Les points clés de la résolution.
La résolution votée à l’unanimité du conseil de sécurité de l’ONU (document joint) porte les points suivants :
Elle demande une "cessation totale des hostilités" basée sur "la cessation immédiate par le Hezbollah de toutes les attaques et la cessation immédiate par Israël de toutes les offensives militaires".
Elle demande à l’armée libanaise de se déployer dans le sud du pays (Beyrouth a prévu de déployer 15.000 hommes ) et demande à Israël de "retirer en parallèle toutes ses forces du Sud Liban".
Elle renforce les effectifs et le mandat de la FINUL(Force intérimaire des Nations unies au Liban) qui va passer de 2.000 à un maximum de 15.000 casques bleus. La FINUL, dont le mandat est prorogé jusqu’au 31 août 2007, devra notamment "contrôler la cessation des hostilités" et aider le gouvernement libanais à sécuriser ses frontières et exercer son autorité sur l’ensemble de son territoire. Elle est pour cela autorisée à "prendre toutes les mesures nécessaires" dans les secteurs où elle est déployée
Elle appelle Israël et le Liban à appuyer un "cessez-le-feu permanent" et à trouver une "solution à long terme" fondée sur les principes suivants :
- "Strict respect" de la Ligne bleue définie par l’ONU entre Israël et le Liban
- Mise en place d’une zone tampon entre cette Ligne bleue et le fleuve Litani d’où les milices seront absentes et où seules seraient déployées l’armée libanaise et la FINUL
- "Désarmement de tous les groupes armés au Liban", notamment le Hezbollah, et interdiction de toute vente d’armes à "toute entité ou individu" sans l’autorisation du gouvernement libanais
Elle demande au secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, de présenter dans un délai de 30 jours des propositions pour le désarmement des milices libanaises et la délimitation des frontières là où « elle est contestée ou incertaine », notamment dans le secteur des fermes de Chebaa, à la frontière entre Israël, la Syrie et le Liban.
Elle souligne qu’il faut obtenir "la libération inconditionnelle des soldats israéliens enlevés" par le Hezbollah et encourage "les efforts visant à régler d’urgence la question des prisonniers libanais détenus par Israël"
Elle demande à la communauté internationale d’apporter une aide humanitaire immédiate aux Libanais et de faciliter le retour des dizaines de milliers de personnes déplacées, notamment en rouvrant les ports et aéroports.
Quelques réactions
Au Liban :
La résolution est dans l’intérêt du Liban", a déclaré le premier ministre libanais Fouad Siniora. "Si cette résolution prouve quelque chose, c’est que le monde entier a soutenu le Liban", a-t-il ajouté. Pour le PC libanais qui appelle à entrer dans la résistance « la résolution 1701 a donné raison aux agresseurs et pour le Hezbollah Hassan Nasrallah salue la victoire historique de la résistance sur Israël tout en considérant « certains aspects de cette résolution injustes et iniques »
En Israël :
"Nous avons obtenu satisfaction sur la quasi-totalité de nos exigences" a lui aussi estimé le numéro deux du gouvernement israélien, Shimon Peres. "La résolution justifie l’attitude qu’Israël a adopté depuis le début en affirmant que c’est le Hezbollah qui a attaqué en premier" a notamment souligné M. Peres. Le Likoud a pour sa part qualifié cette résolution de « décision honteuse » et a accusé le gouvernement « d’avoir cédé à la terreur ».
USA
George Bush a salué, samedi, l’adoption de la résolution 1701 tout en imputant la responsabilité de cette guerre au Hezbollah. Le président américain a attribué la responsabilité de cette guerre aux "attentats terroristes" du mouvement chiite "Le Hezbollah et ses parrains iraniens et syriens ont plongé le Liban et Israël dans une guerre non voulue et des millions de personnes en ont souffert".
Grande Bretagne
Tony Blair. "Nous devons maintenant travailler à la résolution des causes sous-jacentes de ce conflit. Il s’agit en partie de la capacité du gouvernement libanais démocratiquement élu à exercer son entière responsabilité sur le Liban",.M. Blair a évoqué un lien entre le conflit israélo-palestinien et la crise libanaise, "qui provient de la volonté d’exploiter l’impasse permanente en Palestine".
