de la Déclaration des Droits de l‘Homme, qui a ratifié la Convention
européenne, la Convention internationale des droits de l’enfant. Ces grands textes qui défendent et protègent les droits fondamentaux de
chacun, quel qu’il soit, d’où qu’il soit, vous en usurpez le prestige dans le même temps que vous les bafouez en menant une politique qu’il
faut bien qualifier de xénophobie d’Etat.. La multitude de cas inhumains que vous avez assumés est trop longue pour qu’il soit possible d’en
faire la liste. Enfants en rétention, familles brisées par l’expulsion d’un ou de plusieurs des leurs, lycéens expulsés en cours d’études sont
hélas des démentis vivants et désespérants de vos paroles. Ni les expulsés, ni leurs proches, ni leur entourage, ceux qui les rencontrent tous
les jours à l’école, au travail, ne peuvent croire que ce soit cela une politique humaine. Ils savent en outre que vous avez été alerté sur chacun
de ces cas et que votre humanité ne s’est pas manifestée.

Après l’intermède de Monsieur Besson qui a poursuivi sans faiblir votre politique, vous retrouvez aujourd’hui la charge de l’immigration au
sein du ministère de l’Intérieur. Police et immigration ! Tout un programme. Après les évènements de cet été, les Roms, citoyens européens,
nommément désignés comme devant être chassés de leurs habitats précaires pour être expulsés, nous voyons bien que si votre politique s’est
modifiée, c’est pour le pire, le renforcement de la xénophobie et la banalisation de la plus grande brutalité en paroles et en actes. Nous n’en
prendrons qu’un seul exemple concret, celui d’Ardi, jeune garçon de 15 ans très lourdement handicapé, que la police est allée chercher dans
un centre de soins spécialisés et qui a été expulsé par le ministre Besson. Mais, à notre connaissance, vous n’envisagez pas son retour en
France, bien que l’état de santé de ce jeune se dégrade de jour en jour.

Vous allez défendre la loi concoctée par votre prédécesseur car, dites vous, « vous vous inscrivez dans ses pas ». Vous n’hésitez donc pas à
franchir un seuil très grave en restreignant très fortement le contrôle judiciaire sur l’administration. Ce projet de loi renforce les pouvoirs
arbitraires de l’administration au détriment de ceux du juge pourtant garant selon la Constitution des libertés individuelles. Il bafoue la
notion d’accès équitable à la justice garantie par la Convention européenne des droits de l’Homme. Il utilise le prétexte de directives
européennes pour banaliser et aggraver l’enfermement, il construit une société fondée sur la peur et le rejet de l’autre stigmatisant les
étrangers et les français d’origine étrangère.

Vous le savez déjà, et vous pouvez le constater tous les jours, RESF n’est pas d’accord avec la politique d’immigration que vous poursuivez
avec acharnement depuis de longues années. Vos protestations d’humanité, vos engagements ou ceux de Monsieur Besson sont constamment
démentis par vos actes. Que pourrions-nous donc nous dire ?

Fort de votre majorité au Parlement, vous allez faire passer une loi inique, vous expulsez chaque jour, mais vous le faites contre
l’assentiment d’une grande partie de la population de ce pays. Et nous, RESF, nous n’existons que parce que nous avons le soutien et l’aide
des citoyens ordinaires que votre politique révulse. Vous pouvez poursuivre des hommes et des femmes pour délit de solidarité, mais vous ne
pouvez pas en brider l’expression journalière. Vous refusez de l’entendre, mais tous ceux qui attendent la délivrance d’un titre de séjour par
décision administrative sont au coeur de la population, ils en font partie intégrante, ils sont des nôtres. Et si, nous qui avons des «  papiers »,
nous les défendons, c’est parce que nous défendons l’idée d’une société humaine, solidaire et juste, où les considérations pour les êtres
humains que nous sommes tous, sont premières et non pas secondaires.

Monsieur le ministre, votre politique est insoutenable car nous, citoyens, nous sommes nombreux, conjoints, enfants ou petits enfants de
migrants. Nous avons des conjoints, qui sont des migrants. Le président de la République lui-même est enfant de migrant. C’est cela la
population de la France aujourd’hui et vous n’y pouvez rien changer.

Nous voulons, quant à nous, que les jeunes de toutes origines puissent étudier, travailler, aimer, vivre leur vie sans craindre une expulsion qui anéantisse leur avenir, nous voulons que cessent la chasse aux « sans papiers », l’enfermement de parents et trop souvent d’enfants dans les centre de rétention, la négation quotidienne de droits fondamentaux comme l’asile, le logement, le travail, l’accès aux soins... Nous voulons que cessent les poursuites contre tous les militants de la solidarité et ceux qui dénoncent le caractère inhumain et régressif de votre politique.

C’est pour toutes ces raisons que nous ne donnerons pas suite à votre demande. Nous n’irons pas faire semblant d’être consultés alors que
votre politique, déjà tracée et bien connue, va à l’inverse de ce que nous réclamons.

Pour RESF : Mireille Peloux (RESF Rhône), Brigitte Wieser (RESF Paris), Jean-Michel Bavard (RESF Oise)

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