Une tribune pour les luttes

Centre social AGORA, CSF - sections Busserine, St Barthélémy III et Flamants Iris, CLCV Picon Busserine

Lettre ouverte à propos du retrait des associations du projet « quartiers créatifs » du Grand St Barthélemy

Conférence de presse Vendredi 16 Novembre, 16h Centre social AGORA 34, rue de la Busserine, 13014 Marseille.
+ Projection/débat avec les habitants de la CSF Busserine et de la CLCV Picon Busserine à propos des dégâts de l’ANRU. .

Article mis en ligne le mercredi 14 novembre 2012

Bonjour,

Depuis bientôt deux semaines, nos associations (centre social AGORA, CSF - sections Busserine, St Barthélémy III et Flamants Iris, CLCV Picon Busserine) ont adopté une position de retrait du projet "quartiers créatifs" organisé dans le cadre de Marseille Provence 2013. Par courriel, nous en avons informé les différents acteurs du projet, à ce jour sans suite officielle.

Nous publions aujourd’hui un courrier plus complet, adressé aux ministères de la Culture, de la Ville, au GIP MRU et à MP2013 pour préciser notre positionnement et faire d’autres propositions. (voir pièce jointe)

En cause, le fait que ce projet, plutôt que de profiter au développement économique, urbain et culturel de nos quartiers, ne réponds qu’à une logique d’affichage, de "faire vitrine" au projet de rénovation urbaine qui entraîne de nombreux conflits avec le GIP MRU. M. Raoust (MP2013) le résumait bien en expliquant le 1er Octobre, lors d’une réunion publique du GIP MRU, que le financement de celui ci au projet existait pour palier au manque de concertation. Cette déclaration, ainsi que l’imposition (une nouvelle fois) d’un projet venu d’en haut -sans concertation-, l’asphyxie financière de nos associations à qui on demande de se "mobiliser" sur un projet que l’on ne nous a pas proposé de co-concevoir et le mépris régulier affiché par ces institutions, nous a amené à nous retirer et à faire de nouvelles propositions.

Mme Filipetti, ministre de la Culture, sera ce vendredi à Marseille pour vanter MP2013. Pourtant, le constat est là : nos quartiers sont laissés de côté lors de cette "année capitale", voire une nouvelle fois méprisés. Les 420 000€ investis ne peuvent se faire sans la participation des habitants et de nos associations et ceci n’est possible qu’à condition que la démocratie soit enfin respectée et que l’on sorte des logique "occupationnelles" pour obtenir un véritable développement de nos quartiers, au niveau économique, urbain et culturel. Ce sont ces sujets que nous souhaitons discuter publiquement lors d’une conférence de presse au Centre Social AGORA (34 rue de la Busserine, 13014 Marseille) ce vendredi 16 Novembre à 16h.

Après la conférence de presse, vous pourrez également assister à une projection/débat avec les habitants de la CSF Busserine et de la CLCV Picon Busserine lors de laquelle un reportage à propos des dégâts de l’ANRU (Agence Nationale de Rénovation Urbaine) sera projeté.


ANRU/Picon-Busserine : rappel important sur les 16 et 17 Novembre

Le vendredi 16 Novembre, à 17h au centre social l’AGORA (34 rue de la Busserine), nous projetterons un nouvel épisode de notre reportage à propos des dégâts de l’ANRU, en présence des habitants. ( le 1er épisode http://anru-marseille.net/2012/03/01/arnaque-nationale-et-resistance-urbaine-le-reportage/ ). Ce sera l’occasion pour nous de débattre une nouvelle fois de la situation de conflit avec le bailleur LOGIREM et les pouvoirs publics. Après un an et demi de lutte, ceux ci restent inactifs quant aux conditions de relogement des habitants et de la concertation.

A 16h, même jour, même lieu, nous serons également avec le centre social AGORA, la CSF St Barthélémy III et la CSF Flamants, pour préciser notre position de retrait du projet quartiers créatifs porté par Marseille Provence 2013 alors que le jour même Mme Filipetti sera à Marseille pour vanter "l’année capitale"


Le lendemain, enfin, nous serons présents, avec le collectif inter quartiers pour un rassemblement fondateur qui nous permettra d’unir les voix de nombreuses associations des quartiers populaires de Marseille face au mépris des bailleurs et des institutions. Rendez vous à 16h devant le World Trade Center . 


