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Plan de Professionnalisation Personnalisé (PPP) : Ce qu’il faut savoir

Article mis en ligne le samedi 22 mars 2008

1. Objectif du PPP

Le Plan de Professionnalisation Personnalisé est un nouveau dispositif qui devra à terme se substituer au stage préparatoire à l’installation (SPI) et au stage « 6 mois », qui participent à conférer la Capacité Professionnelle Agricole (CPA) nécessaire pour l’accès aux aides nationales à l’installation.
Il devra s’adapter aux besoins de chaque candidat. Celui-ci sera soumis à la réalisation d’un ou plusieurs modules de formation et/ou un ou plusieurs stages.
Le PPP est testé dans 5 départements (Ardèche, Aube, Aveyron, Morbihan, Pas de Calais) depuis le mois de juin 2007 et devrait être généralisé à toute la France à partir de juin 2008.

2. Resituer le PPP dans le cadre de la politique d’installation

Les aides à l’installation nationales (DJA + prêts bonifiés) sont cofinancées par l’Union Européenne et sont attribuées aux porteurs de projet qui répondent à plusieurs critères, dont notamment :avoir la CPA (diplôme de niveau IV + PPP à partir de juin 2008).

Les conseils régionaux et généraux peuvent également financer des aides à l’installation à condition que les candidats respectent les 3 premiers critères au moins (ceux imposés par l’Union Européenne). Précisons que l’ARF [1] a obtenu que les Conseils régionaux et généraux puissent définir leur propre CPA pour l’attribution de leurs aides.

Le PPP sera l’un des critères d’obtention des aides européennes et nationales, voire locales selon décision des collectivités territoriales, en faveur de l’installation.
Sa mise en œuvre bénéficiera en outre de divers financements nationaux et surtout locaux à destination des structures qui réaliseront l’accompagnement des porteurs de projet tout au long de la présentation, de l’élaboration et de la réalisation de leur PPP.
Les activités actuelles des ADEAR et Confédération paysanne réalisant de l’accompagnement à l’installation, pourraient donc se trouver en concurrence avec ce dispositif pour bénéficier des financements des collectivités territoriales. Certains financements des structures de notre réseau pourraient diminuer, voir disparaître.

3. Présentation du cadre national du PPP

Le PPP est un parcours de professionnalisation qui sera élaboré en fonction du profil et du projet de chaque candidat pour le préparer au mieux à son installation en agriculture.
Après une phase d’accueil et de définition du projet du candidat, les compétences de celui-ci (en regard de son projet) seront évaluées et discutées.
Cette évaluation permettra ensuite l’élaboration du PPP : modules de formation et stages à suivre par le porteur de projet.
Si la réalisation du PPP est conforme et validée par la DDAF et la CDOA, le porteur de projet pourra alors bénéficier de la DJA et des prêts bonifiés (sauf si un autre critère lui fait défaut).

Lors du Salon de l’Agriculture, Nicolas Sarkozy a signé avec les JA un pacte renouvelé de l’installation qui propose les premières modalités de fonctionnement du PPP :
- le passage au Point-Info Installation (PII) deviendrait obligatoire pour tous les candidats à l’installation aidés ou non : le pacte précise que le CFE [2] devrait envoyer obligatoirement tous les candidats au PII, (nous ne savons pas actuellement si la réalisation du PPP dans son ensemble serait obligatoire pour tous)
- la gestion du Point-Info Installation (PII) serait assurée par une sous-commission de la CDOA [3] présidée par les JA,
- les ADASEA [4] auraient la responsabilité de la gestion de l’élaboration et du suivi du PPP,
- le diplôme de niveau IV non agricole suffirait pour réaliser un PPP qui fournirait les compétences agricoles manquant au candidat pour pouvoir s’installer avec les aides nationales,
- le financement du PPP devrait « être complété par l’implication d’autres partenaires traditionnellement impliqués (VIVEA, collectivités territoriales,…) ».

4. Enjeux autour du PPP

- Les JA veulent utiliser la mise en place du PPP pour renforcer et officialiser la place du PII dans le parcours des candidats à l’installation. Si le PII devient un lieu de passage officiellement obligatoire pour tous les candidats à l’installation, tout en restant sous leur contrôle, les JA pourront connaître tous les porteurs de projet du territoire, constituer une base de données avec leur nom pour tenter d’en faire de nouveaux adhérents et surtout contrôler l’information qui sera délivrée à ces candidats sur les modalités pour s’installer et les structures existantes susceptibles de les accompagner.

- En gardant la gestion des PII les JA pourront également capter les financements prévus pour assurer cette mission de service public.

- Comme nous l’avons précédemment, les JA demandent que les financements régionaux et départementaux pour l’accompagnement à l’installation convergent sur les structures impliquées dans le PPP : il y a donc un danger de récupération des financements obtenus par les ADEAR et CONFEDERATION PAYSANNE qui réalisent actuellement de l’accompagnement de porteurs de projet dans ou hors parcours officiel.

- Enfin les JA ont expliqué que le PPP devait avoir pour objectif de permettre 2000 installations aidées supplémentaires par an (soit 8000 par an en tout). Il s’agit de permettre à tous les candidats qui disposent déjà d’une ferme mais pas de la Capacité Professionnelle Agricole de pouvoir bénéficier des aides. Toutes les autres catégories d’installés non aidés (soit près de 5500 par an) sont d’ores et déjà exclues du champs de la réforme.

5. Revendications de la Confédération paysanne

La Confédération paysanne considère qu’il est inacceptable que la gestion du PPP revienne aux seules mains d’un syndicat agricole : les JA.
Nous demandons l’annulation pure et simple des annonces qui ont été faites par le gouvernement et que les orientations du pacte renouvelé ne soient pas retenues car elles ne correspondent pas à des conclusions du groupe de travail ministériel.

