« Support Don’t Punish » est une campagne mondiale de plaidoyer lancée par l’IDPC International Drug Policy Consortium qui depuis 4 ans s’attache à promouvoir des politiques des drogues qui mettent la priorité sur la santé publique et les droits humains. Le 26 Juin, initialement journée internationale de lutte contre la drogue, devient journée internationale de lutte contre la guerre à la drogue et de soutien aux personnes qui consomment.
Pourquoi lutter contre la guerre à la drogue ?
Depuis son instauration sous la présidence de R. Nixon, la « guerre à la drogue » s’est imposée comme la principale option face à la question des substances illicites. Elle coûte des milliards de dollars à la planète, alors que le nombre
d’usagers continue d’augmenter, que les trafics prospèrent, et que les politiques répressives accroissent les risques et les dommages.
Pourquoi soutenir les gens qui consomment ?
La guerre à la drogue est de fait une guerre aux drogués : la criminalisation punit, emprisonne, condamne même à mort des personnes qui pourraient bénéficier d’action de réduction des risques ou de soins. Les approches innovantes
en santé publique ont fait leurs preuves, là où elles ont étaient appliquées, réduisant les contaminations, offrant un accès aux droits et aux soins, ainsi qu’une meilleure citoyenneté aux usagers de drogues.
Dans plusieurs centaines de villes dans le monde, le 26 Juin vont se tenir des actions pour réclamer la réforme des lois et des politiques uniquement répressives, au profit de programmes qui mettent la santé et des droits de l’homme en
avant. En avril (19 au 21) a eu lieu une session extraordinaire de l’ONU sur la question des drogues (l’UNGASS), les conclusions appellent à la fin du tout répressif en matière de drogue au niveau mondial.
Agissons pour faire entendre nos voix, plus efficace et plus humaine.
A Marseille, réunissons nous sur la Place de la Joliette à Marseille le Dimanche 26 Juin dès 14h30, autour d’un débat participatif « Pourquoi arrêter la guerre à la drogue ? » retransmis en direct via un plateau radio extérieur (Cave Carli Radio / LNM).
Plus d’infos sur l’événement sur FB « Support Don’t Punish Marseille 2016 » :
https://www.facebook.com/events/219895521735111/
Vos commentaires
# Le 19 juin 2016 à 14:30, par Annick Stevens En réponse à : Le narco-trafic, paroxysme du capitalisme
Une analyse très percutante du lien entre drogues et capitalisme a été faite par Jérôme Baschet lors d’une rencontre zapatiste. En voici l’extrait le plus significatif (le reste de l’article peut être consulté sur http://lavoiedujaguar.net/Nous-faire-mondes-face-a-l-hydre).
Aujourd’hui, les activités illicites (drogues et autres trafics) représentent une partie de l’économie mondiale qu’il est difficile de chiffrer précisément mais que l’on peut estimer autour de dix pour cent du PIB mondial (les estimations varient entre cinq pour cent et quinze pour cent). Plus significatif encore, leur croissance actuelle est extrêmement rapide, favorisée par l’internationalisation et la dérégulation de l’économie néolibérale. De fait, il faut inclure parmi les effets avérés de la reconfiguration néolibérale du capitalisme le fait d’avoir créé les conditions structurelles d’une croissance accélérée des activités illicites et criminelles.
Les drogues comptent désormais parmi les trois marchandises les plus importantes en terme de profits, avec les armes et le pétrole. Les circuits de blanchiment d’argent créent des flux massifs qui alimentent de manière significative le système financier international. L’ensemble des activités illicites est ainsi devenu indispensable à une économie mondiale par ailleurs fragile : lui retirer cet apport de dix pour cent aurait des conséquences catastrophiques.
Au-delà de ces données, il pourrait être utile de chercher à mieux comprendre le rôle que ces secteurs jouent dans l’ensemble du système capitaliste.
a) Ils ont une fonction de contention face à la décomposition sociale provoquée par les politiques néolibérales. Celles-ci multiplient les populations « superflues » qui, ne trouvant ni travail ni aucune place dans la société, peuvent être aisément happées par les réseaux du crime organisé, comme c’est le cas au Mexique. Sous d’autres modalités, en Europe, comme ailleurs aussi, on constate que dans certains quartiers populaires, dévastés par de nombreux problèmes dont le premier est le chômage (jusqu’à cinquante pour cent parmi les jeunes), les divers trafics, de drogue ou autres, constituent l’une des rares manières permettant de survivre. C’est la raison pour laquelle les politiques publiques ne peuvent faire autre chose que de simuler une lutte pour « restaurer l’État de droit », car chacun sait que l’élimination effective de l’économie parallèle provoquerait une explosion sociale incontrôlable. Partout, drogues et activités illicites sont devenues indispensables pour contenir les effets de la décomposition sociale provoquée par le capitalisme néolibéral.
b) On sait aussi que, dans certaines régions, notamment là où abondent les ressources naturelles (minerais ou autres), la violence du crime organisé peut être instrumentalisée, afin de faire régner la terreur, de faire en sorte que les habitants abandonnent leurs territoires et, ainsi, de vaincre les résistances à la dépossession et à l’exploitation [4]. De manière générale, la violence non institutionnelle peut être utilisée comme une façon de contribuer au gouvernement de tous par la peur, mais aussi de réprimer ou d’éliminer ceux qui s’organisent et s’opposent aux avancées de la domination capitaliste.
c) La drogue est la marchandise parfaite, presque la quintessence du capitalisme. Au moment où prédominent les facteurs de crise de la production légale, les drogues permettent des taux de profits extraordinaires (non seulement du fait de sa prohibition, mais aussi grâce à la surexploitation de la main-d’œuvre, travaillant souvent en condition de quasi-esclavage, tant dans les cultures que dans d’autres domaines d’activités, comme les mines clandestines, nombreuses notamment au Mexique). C’est une marchandise presque idéale : n’oublions pas qu’un secrétaire d’État à l’Agriculture, sous la présidence de Vicente Fox, n’avait pas hésité à donner en exemple aux paysans mexicains les cartels de la drogue, fort habiles, argumentait-il, à s’insérer dans les marchés nationaux et internationaux...
C’est la marchandise parfaite également dans la mesure où elle attire grâce à son énorme pouvoir de séduction : elle promet plaisir, transgression, réalisation et dépassement de soi. Pour certains cercles des élites, elle est devenue un moyen indispensable pour soutenir les exigences de l’hyperactivité et de la soif de succès. C’est encore la marchandise parfaite en ce qu’elle provoque une dépendance à l’égard de la consommation, soit exactement ce que la forme actuelle du capitalisme cherche à généraliser. En bref, elle séduit par ses promesses de liberté et ce qu’elle apporte en réalité, c’est la dépendance et la destruction : c’est très précisément ce qui définit, en général, la marchandise capitaliste. La drogue est donc l’expression la plus manifeste et la plus dramatique de la soumission de la vie à la logique de la consommation : une fois créée la dépendance, commence l’enfer de vivre pour trouver l’argent nécessaire pour se procurer la dose suivante, au point d’être prêt à tout et à tout trahir, valeurs et amitiés comprises.
En résumé, se combinent dans les usages actuels des drogues les traits les plus saillants de la société de la marchandise : profits extrêmes pour quelques-uns, surexploitation brutale pour d’autres, culte de l’argent pour tous, dépendances consuméristes, destruction de la vie.