Lettre ouverte des associations :
CSF Busserine-LOGIREM
CSF Flamants-Iris
CSF St Barthélemy III
CLCV Picon-Busserine
Centre social AGORA

Objet : Retrait de nos associations du projet « quartiers créatifs » du Grand St
Barthélemy

Marseille, le 13 Novembre 2012

Lettre recommandée avec accusé de réception :
Mme Filipetti, Ministre de la Culture
M. Lamy, Ministre de la Ville
M. Chougnet, directeur général de Marseille Provence 2013
M. Pfister, président du CA de Marseille Provence 2013
Mme Boyer, présidente du GIP MRU
M. Binet, directeur du GIP MRU

Copie à (courriel) :
les élus, acteurs associatifs et artistes concernés par le PRU Picon-Busserine et le projet « quartiers
créatifs » du Grand St Barthélemy

Mesdames, Messieurs,

Nous vous adressons collectivement ce courrier, une semaine après le courriel transmis en
notre nom par Mme Zara Berriche, afin d’expliquer plus clairement les raisons de notre retrait du
projet « quartiers créatifs-jardins possibles » et d’avancer de nouvelles propositions quant à un
projet culturel pérenne et économiquement profitable aux habitants et aux associations sur notre
territoire.

Vous l’aurez compris, la déclaration de M. Raoust, (un des représentants de l’équipe actions
de participation citoyenne de Marseille Provence capitale européenne de la culture) le 1er Octobre
2012, lors de la réunion publique du GIP-MRU a fait boule de neige. Les 30000€ de financements
du GIP MRU et GIP Politique de la Ville dans le projet « jardins possibles » porté par Marseille
Provence 2013 « car la concertation était mal en point » sont un nouvel exemple des arbitrages
politiques méprisants, incessamment à l’œuvre. MP2013 a depuis fait mine de ne vouloir que
« mettre en valeur » et « questionner » les profonds changements urbains que connaît notre ville
mais pourtant les faits sont là : l’ensemble des projets « quartiers créatifs » mis en œuvre à Marseille
se font sur les 14 quartiers concernés par la rénovation urbaine. Il est clair pour nous que ceux-ci
font office de vitrine culturelle à des projets rejetés sur de nombreux aspects par les habitants et
sources de conflits qui prennent une racine bien profonde dans l’histoire des dominations sociales et
postcoloniales que nos quartiers connaissent. Cette déclaration « Mal dite » ou « anodine » selon
vous, mais lourdement porteuse de sens pour nos associations. « La goutte qui fait déborder le
vase », pourrions nous dire, si le vase n’avait débordé depuis déjà bien longtemps. Le mépris
institutionnel -et institutionnalisé- dont nos associations et les habitants du Grand Saint Barthélemy
sont l’objet depuis des décennies a une fois de plus trouvé ici l’entrée « culturelle ».

Soyons clairs dès le départ : nous ne nous laisserons pas catégoriser comme des
« contestataires vides de propositions ». Nous conclurons donc cette lettre par des propositions
concrètes qui permettraient de ne pas faire disparaître les 422 574€ de subventions allouées, comme
nous l’avons toujours fait lorsque la situation le permettait. Nous tenons également à préciser qu’en
aucun cas nous ne souhaitons porter préjudice à qui que ce soit, mais, nous attendions plus de
respect et de transparence de collaboration de la part des structures culturelles et artistiques qui se
sont désignées porteuses et opératrices de ce « quartier créatif ». Nous tenons bien interpeller les
institutions qui financent et orientent politiquement celui ci, c’est à dire le GIP-MRU et GIP
Politique de la Ville, Marseille Provence 2013 et au delà, la Mairie, les collectivités et les ministères
concernés.

