Une tribune pour les luttes

Semaine du 21 février et de l’ouverture de la semaine contre le colonialisme

Guyane, Mayotte : pour maintenir la domination coloniale.

Alain Castan

Article mis en ligne le vendredi 24 février 2012

http://www.internationalistes13.org...

En cette semaine du 21 février et de l’ouverture de la semaine contre le colonialisme, il est bon de rappeler que l’impérialisme français ne se manifeste pas seulement par ses interventions militaires ou le néo-colonialisme dans ses anciennes colonies. Il perpétue également une forme plus directe de domination dans ses dernières colonies du Pacifique, de l’Océan indien, des Caraïbes ou de l’Amérique du Sud. C’est ainsi qu’il espère maintenir ses Intérêts économiques et stratégiques, et l’illusion d’une « France forte », d’un Empire s’étendant sur les 5 continents.

Tous les moyens sont bons, la carotte parfois, mais plus souvent le bâton : violation du droit international, bases militaires, répression policière, justice aux ordres, mesures d’exceptions, le droit commun de la Métropole ne s’y applique pas intégralement. Mais la meilleure des armes, là-bas comme ici, c’est encore la division. Pour cela quoi de mieux que les mesures contre immigrés en général, les sans-papiers, en particulier, instaurées en France et en Europe. Surtout lorsqu’on peut se permettre d’aller encore plus loin en toute impunité et sans rappel à l’ordre de la part d’une justice coloniale aux ordres.

En Guyane, par exemple, les autorités françaises tentent d’accréditer l’idée que les conditions de vie, la sécurité, de la population guyanaise seraient directement menacées par l’arrivée en masse de clandestins venus profité des "avantages" dont bénéficie cette population directement issue de la colonisation (créoles, noirs marrons descendants d’esclaves révoltés, survivants du bagne, métropolitains, H’mongs du Laos « importés » en 1977, en tout près de 80 origines différentes). Le peuple premier quant à lui, les Amérindiens, auxquels on refuse les droits à la propriété collective de leurs terres sur lesquelles ils étaient autrefois souverains, ne représente plus que 4% de la population.

Pour distiller la peur le gouvernement français manipule les chiffres en mélangeant allègrement sans-papiers, étrangers en situation régulière, français d’origine étrangère.

La France a mis en place dans ce département une législation d’exception locale particulièrement complexe : contrôles d’identités, inspection des véhicules, barrages routiers, destruction des bateaux transportant des étrangers en situation irrégulière et enfin, la possibilité d’expulser un étranger qui a contesté l’expulsion au tribunal administratif avant même que le tribunal ait statué. La Guyane peut ainsi se "vanter" d’expulser plus que tout autre département (exception faite de Mayotte), environ 9 000 expulsions par an contre 29 000 pour toute la métropole, une progression de 77,85 % entre 2004 et 2010.

Mais c’est à Mayotte, où la France maintient une base navale importante lui permettant de participer au contrôle du trafic dans le Canal de Mozambique et l’Océan indien, que cette politique atteint des sommets depuis l’instauration du visa Balladur en 1995. Ainsi, les Comoriens non originaires de Mayotte sont devenus des immigrés clandestins, objets d’expéditions punitives, de rafles, suivies d’expulsions abusives et au mieux taillables et corvéables à merci. La poursuite en mer des kwassa kwassa, ces barques légères transportant celles et ceux qui tentent de venir ou de revenir vers Mayotte, est directement responsable de la mort de plus de 10 000 personnes. C’est la conséquence de l’occupation illégale par la France, depuis 1974, de Mayotte, devenu en 2011 un département français, en violation du droit international et des résolutions de l’ONU. Dans cette île d’environ 200 000 habitants, en 2010 plus de 26 000 « clandestins » dont près de 6 000 enfants, ont été expulsés, soit presque autant que pour la métropole (29 000) avec une augmentation de 137,57 % depuis 2004 ! Le Préfet y dispose de pouvoirs exceptionnels notamment celui de renvoyer en métropole tout fonctionnaire récalcitrant c’est ce que viennent de vérifier le porte-parole local du SNES et le représentant de RESF.

Mais cela n’a qu’un temps. Le mouvement social sans précédent qu’ a connu Mayotte cet automne a rapproché les Mahorais et les « sans-papiers » comoriens tous unis contre la misère et le mépris.

Alain Castan

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