Aucun ouvrage n’avait jusqu’à présent réussi à restituer toute la profondeur et l’extension universelle des dynamiques indissociablement écologiques et anthropologiques qui se sont déployées au cours des dix millénaires ayant précédé notre ère, de l’émergence de l’agriculture à la formation des premiers centres urbains, puis des premiers États.
C’est ce tour de force que réalise avec un brio extraordinaire Homo domesticus. Servi par une érudition étourdissante, une plume agile et un sens aigu de la formule, ce livre démonte implacablement le grand récit de la naissance de l’État antique comme étape cruciale de la « civilisation » humaine.
Ce faisant, il nous offre une véritable écologie politique des formes primitives d’aménagement du territoire, de l’« autodomestication » paradoxale de l’animal humain, des dynamiques démographiques et épidémiologiques de la sédentarisation et des logiques de la servitude et de la guerre dans le monde antique.
Cette fresque omnivore et iconoclaste révolutionne nos connaissances sur l’évolution de l’humanité et sur ce que Rousseau appelait « l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes ».
La préface de cet ouvrage est rédigée par Jean-Paul Demoule, spécialiste du Néolithique et de l’âge du Fer, professeur émérite de protohistoire européenne à l’université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, et l’auteur d’une vingtaine d’ouvrages, parmi lesquels Mais où sont passés les Indo-Européens ? Aux origines du mythe de l’Occident et, avec Dominique Garcia et Alain Schnapp (dir.), Une histoire des civilisations. Comment l’archéologie bouleverse nos connaissances.
Recension du Monde diplomatique :
S’appuyant sur une vaste documentation archéologique, James C. Scott construit, à l’opposé de la conception traditionnelle de la « civilisation », un récit proposant une lecture critique de la naissance des premières cités-États. Il interroge la domestication des plantes, des animaux et de l’homme même. Si les débuts de l’agriculture et de l’élevage sont bien antérieurs aux premières cités, celles-ci se construisent en lien étroit avec la culture céréalière : la prévisibilité des récoltes permet la constitution d’un appareil administratif, encadrant les hommes et leurs productions, pour en prélever une part. Confronté notamment aux épidémies induites par la promiscuité avec les espèces domestiquées, l’État recourt à la guerre et à l’esclavage pour conserver une main-d’œuvre suffisante à la production d’excédents. Et génère de nouveaux modes de vie, un milieu dont l’aménagement suscite « un appauvrissement de la sensibilité et du savoir pratique de notre espèce face au monde naturel ». La préface de Jean-Paul Demoule situe avec clarté l’ouvrage dans le courant de l’« anthropologie anarchiste » (David Graeber…).
James SCOTT "Homo Domesticus, une histoire profonde des premiers états"
Editions la Découverte, 23 euros
Cet ouvrage est disponible à la Médiathèque de Mille Babords

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