Le 1er Octobre, au Centre d’Animation Busserine, le silence de M. Flavigny, chef de projet
chez MRU était éloquent suite à la déclaration de M. Raoust. Revenons d’abord sur ce sujet : nos
associations luttent depuis de nombreuses années pour faire respecter les droits des locataires des
quartiers de Picon, Busserine, St Barthélémy 3 et Flamants-Iris dans le cadre des projets de
rénovations urbaines qui leurs sont imposés. Après de nombreuses batailles, un semblant de
méthode commune a pu voir le jour sur Picon/Busserine/St Barthélémy 3, à travers les ballades
urbaines, ce qui bien évidemment n’a pas été présenté tel quel lors de la réunion du 1er Octobre, M.
Flavigny les présentant comme une démarche purement volontaire du GIP-MRU. Ensuite, il faut,
nous pensons, recontextualiser ces 30000€ : ils seraient distribués afin de faire un « montage
financier » permettant d’obtenir des subventions européennes, soit. Mais comment se fait-il que
depuis des années nos associations n’ont pas l’ombre d’un dixième de cet argent pour financer leurs
fonctionnements ? Comment se fait-il que de nombreux projets culturels se voient refusés chaque
année ? Non, nous ne jouerons pas dans les schémas de divisions qui nous sont imposés en
demandant le retrait de ces subventions, ce n’est pas notre problème.

Notre seul problème est un
problème d’égalité, de justice quant à l’utilisation de l’argent public, c’est à dire de notre argent !
Nous réclamons, comme nous le faisons depuis de nombreuses années, qu’une somme au moins
aussi importante soit allouée pour le fonctionnement des associations.
Comment osez-vous ensuite
nous demander en permanence de « mobiliser les habitants » et de « participer » alors que ce sont
vos institutions et celles qui vous financent qui organisent l’asphyxie financière de nos structures
ainsi que les conflits qui saturent notre activité ? Car oui, nous défendons l’accès à la culture pour
tous, mais celui ci n’est possible qu’avec un minimum de stabilité économique.

Une fois le contexte posé, venons en au projet en lui même et avant tout à sa conception, aux
principes qui le régissent. Nous n’aborderons pas ici un débat « événementiel », réduisant l’affaire à
des arguments ponctuels, datés et pauvres si l’objet du débat est de comprendre les logiques à
l’œuvre. Si chacun peut avoir son avis sur l’utilité du jardinage comme activité artistique, le débat
n’a, avouez le, jamais été posé. Sans préjuger de la conclusion qu’aurait pu avoir un tel débat, il
aurait été, dès l’origine, bien plus efficace et juste de venir décider avec les habitants et leurs
associations du cadre que pourrait avoir un projet labellisé MP2013. Pensiez vous peut être que
nous n’étions pas capables de penser l’art et la culture ? Pensiez vous peut être qu’il fallait
nécessairement poser, ou plutôt imposer, un cadre dans lequel vous nous demandez aujourd’hui de
« participer » ? Non, messieurs, mesdames, nous ne pouvons plus accepter de telles méthodes
méprisantes. Les habitants de nos quartiers sont eux même capables, si on leur en donne les
moyens, de penser l’art et la culture. Nous sommes capables de proposer, d’organiser, de produire et
pas seulement de nous placer comme des acteurs marginaux, que ni MP2013, ni MRU, ni Le
Merlan scène nationale, opérateurs du projet, ne prennent même pas le temps de citer dans leurs
espaces d’information-communication officiels. Nous ne sommes bien évidemment pas opposés,
bien au contraire, à ce que des acteurs extérieurs interviennent à nos côtés dans le montage de tels
projets. Leur aide est la bienvenue, à condition qu’ils ne deviennent pas des missionnaires malgré
eux, de politiques publiques d’assistanat, parachutées et qui sont de l’ordre de l’occupationnel. Un
projet « participatif » ne peut l’être, alors que ses contours sont eux même prédéfinis et verrouillés.

Nous en arrivons ici au second point de critique de l’orientation politique donnée au projet
« quartier créatif ». Le caractère « éphémère » du jardin aménagé sur le terrain du P est depuis un
long moment l’objet de déception de la part des habitants et des associations. Par cet impératif dû à
la future utilisation du terrain du P comme zone de stockage pendant les travaux de la L2, la
politique de MP2013 trouve son caractère « occupationnel », étant destinée à mener une activité à
court terme, ne permettant pas de favoriser le développement des espaces publics par et pour les
habitants. Cela est bien dommage, d’autant plus que le budget investi est relativement
impressionnant.