Nous rappelons que nos revendications sont :
- le PPP et le passage au Point-Info Installation doivent être ouverts mais non obligatoires pour tous ceux qui s’installent sans les aides nationales (DJA et prêts JA),
- la gestion du PPP (l’accueil, l’élaboration, le suivi de la réalisation, la validation) doit être neutre et plurielle grâce à un comité de pilotage (présidé par le représentant de l’Etat) composé de l’ensemble des acteurs de l’installation et de la formation,
- un cahier des charges doit être défini pour permettre d’habiliter toutes les structures qui souhaitent réaliser le suivi au quotidien des candidats lors de leur PPP,
- les candidats doivent avoir la possibilité de choisir la structure et les paysans qui les accompagneront (ADEAR ou Confédération paysanne par exemple),
- le PPP doit être ouvert, à ceux voulant s’installer avec les aides, qui n’ont pas encore de ferme à reprendre : des modules d’aide à la recherche de foncier doivent donc être par exemple proposés dans le PPP.

Enfin, il est très important de poursuivre notre partenariat avec les Conseils régionaux qui, en tant que financeurs, sont des acteurs de poids susceptibles d’influer sur les décisions du ministère.


Quelques éléments de définition

• Point-Info Installation (PII) : Actuellement, il s’agit d’un lieu dont l’objectif est officiellement d’accueillir et d’informer tous les candidats à l’installation en agriculture sur le parcours à réaliser. Pour ce faire le PII aide le candidat à « débroussailler » son projet et l’oriente vers les organismes compétents pour l’aider. Par ailleurs, le PII doit mettre à disposition une documentation complète sur l’installation en agriculture. Dans les faits, ces PII sont généralement à la Chambre d’agriculture et tenus par les seuls JA. Un salarié du syndicat JA est d’ailleurs souvent rémunéré pour assurer la gestion du PII et oriente donc les projets des candidats qui se présentent en fonction de la seule idéologie de ce syndicat. Les candidats avec des projets sortant du modèle agricole prôné par les JA se trouvent souvent découragés de poursuivre leur projet.

• Centre de Formalités des Entreprises (CFE) : Ce centre a pour rôle de faciliter les démarches administratives des paysans à l’occasion de la création, de la modification d’activité ou de la cessation d’activité de leur « entreprise ». le paysan se rend au CFE pour faire sa déclaration et le CFE s’occupe de transmettre les informations à l’INSEE (numéro SIREN ET SIRET), à la MSA, au centre des Impôts,… Ce sont les Chambres d’agriculture qui se voit confier la responsabilité de gérer les CFE.

• Commission Départementale d’Orientation Agricole (CDOA) : La CDOA est un organisme consultatif qui donne des avis au préfet à chaque fois que celui-ci doit prendre des décisions en lien avec le schéma départemental des structures. Elle donne son avis sur :
-  les projets d’installation des jeunes agriculteurs
-  les aides publiques accordées dans le cadre de la modernisation des exploitations
-  les demandes individuelles d’agrandissement des exploitations
-  les demandes d’autorisations d’exploiter
-  l’attribution des quotas, le transfert de droits à primes
Elle doit normalement mettre en œuvre les politiques communautaires, nationales et départementales d’accompagnement des agriculteurs. C’est-à-dire :
-  maintenir un maximum d’actifs agricoles disposant d’un revenu proche du revenu de référence départemental
-  renforcer les exploitations familiales
-  éviter les démembrements d’exploitations viables
La commission départementale d’Orientation Agricole est composée de l’administration et des Organisations Professionnelles Agricoles du département.

• Comité départemental Installation (CDI) : Ces comités n’existent pas dans tous les départements et n’ont pas une définition juridique précise (ni de définition de leur composition). Les JA poussent le ministère pour que le Comité Départemental à l’Installation soit généralisé et devienne une sous-commission de la CDOA, co-présidée par le préfet et les JA, qui pilote le PPP.

Conseils régionaux et installation en agriculture : Les Conseils régionaux (et généraux) ont la possibilité de financer des structures d’accompagnement à l’installation ou directement les porteurs de projet (en complément aux aides nationales ou non). Ces financements s’inscrivent généralement dans le cadre des PIDIL [5] qui ont pour but de « permettre de répondre aux particularismes régionaux ou départementaux ». C’est pourquoi ils peuvent être cofinancés par l’Etat et les collectivités territoriales.

Les Conseils régionaux ont exprimé, par le biais de l’ARF, le souhait que ces PIDIL soient inscrits dans le cadre des CPER [6] pour la période 2007-2013. Ils ont par ailleurs obtenu de ne pas être soumis aux critères français pour la définition des bénéficiaires de leurs aides, seuls les critères imposés par l’Union européenne s’appliquent (s’installer pour la 1ère fois, avoir moins de 40 ans, avoir la Capacité Professionnelle Agricole que le Conseil régional a la liberté de définir, réaliser un Plan de Développement Economique).

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Notes

[1Association des Régions de France

[2Centre de Formalité des Entreprises

[3Commission Départementale d’Orientation Agricole

[4Association Départementale pour l’Aménagement des Structures des Exploitations Agricoles

[5Programmes pour l’Installation et le Développement des Initiatives Locales

[6Contrat de Projet Etat/Région

[7Association des Régions de France

[8Centre de Formalité des Entreprises

[9Commission Départementale d’Orientation Agricole

[10Association Départementale pour l’Aménagement des Structures des Exploitations Agricoles

[11Programmes pour l’Installation et le Développement des Initiatives Locales

[12Contrat de Projet Etat/Région

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