Une tribune pour les luttes

Afghanistan

Derrière le déclin des États-Unis, le déclin du monde capitaliste

Courant Communiste International

Article mis en ligne le lundi 20 septembre 2021

Le retrait précipité des forces américaines et occidentales d’Afghanistan est une manifestation éclatante de l’incapacité du capitalisme à offrir autre chose qu’une barbarie croissante. L’été 2021 avait déjà vu une accumulation d’événements interdépendants montrant que la planète entière est déjà dans une grave situation de crise : l’apparition de canicules et d’incendies incontrôlables de la côte ouest des États-Unis à la Sibérie, les inondations, les ravages continus de la pandémie de Covid-19 et la dislocation économique qu’elle a causée. Tout ceci est «  une révélation du niveau de putréfaction atteint au cours des trente dernières années  ». (1) En tant que marxistes, notre rôle n’est pas simplement de commenter ce chaos croissant mais d’analyser ses racines, qui se trouvent dans la crise historique du capitalisme, et de montrer les perspectives pour la classe ouvrière et l’humanité entière.

Le contexte historique des événements en Afghanistan

Les talibans sont présentés comme les ennemis de la civilisation, un danger pour les droits de l’homme et ceux des femmes, en particulier. Ils sont certes brutaux et animés d’une vision qui renvoie aux pires aspects du Moyen Âge. Cependant, ils ne sont pas une exception à l’époque dans laquelle nous vivons. Ils sont le produit d’un système social réactionnaire : le capitalisme décadent. En particulier, leur essor est une manifestation de la décomposition, stade final de la décadence du capitalisme.

La seconde moitié des années 1970 a vu une escalade de la guerre froide entre les blocs impérialistes américain et russe, les États-Unis installant des missiles de croisière en Europe occidentale et forçant l’URSS à s’engager dans une course aux armements qu’elle pouvait de moins en moins se permettre. Cependant, en 1979, l’un des piliers du bloc occidental au Moyen-Orient, l’Iran, s’est effondré dans le chaos. Toutes les tentatives des fractions les plus responsables de la bourgeoisie iranienne pour imposer l’ordre ont échoué et les éléments les plus arriérés du clergé ont profité de ce chaos pour prendre le pouvoir. Le nouveau régime a rompu avec le bloc occidental mais a également refusé de rejoindre le bloc russe. L’Iran a une longue frontière avec la Russie et avait donc joué un rôle clé dans la stratégie occidentale d’encerclement de l’URSS. Suite à cet effondrement, l’Iran est devenu un électron libre dans la région. Ce nouveau désordre a encouragé l’URSS à envahir l’Afghanistan lorsque l’Occident a tenté de renverser le régime pro-russe qu’elle avait réussi à installer à Kaboul en 1978. En envahissant l’Afghanistan, la Russie espérait pouvoir, à un stade ultérieur, accéder à l’océan Indien.

En Afghanistan, nous avons assisté à une terrible explosion de barbarie militaire. L’URSS a déchaîné toute la puissance de son arsenal sur les moudjahidines («  combattants de la liberté  ») et la population en général. De l’autre côté, le bloc américain a armé, financé et entraîné les moudjahidines et les chefs de guerre afghans opposés aux Russes. Parmi eux figuraient de nombreux fondamentalistes islamiques ainsi qu’un afflux croissant de djihadistes venus du monde entier. Les États-Unis et leurs alliés ont enseigné à ces «  combattants de la liberté  » tous les arts de la terreur et de la guerre. Cette guerre pour la «  liberté  » a tué entre 500 000 et 2 millions de personnes et a laissé le pays dévasté. Elle a également été le berceau d’une forme plus globale de terrorisme islamique, caractérisée par l’ascension de Ben Laden et d’Al-Qaida.

Dans le même temps, les États-Unis ont poussé l’Irak dans une guerre de huit ans contre l’Iran, au cours de laquelle environ 1,4 million de personnes ont été massacrées. Alors que la Russie s’épuisait en Afghanistan, ce qui a fortement contribué à l’effondrement du bloc russe en 1989, et que l’Iran et l’Irak étaient entraînés dans la spirale de la guerre, la dynamique dans la région a montré que la transformation de l’Iran en un État «  voyou  » était l’une des premières indications que les contradictions croissantes du capitalisme commençaient à saper la capacité des grandes puissances à imposer leur autorité dans différentes régions de la planète. Derrière cette tendance se cachait quelque chose de plus profond : l’incapacité de la classe dirigeante à imposer sa «  solution  » à la crise du système (une autre guerre mondiale) à une classe ouvrière mondiale qui avait montré son refus de se sacrifier au nom du capitalisme dans une série de luttes entre 1968 et la fin des années 1980, sans toutefois être capable de proposer une alternative révolutionnaire au capitalisme. En somme, l’impasse entre les deux grandes classes a déterminé l’entrée du capitalisme dans sa phase finale, celle de la décomposition, caractérisée, au niveau impérialiste, par la fin du système des deux blocs et l’accélération du «  chacun pour soi  ».

L’Afghanistan au cœur du chacun pour soi impérialiste

Dans les années 1990, après le départ des Russes d’Afghanistan, les seigneurs de guerre victorieux se sont retournés les uns contre les autres, utilisant toutes les armes et les connaissances de la guerre que l’Occident leur avait données pour contrôler les ruines. Les massacres, les destructions et les viols massifs ont détruit le peu de cohésion sociale que la guerre avait laissé.

L’impact social de cette guerre ne s’est pas limité à l’Afghanistan. Le fléau de l’héroïnomanie qui a explosé à partir des années 1980, apportant misère et mort dans le monde entier, est l’une des conséquences directes de la guerre. Pour financer la guerre de l’opposition aux talibans, l’Occident l’a encouragée à cultiver l’opium. L’impitoyable fanatisme religieux des talibans est donc le fruit de décennies de barbarie. Ils ont également été manipulés par le Pakistan, ce pays essayant d’imposer un certain ordre à ses portes.

L’invasion américaine de 2001, lancée sous le prétexte de se débarrasser d’Al-Quida et des talibans, ainsi que l’invasion de l’Irak en 2003, ont été des tentatives de l’impérialisme américain d’imposer son autorité face aux conséquences de son déclin. Ce dernier a tenté d’amener les autres puissances, notamment les Européens, à agir en réponse à l’attaque contre l’un de ses membres. À l’exception du Royaume-Uni, toutes les autres puissances se sont alors montrées réservées face à ce projet. En effet, l’Allemagne s’était déjà engagée dans une nouvelle voie «  indépendante  » au début des années 1990, en soutenant la sécession de la Croatie qui, à son tour, avait provoqué l’horrible massacre des Balkans. Au cours des deux décennies suivantes, les rivaux de l’Amérique se sont enhardis en voyant les États-Unis s’embourber dans des guerres ingagnables en Afghanistan, en Irak et en Syrie.

Lire la suite : https://fr.internationalism.org/content/10529/derriere-declin-des-etats-unis-declin-du-monde-capitaliste

CCI, 22 août 2021

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