Une tribune pour les luttes

Espagne 1936, Ethiopie 2021 : la lutte contre le fascisme continue …

Article mis en ligne le jeudi 23 septembre 2021

[tract diffusé au Cimetière du camp de Concentration du vernet à l’occasion des journées du Patrimoine. Parce que la mémoire ne sert à rien si elle n’éclaire pas les luttes d’aujourd’hui …]

Il y a 80 ans, au camp de concentration du Vernet d’Ariège, mourrait Tecle HAGOS. La plaque sur sa tombe indique « 19 août 1941, Ethiopien ». On ne sait pas grand-chose de sa vie, si ce n’est qu’il faisait vraisemblablement partie d’un groupe d’une douzaine d’étudiants originaires de la Corne de l’Afrique, qui s’étaient rendus en Espagne à l’été 1936. L’annonce d’une Révolution, faite par des ouvriers et des paysans, des gens simples, qui avait triomphé du Fascisme le 19 juillet 1936 les avaient enthousiasmés, eux qui avaient vu ce même Fascisme s’emparer de leur terre en Afrique quelques mois auparavant.

Etaient-ils Amhara, Tigréen, Oromo, ou d’une autre ethnie éthiopienne ? Nous ne le savons pas et à vrai dire cela ne nous intéresse pas. Tecle Hagos et ses compagnons n’étaient pas venus donner leur jeunesse pour la Catalogne, l’Aragon ou l’Andalousie, ni même pour l’Espagne, mais ils sont venus pour débarrasser l’Humanité du Fascisme. Et aussi parce qu’ils partageaient avec les révolutionnaires espagnols une idée universelle : celle de la Liberté par l’Egalité et dans la Solidarité.

Là, dans cette corne de l’Europe, ces fils de la corne de l’Afrique avaient partagé les espoirs libertaires de ce peuple qui se mettait à rêver à voix haute. Ils en avaient aussi partagé les désillusions, une fois que les politiciens avaient repris leur pouvoir dans la République espagnole. Comme les anarchistes de la CNT-AIT et les militants du POUM, ils furent accusés sans preuve par les communistes de « trahison » et certains connurent eux-aussi la calomnie et les prisons républicaines …

Enfin ils partagèrent leurs drames, rejoignant la cohorte de ceux qui à l’hiver 39 prirent les chemins de l’exil à travers les Pyrénées … Ils connurent alors l’accueil par la République – française cette fois – qui les parqua comme des chiens dans des camps de concentration. Anarchistes espagnols, antifascistes éthiopiens ou italiens, allemands anti-nazis et juifs apatrides, toute cette humanité mélangée constituaient, aux yeux de la République et des « biens pensants », des « étrangers indésirables » pour reprendre le terme administratif, « la lie de la terre », pour reprendre l’expression de l’écrivain britannique Artur Koestler qui fut lui aussi interné au Vernet. C’est la canaille ? Et bien j’en suis disaient aussi les communards !

Aujourd’hui, l’Ethiopie est de nouveau en proie à la menace fasciste. Elle ne vient plus de l’étranger, comme en 1935. Le Premier Ministre éthiopien Abiy Ahmed, ironiquement titulaire du Prix Nobel de la Paix de 2019, rêve de rétablir l’Empire d’Ethiopie et mène actuellement une guerre d’anéantissement contre la province du Tigré, en jouant la carte de la différenciation ethnique. Enlèvement et torture des opposants, assassinats de masse, viols, utilisation de troupes mercenaires étrangères et de milices autochtones … les mêmes méthodes qu’utilisaient Franco et ses sbires en 1936 sont appliquées aujourd’hui en Ethiopie.

Ces horreurs feraient presque oublier que le parti au pouvoir au Tigré (le Front de libération du peuple du Tigré, TPLF) est usé, autoritaire et corrompu, et ne vaut guère mieux …

Pendant ce temps, l’ONU envoie des messages d’indignation contre les massacres et la famine organisée, aussi efficaces que ceux de la SDN en son temps. La Russie signe un accord militaire avec l’Ethiopie, la Turquie lui envoie des drones. Et la France a signé un accord de coopération militaire en 2019 … Il n’y aura pas de Brigades internationales pour le Tigré, ce conflit n’intéresse aucune parti car il n’y a pas de bénéfice électoral à faire en affichant sa solidarité avec une zone aride et pauvre

Rares sont ceux qui – tels nos compagnons des anarchistes de la corne d’Afrique – osent exprimer dans cette fureur de folie guerrière leur rêve d’un autre futur libertaire, enfin débarrassé des haines identitaires, en lançant un appel à tous les belligérants pour qu’ils déposent les armes.

Liberté et solidarité !

Amharic - Tigrinya - Bilisummaa fi obbolummaa (Afaan Oromo) - Xorriyad iyo midnimo (Somali)

(merci au Pr. Matthew.F.Delmont, du Dartmouth College, pour les articles du Chicago Defender)

Lire l’article : http://cnt-ait.info/2021/09/19/espagne-1936-ethiopie-2021/

P.-S.

CNT-AIT : contact chez cnt-ait.info

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