Enfin, et ce sera le troisième point de critique (et momentanément (!) le dernier, car nous ne
pourrions être exhaustif dans un simple courrier), nous souhaitions revenir sur ce que nous
soulevions plus haut au sujet des associations : l’activité culturelle nous semble impossible dans une
situation d’instabilité et de précarité financière telle que la vivent nos associations mais surtout les
habitants de nos quartiers. 19 000€ ont été réservés dans le budget prévisionnel à l’embauche
d’habitants participants au projet, tant mieux. Cela est il suffisant ? Bien évidemment non ! Notre
positionnement est clair à ce sujet : aucun projet, qu’il s’agisse de la rénovation urbaine ou de projets
culturels, ne peuvent être développés sans s’inclure dans une dynamique de développement local
d’emplois pérennes. La « mobilisation » des habitants profite bien de la situation actuelle de
chômage de masse que nous connaissons, libérant ainsi du temps pour la « participation » au projet.
Pourtant, il aurait été possible et souhaitable, d’ouvrir de nouveaux financements afin de créer de
l’emploi et de la formation, conciliant ainsi développement économique et projet culturel.
Si vous nous aviez associé très en amont, en tant que réels partenaires, nous aurions défendus cette
part primordiale de la formation et de l’emploi, dans ce projet, puisqu’il prétendait faire lien avec le
PRU Picon-Busserine-St Barthélemy3.

Nous ne sommes pas prêts à cautionner toute action menée sur les territoires sur lesquels nous
vivons, travaillons, sans broncher, en simples spectateurs. Nous revendiquons d’être des acteurs à
part entière, et pas « des acteurs à part » des réalisations.

Vous aurez donc compris, nous l’espérons, les raisons de notre retrait du projet « quartier
créatif –jardins possibles » porté par MP2013. Vous comprendrez donc aisément les
propositions que nous soumettons au débat appuyé sur les principes suivants :
- Les 422 574€ sont de l’argent public.
- En partant de ce constat, il nous paraît nécessaire que tout projet (quel qu’il soit) soit réalisé
dans le cadre d’un partenariat associant habitants, associations, institutions publiques
financeurs et acteurs artistiques extérieurs.
- Afin de poser un cadre de confiance entre ces différents acteurs, il est nécessaire que le
budget complet et le schéma du partenariat soient définis ensemble dès le début,
- Que l’ensemble des partenaires soient systématiquement nommés et reconnus en tant que
tels.
- Chacune des associations mobilisées doit disposer au préalable de moyens financiers
suffisants pour mener à bien ses activités quotidiennes, d’autant plus lorsque l’un des
financeurs (ici, le GIP-MRU) est lui même la cause de la sur-activité de nos associations.
- Un budget suffisant doit être mis à disposition afin de développer l’emploi pérenne et la
formation des habitants.
- Ici, le montage d’un dispositif de ce type pourrait en préfigurer un autre à l’échelle des
opérations de rénovation urbaine.
- Il est absolument important de prendre la peine d’identifier les talents artistiques et culturels
de ce territoire et de leur faire la part belle durant cette année 2013 et après.
- La production finale doit pouvoir profiter de manière pérenne au quartier. Nous proposons
que la « pelouse cœur de Picon » soit choisie, permettant ainsi que la production artistique et
donc le travail des habitants et des artistes soient maintenus, contrairement à ce qu’il
adviendra sur le terrain du « P ».

Afin de discuter de ces propositions, nous prenons donc l’initiative d’inviter à une réunion
l’ensemble des financeurs (GIP Politique de la Ville, GIP MRU, MP2013 et les autres
structures opératrices) et des potentiels partenaires artistiques et associatifs qui pourraient
être intéressés par la conception d’un projet basé sur ces quelques principes. Nous vous
communiquerons bientôt la date de cette réunion.

Cordialement,

Les associations : CSF Busserine-LOGIREM, CSF Flamants-Iris, CSF St Barthélemy III,
CLCV Picon-Busserine, Centre social AGORA.

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