Frontera Corozal, le village est juste composé d’une route principale pavée, de simples rues en terre, de quelques maisons éparses et l’embarcadère où tout le monde se retrouve. Sur les berges, les embarcations patientent. Nous sommes hors-saison. Les touristes sont partis vers d’autres cieux. Ils ne restent que les pêcheurs et les locaux. Et quelques touristes qui ne résistent pas à l’idée d’être à contre-courant. Aussitôt arrivés, la première tâche est de faire baisser le prix prohibitif des lanchas. Il faut négocier, alpaguer le peu de touristes et se regrouper pour que le principe, plus on est de fous, moins on paie s’avère juste. Les singes hurleurs semblent se moquer de nous. Comme un écho dans nos négociations acharnées.
Puis se laisser happer par le coucher de soleil. Admirer le fleuve lisse comme un miroir. Les barques sont comme sens dessus-dessous. Au loin, un bateau pressé, fonce droit dans le jus du soleil. Juste en face, des flaques d’or scintillent. Les rochers se figent comme les gardiens ancestraux, qu’ils ont toujours été. Des aigrettes joueuses se déposent dessus. Avec nonchalance. Enfin, la nuit dépose ses étoiles au coin du ciel. Il nous faut attendre encore quelques heures. Apprendre la patience et se coucher en rêvant à cette cité du bout monde. Finalement, on n’a jamais été aussi près.
Au petit matin, le désir s’enflamme malgré une brume opaque. Encore ensommeillés, on ne devine pas encore les rives. Entre deux mondes. Comme si on quittait celui-là pour aller vers le monde des Mayas. La rivière est comme une charnière, un long fil qui se déroule à l’envers. On remonte le temps. Le soleil fait des percées. Les nuages bataillent avec lui. La brume, elle, continue de nous envelopper de sa grandeur. Les arbres ne sont que des ombres fugitives. Presque inquiétantes. L’embarcation glisse doucement. Comme si elle n’osait pas déranger ce monde qui était là avant elle, et qui sera là bien après elle. Assise dans cette lancha, perdue dans mes pensées, je m’imaginerais presque comme une exploratrice du début du siècle, à la recherche du secret des Mayas. Mais le seul nom qui me vient spontanément à l’esprit, c’est Dora. C’est un peu nul quand même… Soudain, le bruit du moteur me ramène à la réalité. On s’approche. Et lorsque le soleil gagne sa place dans le ciel, la lancha ralentit et s’échoue sur un semblant d’embarcadère. Juste quelques marches pour être aux portes de la cité de Yaxchilan. Juste quelques mètres encore. Les quatre autres touristes partent de leur côté. Nous ne sommes plus que tous les deux. Seuls dans une cité maya. L’émotion est totale…
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