La Russie
Vladimir Poutine a évoqué samedi avec le premier ministre israélien Ehoud Olmert la résolution de l’ONU sur le Liban, la qualifiant de "chance" donnée à un règlement "politique", selon le service de presse du Kremlin. Le président russe a souligné que ce règlement politique était "l’unique alternative raisonnable à l’expansion de la confrontation politico-militaire" .
L’UE
La commissaire européenne aux relations extérieures, a appelé les différentes parties à "cesser immédiatement les hostilités". "C’est ce qu’il y a de plus urgent à faire afin d’alléger les souffrances de ces civils innocents pris au piège de ce conflit", a déclaré Mme Benita Ferrero-Waldner, qui a souligné qu’il était "essentiel de s’assurer que l’aide humanitaire atteigne ceux qui en ont besoin"
Une résolution neutre ?
Il est clair que le cessez le feu était une exigence de première nécessité et que cette résolution a été un point d’appui pour celui-ci. Il est clair aussi que cette résolution aurait pu être prise beaucoup plus tôt mais qu’à l’évidence Les USA et Israël ne l’ont pas voulu persuadés qu’ils étaient qu’en quelques jours ils arriveraient à se débarrasser du Hezbollah et au delà de toute forme de résistance libanaise. Le rapport connu récemment sur la planification concertée par les USA et Israël de la guerre du Liban ne laisse guère de doute sur le sujet.
Pour autant si un cessez le feu même tardif est le bienvenu, le texte de la résolution en particulier dans son préambule est plus que contestable. En effet celui-ci indique : « Se déclarant extrêmement préoccupé par la poursuite de l’escalade des hostilités engagées au Liban et en Israël depuis l’attaque du Hezbollah en Israël le 12 juillet 2006 ». Autrement dit, en capturant deux soldats israéliens (dans le but -faut-il le rappeler ? d’obtenir la libération des centaines de prisonniers libanais enfants compris qui d’après le Hezbollah et le gouvernement libanais ont été capturés sur le territoire libanais) la résistance libanaise serait responsable de la campagne israélienne de terreur et de destruction du Liban.
L’ONU ne souligne ni le caractère disproportionné « de la riposte » ni de ce fait ne demande à Israël une contribution à la réparation des ravages que Tsahal a causés
Partant de cette logique l’ONU réclame « la libération inconditionnelle des [deux] soldats israéliens enlevés » sans exiger la libération des prisonniers libanais emprisonnés en Israël, se disant seulement « conscient du caractère délicat de la question des prisonniers et encourageant les efforts visant à régler d’urgence la question des prisonniers libanais détenus en Israël ». Même la question du retrait des forces israéliennes n’a pas, selon l’ONU, le même caractère impératif. L’ONU dit simplement être « déterminé à agir de telle sorte que ce retrait intervienne le plus tôt possible ». Donc après s’être assuré du « nettoyage » (sic) de la zone conquise, Israël pourra passer le relais à la FINUL.
La résolution n’exige pas non plus qu’Israël quitte la partie du Liban qu’elle occupe depuis 1967 (les fermes de Chebaa). Elle se contente de dire : « Prenant dûment note des propositions faites dans le plan en sept points concernant le secteur des fermes de Chebaa (...) ». Israël pourra donc continuer à occuper cette partie du territoire libanais pendant que la force internationale la protégera de la résistance libanaise.
Enfin, force est de constater que l’ONU n’a rien à dire sur les opérations d’Israël à Gaza et en Cisjordanie. L’armée d’Israël continue ses opérations armées dans ces territoires, massacre la population, kidnappe les représentants élus du peuple palestinien, etc. sans que la « communauté internationale » s’en émeuve.
Dans ces conditions on peut craindre que ce ne soit pas à partir de cette résolution que pourra se bâtir une paix durable. L’ONU rappelle bien un arsenal de résolutions antérieures mais il est aisé de faire remarquer qu’Israël par le passé n’a respecté aucune des résolutions de l’ONU qui ne lui convenaient pas .
Cessez le feu, résistance et paix durable.
Reste alors la question de la portée de ce cessez le feu et sa valeur dans le temps. Si l’on veut que le cessez le feu soit un réel pas vers la paix il faut qu’il porte en ses termes les fondements d’une paix durable.. Il faut bien se dire que nous ne sommes pas en présence de deux belligérants à égalité de responsabilité. On ne peut renvoyer dos à dos Israël et le Hezbollah. L’un est dans la position d’occupant l’autre dans celle d’envahi ce qui lui donne de fait une légitimité qu’aucun média du monde ne peut cacher quelques soient les artifices employés.
Les libanais s’estiment en état de légitime défense et soutiennent, toutes confessions confondues, à 87% la résistance du Hezbollah. Dans tous les pays du monde et de tous temps l’histoire nous a appris qu’un peuple qui se bat pour sa terre ne renonce jamais et que le David chez lui résiste victorieusement au Goliath qui tente de le soumettre ou l’annexer.
Il faut à ce sujet mesurer que, contrairement à ce que laissent entendre les médias occidentaux, le Hezbollah n’est pas ce parti des fous de Dieu tel qu’ils le présentent. L’alliance qu’il a faite avec les chrétiens maronites d’Aoun (général de la guerre de libération contre la Syrie en 1990) et les sunnites de Sidon constitue le point d’arrivée d’un long processus de révision de la plate forme politique des Hezbollah qui, partis exclusivement comme mouvement de résistance à l’occupation israélienne, à l’été 1982 a progressivement abandonné son projet de république islamique de type khomeyniste pour devenir un mouvement de résistance « nationale » et accepté le caractère interconfessionnel de l’état libanais. D’où ses succès, avec des listes interconfessionnelles à la fois aux élections locales, surtout dans le centre et le sud, et aux élections politiques de 2005, quand il a eu 12 députés, constituant, avec les autres mouvements chiites et les parlementaires indépendants, un groupe de 35 députés environ (sur 128) et obtenant deux ministres plus un indépendant dans un gouvernement d’unité nationale.
Dans ces conditions on comprend mieux que les libanais à une écrasante majorité n’acceptent pas le désarmement du Hezbollah en qui ils voient les libérateurs du Sud Liban. Ce soutien à la résistance est d’autant plus fort que le gouvernement israélien dit maintenant qu’il est prêt à négocier la libération des deux prisonniers ! Ce qui en Israël même suscite incompréhension et questions sur les réelles raisons du déclenchement de la guerre.
Une paix durable ne pourra intervenir que si Israël change radicalement de politique.. 58 ans de politique de la haine montrent assez leur échec. Cela une part grandissante d’Israéliens en a conscience. Celle qui, avec entre autres le PC israélien, a manifesté à plusieurs reprises contre la guerre et l’attitude expansionniste de l’état hébreux.
Ce conflit a fait entendre - et c’est un fait nouveau par son ampleur - des voix juives du monde entier qui refusent de se faire confisquer l’holocauste pour justifier la politique impérialiste des USA et dont Israël est le bras armé dans la région. Elles proclament haut et fort qu’il faut distinguer antisémitisme et antisionisme et que la shoah ne saurait justifier une attitude qui s’apparente à une politique d’apartheid.
Les manifestations de protestation contre la guerre en France n’ont pas eu l’ampleur souhaitée. La période estivale voire l’indifférence n’expliquent pas tout. Les peuples mesurent-ils que leur voix peut arrêter une guerre si elle se fait entendre avec suffisamment de force ? Au sujet de l’apartheid justement on doit se rappeler le rôle important de l’opinion publique mondiale dans la fin du régime raciste d’Afrique du sud.
A chacun de nous de convaincre que notre banderole n’est pas un vœu pieux : « Face à la folie impérialiste, solidaires de tous les pays, imposons la paix ».